Commission mixte algéro-française sur l’Histoire : Les archives de la colonisation comme préalable

El Watan, 6 avril 2025

La Commission mixte algéro-française sur l’histoire et la mémoire reprendra prochainement ses travaux à Paris. Des travaux qui interviennent dans un contexte politique marqué par une désescalade entre les deux capitales, entamée depuis quelques semaines à la faveur d’un entretien téléphonique entre le président de la République, Abdelmadjid Tebboune, et son homologie français, Emmanuel Macron.

C’est dans ce même contexte que le ministre des Affaires étrangères français, Jean-Noël Barrot, entamera dès aujourd’hui une visite officielle à Alger. Une visite qui acte une reprise de la coopération algéro-française. Le coprésident de la Commission mixte algéro-française sur l’histoire et la mémoire, Lahcen Zeghidi, s’est exprimé, à cette occasion, sur la conduite à suivre pour faire avancer les négociations sur un dossier d’une extrême importance entre les deux pays.

Selon le quotidien El Khabar, M. Zeghidi a appelé, instamment, vendredi, la partie française à mettre en œuvre les accords de la cinquième réunion du comité. Dans une déclaration au quotidien arabophone, il a insisté notamment sur la nécessité de rouvrir le dossier des archives. S’adressant à ses homologues français au sein du comité, il a suggéré de fixer un «calendrier concret» pour la restitution des archives et des biens spoliés pendant la colonisation française de l’Algérie, y compris ceux qui re-montent à la période ottomane.

Sixième round

Par ailleurs, il a exhorté la partie française, lors d’un déjeuner offert par Anne-Claire Le Gendre, conseillère du président Emmanuel Macron pour l’Afrique du Nord et le Moyen-Orient (en marge du quatrième round, ndlr), à surmonter les obstacles législatifs qui considèrent que tous les éléments transférés des colonies sont la propriété de la France. «Nous avons insisté pour qu’un décret présidentiel soit publié, ce qui a suscité des réactions», a souligné M. Zeghidi, faisant référence aux «parties» qui s’opposent, toujours, à la restitution des archives et des biens pillés.

Il a, toujours selon El Khabar, ajouté que la délégation algérienne se rendra à Paris (pour participer au sixième round, décidé après l’appel téléphonique entre les Présidents des deux pays) afin de mettre en œuvre les accords du cinquième round. A ce propos, il a déclaré : «Nous nous rendrons à Paris pour récupérer les archives et non pour dialoguer ou discuter, ainsi que pour inspecter les zones du sud de la France où les sites d’archives n’ont pas été examinés.»

M. Zeghidi s’est dit, par ailleurs, étonné par l’inventaire des biens algériens dans dix-neuf institutions et structures françaises (Bibliothèque nationale, musées, etc.) qui ont été examinées lors de la dernière mission de dix jours de la commission en France et qui ont fait l’objet de pillage. L’historien a également rappelé que l’accord conclu entre les deux parties portait sur la restitution de plus de deux millions de documents d’archives (copies numérisées) et des biens et possessions remontant à la période précédant l’invasion (1830), y compris des armes, comme des canons, des archives papier et des biens ayant une symbolique particulière pour les Algériens, dont certains ont été pillés au palais du Dey. «Nous avons dit à la partie française que nous ne céderons sur rien, même s’il s’agit d’un stylo, ainsi que les biens de l’Emir Abdelkader : son burnous, sa copie du Coran, ses épées et ses canons», a-t-il précisé.

M. Zeghidi a fait savoir que la partie algérienne s’est appuyée sur un rapport du consul américain à l’époque de la chute d’Alger, présenté par le Dr Ali Tablit, pour appuyer ces revendications. «Nous avons reçu des données et des informations de la part d’historiens, de scientifiques et d’experts algériens nationaux et de la diaspora qui ont renforcé l’argumentaire algérien contre la partie française», a-t-il dit. «Ces données ont mis en lumière des choses que nous ne savions pas», a-t-il enchaîné.

Notons que le quatrième cycle de travail de la commission, le plus long, a permis à la partie algérienne d’examiner les archives détenues par la partie française, y compris celles détenues par le ministère de la Défense.

Ce cycle a abouti à un accord sur la création d’un portail en ligne et sur l’échange de chercheurs (quinze par pays) pour mener des recherches. 

M. Abdelkrim