Ali Benhadj jeudi dernier sur la chaine arabe Al-Hiwar

Ali Benhadj jeudi dernier sur la chaine arabe Al-Hiwar

Graves insultes contre Smaïn Lamari

El Watan, 1 septembre 2007 Voir commentaire ci-dessous

La mort du patron des services du contre-espionnage, le général de corps d’armée Smaïn Lamari, a été une occasion que Ali Benhadj, numéro 2 du parti dissous, n’a pas laissée passer pour revenir sur la scène médiatique et tirer à boulets rouges sur « une ambulance ». Dans une intervention des plus virulentes, diffusée tardivement jeudi dernier par la chaîne de télévision Al Hiwar, une chaîne arabe, l’ancien responsable de l’ex-Fis commence par qualifier feu Lamari de « criminel ». Selon lui, on ne peut parler des généraux ou de l’institution militaire sans prendre en compte deux points importants.

Dans une intervention des plus virulentes, diffusée tardivement jeudi dernier par la chaîne de télévision Al Hiwar, une chaîne arabe, l’ancien responsable de l’ex-Fis commence par qualifier feu Lamari de « criminel ». Selon lui, on ne peut parler des généraux ou de l’institution militaire sans prendre en compte deux points importants. Le premier est que chaque Etat doit avoir une armée dirigée par des hommes munis d’expérience, de diplômes, de connaissance, mais aussi de la jalousie pour son peuple, mais que cette institution soit dirigée par une bande de criminels qui viole les lois de la religion et de la oumma, ceci amène à une des catastrophes les plus graves. Smaïn Lamari est aujourd’hui à la maison de l’Eternel et si sa tombe était en Grande-Bretagne, on sortirait son corps pour être jugé comme l’ont été de nombreux apostats dans le monde arabe et islamique. » Ali Benhadj pousse plus loin son réquisitoire en accusant feu Lamari d’avoir été le responsable « de la disparition, de la mort et de l’exode de milliers d’Algériens », précisant au passage que ses accusations visent également toute l’institution militaire qui a dirigé « le coup d’Etat » de 1992 au sein de laquelle Lamari « constituait le noyau dur qui tuait en Algérie et à l’étranger », dit-il.

Tentative d’assassinat

Il ajoute : « Ces propos ne viennent pas uniquement de moi, mais également des officiers qui ont écrit leurs mémoires à l’étranger. » Ali Benhadj affirme que Lamari a déclaré un jour : « Je suis prêt à tuer 3 millions d’Algériens », alors que l’opinion publique se rappelle de cette phrase qu’il avait lancée en 1991 et qui préludait une décennie de violence jamais vécue ailleurs. Il avait dit à un journaliste qu’il était d’accord pour « exterminer un tiers de la population si elle refuse la république islamique pour que les deux tiers puissent vivre en paix ». Ali Benhadj annonce même un scoop à l’animateur de la chaîne de télévision. Celui de la tentative d’assassinat de Rabah Kebir en Allemagne par un des éléments de Smaïn Lamari en soulignant que la justice germanique « poursuit actuellement des espions algériens qui harcèlent les politiciens à l’étranger ». Des propos qui poussent l’animateur à intervenir : « Le général est entre les mains du Seigneur. Ne nous réjouissons pas de sa mort. Nous voulons aborder le sujet politiquement sans porter atteinte à la personne qui n’est plus de ce monde. Là n’est pas notre sujet. Nous voulons savoir si vous avez des révélations à nous faire sur les négociations que Smaïn Lamari a engagées avec l’ex-Fis. » Une manière de mettre le holà mais cela n’a pas été bien compris par l’ancien imam de Kouba, dont le fils, Abdelkahar, est actuellement dans les rangs du GSPC écumant les montagnes de Boumerdès et de Kabylie. « Je ne me réjouis pas de sa mort, mais il y a des vérités sur l’institution militaire. Pour que cette dernière soit propre, il faut qu’elle nettoie ces criminels et tueurs qui la composent comme le général de corps d’armée, ceux qui sont à la retraite, le général Toufik et d’autres encore plus nombreux qui doivent être jugés. Je ne parle pas de personnes mais de ceux qui dirigent l’Armée, ceux qui étaient responsables des jeunes appelés, envoyés dans les montagnes pour se faire tuer alors que leurs enfants étaient gardés bien au chaud chez eux (…). Je demande même une enquête sur les richesses de ces généraux. » L’ancien imam estime qu’il n’y a pas de classe politique en Algérie. « Il y a des partis préfabriqués et ceux qui ont tenté d’avoir une existence ont connu des mouvements de dissidence internes, comme cela a été le cas au sein du FLN, du PT et du FFS, et dont les responsables sont les dirigeants de l’armée, plus particulièrement des services de renseignements. » Pour étayer ses propos, il rappelle les déclarations de Belaïd Abdesselam au sujet de la composition de son gouvernement faite après accord du général Nezzar qui l’a convoqué à son bureau. « Le chef du gouvernement qui se fait convoquer non pas dans une institution comme la Présidence ou au Palais du gouvernement, mais ailleurs, par une bande qui agit ainsi. Notre condamnation par le tribunal militaire n’était pas une décision du juge, mais celle de cette bande prise dans une villa, non au tribunal. Nous voulons aujourd’hui que ceux qui ont dirigé durant cette période (1992) soient jugés. » Il révèle néanmoins avoir rencontré feu Smaïn Lamari à deux reprises.

