Les cas d’agression contre les journalistes se multiplient
Ministre et parlementaires les prennent pour cible
Les cas d’agression contre les journalistes se multiplient
El Watan, 25 juin 2013
Les journalistes deviennent-ils la cible privilégiée des responsables des différentes institutions et corps constitués ? Décidément, ces derniers ne supportent plus la présence des professionnels des médias sur leur champ d’action.
Profitant d’une absence quasi totale de solidarité entre journalistes, ces responsables n’éprouvent aucune gêne à les maltraiter, voire à les tabasser. Le dernier cas d’agression d’un journaliste a été enregistré, avant-hier, à Ksar El Boukhari, dans la wilaya de Médéa. Notre confrère du quotidien El Maqaam, Mohamed Hamiane, chargé de couvrir un rassemblement des travailleurs d’une laiterie fermée, a été sévèrement matraqué par un gendarme. Ce dernier, visiblement irrité par la présence d’un témoin gênant, n’a pas hésité à sortir sa matraque pour l’agresser. «J’étais en train de prendre des photos des travailleurs qui se sont rassemblés devant la laiterie. J’étais même loin des manifestants, quand un des gendarmes s’est approché de moi. Je savais qu’il n’hésiterait pas à me frapper et j’ai sorti mon ordre de mission pour lui signifier que je suis journaliste», raconte Mohamed Hamiane, contacté hier. Mais, ajoute-t-il, le gendarme en question n’a rien voulu savoir.
«Il m’a dit : ‘‘Depuis tout à l’heure tu prends des photos !’’, avant de m’assener un coup à la tête. Le sang giclait et il a quand même continué à me rouer de coups», ajoute-t-il. Notre confrère, gravement blessé, compte porter plainte contre l’auteur de cette violence. Réagissant à cette nouvelle agression contre un membre de la corporation, le Syndicat national des journalistes (SNJ) condamne cet acte et demande des sanctions à l’encontre de l’agresseur. «Le SNJ tient à exprimer son indignation et condamne avec la plus ferme des énergies cet acte d’autant plus intolérable qu’il émane d’éléments appartenant à un corps de sécurité censé veiller à la quiétude publique et à l’intégrité physique des personnes. Le syndicat interpelle les responsables de la Gendarmerie nationale ainsi que les plus hautes autorités du pays pour infliger des sanctions exemplaires aux agresseurs et pour que ce genre de dérapages ne se reproduisent plus jamais», affirme le syndicat dans un communiqué rendu public dimanche dernier. Le SNJ réaffirme, dans la foulée, sa détermination à suivre l’évolution de cette affaire, pour ce qu’elle représente comme gravissime atteinte à la liberté de la presse en Algérie et une injure à l’égard de toute la corporation.
«Khalida Toumi et les pugilistes de l’APN»
Il y a quelques jours, une journaliste de l’ENTV, Affaf Fennouh, a eu une mésaventure avec la ministre de la Culture, Khalida Toumi. Cette dernière, selon le témoignage de la victime, aurait rabroué la journaliste de l’ENTV qui a voulu avoir une déclaration. L’affaire a suscité une véritable polémique. A l’APN, certains députés se transforment en pugilistes pour s’en prendre aux journalistes et photographes de presse. A l’occasion de la visite en Algérie du Premier ministre turc, le 4 juin dernier, le reporter-photographe de l’AFP, Farouk Batiche, a été également pris à partie, au sein même de l’hémicycle, par un député. Dérangé, semble-t-il, par la présence de la presse, cet «élu du peuple» a proféré des obscénités et autres mots vulgaires indignes d’un député à l’adresse du photographe. «Il m’a insulté de manière très vulgaire, je ne pourrais pas vous répéter ces injures. Apparemment, il ne supportait pas que la presse soit là. Je lui ai pourtant expliqué que je faisais simplement mon travail, mais il m’a traité de tous les noms. L’Assemblée était choquée. D’ailleurs, des députés sont intervenus», avait raconté Farouk Batiche. Le député en question aurait voulu rééditer «l’exploit» de sa collègue du FLN qui, quelques jours auparavant, avait étalé ses connaissances en arts martiaux pour malmener une journaliste du quotidien arabophone Ennahar. Mais le président de l’APN et son bureau n’ont pas réagi pour rappeler à l’ordre leurs membres.
Madjid Makedhi