« Une force au-dessus de la loi »

La première fois après les événements de 1988. Durant l’entrevue, Ali Benhadj aurait avoué son droit à exercer la politique et il a été libéré. La seconde fois, durant la grève de juin 1990, en présence de Mouloud Hamrouche, alors chef du gouvernement. « Nous avons demandé lors de notre procès la présence de Samaïn Lamari mais le procureur, le colonel Boukhari, nous a affirmé qu’il convoquerait toutes les personnes que nous voulions sauf Lamari. Cet homme est le noyau dur des services de renseignements militaires, un instrument de répression terroriste qui utilise le terrorisme d’Etat, il est responsable de cette armée qui tue. » Des déclarations qui pour la troisième fois font réagir l’animateur. « Je vous ai déjà interrogé sur les responsables avec lesquels vous vous êtes entretenus et vous n’avez jamais parlé de votre rencontre avec Samaïn Lamari. Pourquoi parlez-vous de lui aujourd’hui ? » Ali Benhadj ne donne pas une réponse précise. Il tergiverse comme à son habitude. « Je l’ai rencontré à sa demande après mon incarcération. » L’animateur fait savoir à son invité qu’il n’a rien à lui apprendre et Ali Benhadj répond : « Je vous ai parlé de notre entrevue alors qu’il était un des dirigeants de l’armée, en juin 1990, après les tueries qui ont suivi la date du 4. Si Hamrouche en tant que chef du gouvernement témoigne au procès et un responsable de l’Armée refuse, cela veut dire que les dirigeants militaires sont au-dessus de la loi et de toutes les institutions de l’Etat. » « Je vais faire profiter nos téléspectateurs de ce qui s’est passé entre vous et Lamari. Pour l’histoire, vous a-t-il dicté ce qu’il fallait faire ? » Ali Benhadj : « Il ne m’a rien dicté. J’étais en présence de Abassi Madani et de Mouloud Hamrouche. Smaïn n’a prononcé aucun mot. C’est Hamrouche et Abassi qui ont le plus parlé pour définir les places publiques autorisées pour les rassemblements. Nous avons accepté et le lendemain tout a été rendu public. Mais il nous a trahis. Il a tué des citoyens à la place du 1er Mai. Lorsque j’ai demandé à Hamrouche qui a donné l’ordre de tirer, il m’a informé qu’il venait de démissionner le 2 juin. Cela veut dire qu’il y avait une autre force en dehors de la loi et du gouvernement qui a exécuté les manifestants. » L’animateur demande à Ali Benhadj quelle responsabilité a-t-il eu dans les événements d’octobre 1988, comme il l’avait affirmé en début de l’entretien. Il explique entre les lignes que ce sont ses prêches dans les mosquées qui ont poussé au soulèvement. « Puisque vous n’aviez pas de rôle, du fait que Lamari vous a convoqué à son bureau, cela voudrait dire que vous aviez un poids ? » L’ancien imam : « Non. Ils m’ont convoqué parce qu’ils m’accusaient d’avoir incité les jeunes à sortir dans la rue. Mais ce n’était pas vrai. Je leur ai dit que malgré le fait que je suis interdit de toute activité politique, je continue à exercer mon droit politique. Le plus grand crime que Bouteflika a commis est d’avoir garanti l’impunité à ces responsables. » Ali Benhadj revient à ses virulentes critiques à l’égard de Samaïn Lamari en disant : « Le fait qu’il soit pratiquant, ayant même accompli le pèlerinage, cela ne veut pas dire qu’il partira au Paradis », citant l’exemple de cette vieille femme qui a consacré toute sa vie à l’adoration de Dieu et de son Prophète et qui a fini en Enfer parce qu’elle n’a pas donné à manger à son chat. Graves déclarations pour un Ali Benhadj soumis à des restrictions depuis sa libération de la prison militaire. Pour largement moins que cela des journalistes ont été poursuivis et condamnés à de lourdes peines par des tribunaux algériens, prompts à réagir quand il s’agit de dirigeants de l’institution militaire, qu’ils soient en poste ou à la retraite. Ali Benhadj nous a habitués à des propos haineux et violents et les plus célèbres ont été ceux tenus contre les diplomates algériens enlevés en Irak. Il avait même suggéré leur assassinat à leurs ravisseurs, ce qui n’a pas tardé à être exécuté. Peut-on dire que Ali Benhadj, en proférant de telles insultes, veut gagner les chefs terroristes de son fils enrôlés dans les rangs du GSPC ou d’Al Qaïda pour le Maghreb ?

Salima Tlemçani


Commentaire de Djameleddine Benchenouf

http://esperal2003.blogspot.com/

Ali Benhadj a surtout le mérite de rester fidèle à ses convictions. Est-ce, en effet, tirer sur des ambulances que de désigner les vrais auteurs des massacres de civils qui ont été froidement préparés, puis exécutés? Est-ce achever un mort que de dire que Smaïn Lamari était un criminel et qu’il « constituait le noyau dur qui tuait en Algérie et à l’étranger »? Loin de traiter, comme l’a fait Madani Mezrag, Smaïn Lamari de héros et d’homme pieux, Ali Benhadj a eu le courage de rappeler que ce général avait déclaré devant témoins qu’il était prêt à tuer trois millions d’Algériens et même « exterminer un tiers de la population pour que les deux tiers puissent vivre en paix ». La paix des cimetières. La paix de la soumission à des voyous.
Ali Benhadj a-t-il tort de dire que l’armée ne recouvrera son honneur que si elle épure ses rangs des criminels et des tueurs qui la composent? Que le général Tewfik et même ceux qui sont à la retraite, comme Mohamed Lamari ou Nezzar doivent être jugés? Que les lois iniques d’auto-amnistie qui tentent de soustraire ces criminels à la justice des hommes sont « le plus grand crime que Bouteflika a commis »?
Qui, comme Ali Benhadj, a eu le courage de crier haut et clair, depuis l’Algérie même, ces vérités éclatantes? Qui a demandé, comme il le fait, qu’une enquête soit diligentée sur la fortune des généraux? Le régime sait bien ce qu’il fait en faisant du sujet de l’Armée un tabou inviolable. Parce qu’il sait que cette institution est son repaire, son antre. Notre armée est infestée de criminels, de pillards et de traîtres. Le scandale qui vient de ressurgir sur l’affaire BRC et où il est question d’officiers de cette armée qui espionnent leur propre pays au bénéfice des Américains est très significatif à cet égard. Les premiers à le savoir et à en souffrir sont tous ces soldats et ces officiers, hommes d’honneur et de devoir, qui endurent en silence le mal qui ronge leur institution. Ils sont des dizaines à avoir été assassinés par les tueurs et les tortionnaires du DRS, parce qu’ils ont exprimé, d’une manière ou d’une autre, leur opposition à cette déviation mortelle. Ils ont été, bien sûr, passés en pertes et profits et leur assassinat a été imputé à ce bien commode terrorisme.
Dans toutes ces déclarations de Ali Benhadj, je ne vois rien qui ne soit vrai. Tous les Algériens le savent et le disent. Sauf qu’il n’y a aucun média honnête ou vraiment libre dans notre pays pour relayer une quelconque accusation contre ceux qui nous broient et nous tuent et qui, comme le précise Ali Benhadj, sont au dessus des lois. Notre télévision, nos radios et nos journaux sont les voix de leurs maîtres. En échange, bien souvent, d’avantages sonnants et trébuchants. Il n’y a qu’à se renseigner sur la fortune colossale de Habib Chawky, le Directeur général de la télévision, entre bien d’autres, pour s’en convaincre. Je ne crois pas en l’islamisme, parce que je crois que la religion, la pratique religieuse et à fortiori la foi, ne doivent pas pas être un cadre institutionnel qui régit la vie des citoyens. Je suis opposé à ce que la religion serve de socle et de carcan à qui que ce soit, pour soumettre les citoyens et les contraindre à des obligations dogmatiques issues d’un contexte qui n’est plus celui d’aujourd’hui. Je crois, sans être un doux rêveur, qu’il nous est possible d’évoluer et de choisir un projet de société qui puisse permettre à tous de vivre dans le respect des croyances et même du libre arbitre de chacun. Nous avons des valeurs ancestrales qui n’ont pas eu besoin de l’islamisme pour nous hisser au rang d’une société tolérante et profondément humaine. Mais cela ne m’empêche pas de respecter les convictions de ceux qui ne pensent pas comme moi, surtout lorsqu’elles sont sont sincères et qu’elles ne se mettent pas au services de sordides intérêts. Ali Benhadj est de cette trempe. Pas de celle de tous ces « repentis » qui mangent aujourd’hui au même ratelier de ceux qu’ils disent avoir combattus, mais qui en fait n’ont fait que leur jeu en assassinant leur propre peuple, en violant ses femmes et en pillant ses richesses, au nom de la ghanima.
La souffrance indicible que nos bourreaux communs ont fait endurer à Ali Benhadj n’a pas entamé sa détermination et le courage vrai qui le distingue. Il aurait pu mettre à profit cette vaste fumisterie qu’est la réconciliation nationale pour obtenir tout ce qu’il désire, pour lui et sa famille. Il lui aurait suffi de hocher la tête pour devenir très riche. Mais il est resté fidèle à ses engagements. Un homme debout, au milieu de l’adversité. Il continue de souffrir de l’ostracisme et de la persécution incessante du régime et de ses relais sans rien négocier de ses convictions. Je ne crois pas, comme tentent de nous le faire accroire tous ces relais du système, qu’il représente un péril mortel pour l’avenir de la nation, parce que rien n’est pire que la situation actuelle. Le régime le sait bien, qui ne veut pas lui permettre d’avoir une activité politique. Parce que dans une situation de compétition réellement démocratique, ceuw qui font et défont les rois visibles de la république, je pèse mes mots, savent que cet homme s’imposerait comme un danger redoutable pour leur main mise sur le pays et même pour leur propre survie. Oui, ce leader est incontestablement un danger mortel pour ce régime mortifère et haïssable. Parce que dans leur immense majorité, nos compatriotes qui sont séduits par son discours, sont convaincus qu’il est incorruptible et qu’il est l’un des rares à pouvoir éradiquer ce régime. A nous qui croyons à une autre voie et à un autre projet de société de leur prouver le contraire. En toute démocratie. Il ne faut pas se tromper d’ennemi. Car l’ennemi mortel des Algériens, c’est le régime des généraux et leurs alliés. Aujourd’hui, ils sont bien plus puissants qu’ils n’étaient en 1992. Parce qu’en plus de leur main mise sur le pouvoir, ils sont devenus immensément riches. Leurs clientèles et leurs parentèles ont profité de la décennie rouge pour faire main basse sur de larges pans de notre économie et ils ne sont pas prêts de s’arrêter en si bon chemin. Il ne faut plus se laisser convaincre par cette thèse, accréditée par le régime lui même, qu’il vaut mieux s’accommoder du choléra plutôt que risquer d’attraper le choléra. D.Benchenouf