Les Américains imposent leur loi FATCA à l’Algérie
Les Américains imposent leur loi FATCA à l’Algérie
Conformité fiscale des comptes gérés à l’étranger
Le Soir d’Algérie, 23 janvier 2017
Paru au Journal officiel n° 74 du 18 décembre 2016 : l’Algérie vient de ratifier une convention intergouvernementale signée en octobre 2015 avec les Etats-Unis en vertu de laquelle elle échangera avec ce pays des informations fiscales et financières sur les ressortissants américains
Cette convention, dont la ratification a fait l’objet d’un décret présidentiel publié au Journal officiel, porte sur la mise en œuvre de la loi américaine Fatca (Foreign Account Tax Compliance Act) relative au «respect des obligations fiscales concernant les comptes étrangers». Fatca qu’il est possible aussi de traduire par «loi sur la conformité fiscale des comptes étrangers».
Le Congrès américain a ainsi voté cette loi dès 2010 pour une mise en application au 1er juillet 2014. Le but de cette nouvelle loi est d’obliger tous les établissements bancaires et financiers étrangers à déclarer aux autorités fiscales américaines l’ensemble des flux financiers relatifs à un compte bancaire détenu par un citoyen américain.
Peu importe si celui-ci n’est pas né aux USA ou même s’il travaille depuis de longues années à l’étranger. A partir du moment où le compte bancaire affiche un actif dépassant les 50 000 dollars, la banque de ce dernier se devra d’éditer un rapport détaillé des entrées et des sorties d’argent.
En vertu de cette convention, l’Algérie transmettra annuellement aux Etats-Unis et de manière «automatique» les renseignements sur tous les comptes américains déclarables aux institutions financières algériennes.
Promulguée aux Etats-Unis en 2010 et entrée en vigueur le 1er juillet 2014, la loi Fatca vise la lutte contre l’évasion fiscale en dehors du territoire américain, et ce, par l’obtention d’informations sur les comptes détenus par des contribuables américains vivant à l’étranger. Cette loi, devenue une norme mondiale dans la lutte contre l’évasion fiscale, exige ainsi des institutions financières étrangères de fournir à l’Autorité fiscale américaine (IRS) en passant par les gouvernements des pays concernés des renseignements sur les revenus de tous les ressortissants américains établis à l’étranger.
Pour rappel, la mise en œuvre de cet accord en Algérie est prévue par l’article 79 de la loi de finances de 2015 qui met à la charge de certains organismes et institutions financières la communication des informations concernant les contribuables des Etats ayant conclu avec l’Algérie un accord d’échange de renseignements à des fins fiscales. Une source proche du dossier a indiqué que cette convention avec les Etats-Unis serait suivie par la conclusion prochaine d’une convention fiscale de non double imposition entre l’Algérie et les USA.
La ratification de la convention Fatca, même si elle ne profite pas directement à l’Algérie du fait que le principe de réciprocité n’est pas évoqué, poursuit-elle, est tout de même «bénéfique pour le pays car elle l’inscrit dans la liste des pays qui collaborent dans l’effort mondial de lutte contre l’évasion fiscale et le blanchiment d’argent, ce qui influe positivement sur la confiance des investisseurs étrangers».
Lutter contre la fraude et l’évasion fiscales
Qu’est-ce-que la législation Fatca ? A l’origine, il s’agit d’un dispositif légal américain adopté en mars 2010 à portée extra-territoriale. Il a pour objet le contrôle de cohérence entre la déclaration de revenus de contribuables US et la déclaration de revenus et avoirs à l’étranger de contribuables US. Il a pour but de lutter contre la fraude et l’évasion fiscales.
Le contexte règlementaire : la législation s’applique aux institutions financières étrangères qualifiées de FFI («Foreign Financial Institution») et impose des obligations déclaratives sur les revenus versés aux contribuables américains. L’application de la loi Fatca s’inscrit dans le cadre d’accords intergouvernementaux (IGA).
IGA : deux modèles d’IGA sont prévus Modèle 1: Les banques traitent avec les autorités fiscales de leur État, qui traitera quant à lui avec l’IRS (Echange bilatéral d’informations fiscales).
Modèle 2 : Les banques traitent directement avec l’IRS (Echange unilatéral d’informations vers l’IRS). Qui est concerné par Fatca ? Les personnes physiques et morales considérées comme «US persons» selon les standards de l’administration fiscale américaine.
Loi très critiquée aux Etats-Unis
La disposition principale, très controversée, de cette loi dispose que les établissements financiers étrangers (EFE) auront une obligation d’information sur leurs clients imposables aux Etats-Unis sous peine d’un prélèvement obligatoire de 30% à la source sur leurs revenus américains. Aux Etats-Unis, les contribuables sont légalement tenus de déclarer au fisc (IRS) la totalité de leurs revenus mondiaux. Pour les citoyens américains, cette exigence s’applique aussi s’ils résident à l’étranger.
La Fatca imposera aux EFE de transmettre à l’IRS des informations sur les comptes détenus par des contribuables américains, citoyens des Etats-Unis ou non : nom et adresse du titulaire, balance du compte, montant des retraits et des versements bruts…
Cette obligation se heurte néanmoins à un obstacle de taille puisque, en se soumettant à cette obligation, nombre d’EFE risquent d’enfreindre du même coup leurs lois nationales sur la protection des données. Aussi les Etats-Unis cherchent-ils à négocier avec le plus grand nombre de pays possible des accords permettant de lever cette difficulté. Les négociations portent sur un cadre en vertu duquel les pays partenaires des Etats-Unis obligeraient les EFE sous leur juridiction à transmettre à leurs autorités nationales les informations demandées par les Américains.
Ces informations seraient transmises à Washington de façon «automatique» en échange de quoi les EFE de ces pays seraient dispensés d’informer directement l’IRS.
La Fatca est aussi très critiquée aux Etats-Unis, où certains craignent qu’elle n’entraîne une fuite des capitaux hors du pays en ne laissant aux investisseurs étrangers d’autre choix que de coopérer avec l’IRS à un coût financier insupportable, ou de quitter les Etats-Unis.
Djilali Hadjadj
Glossaire pour mieux comprendre la convention
FFI – «Foreign Financial Institutions». Etablissement financier étranger (non américain) qui est autorisé, notamment, à : accepter des dépôts, détenir des avoirs financiers pour le compte de tiers, avoir pour activité principale l’investissement ou le trading, être une compagnie d’assurance qui émet des paiements ou a l’obligation de verser des paiements en lien avec un compte financier.
«Financial account». Comptes financiers considérés au regard de Fatca :
Comptes de dépôt ou de conservation, actions et emprunts obligataires, contrats d’assurance à valeur de rachat et contrats de rente.
«FORM W-9». Formulaire qui a pour but de demander le numéro TIN du contribuable américain. Ce formulaire doit être rempli par les «US persons».
«FORM 1042 et 1042-S». Formulaires qui ont pour but de déclarer à l’IRS les revenus de clients non américains détenant des titres américains.
«IGA» (Inter-gouvernmental agreement). Acte entre les États-Unis et un autre pays précisant les modalités de mise en œuvre de Fatca dans ce pays en tenant compte des lois locales.
«IRS»: Agence fiscale dépendant du «Département américain du Trésor».
«NFFE» (Non-Financial Foreign Entity). Toute entité non US qui ne rentre pas dans la définition de FFI. Pour échapper à la retenue à la source de 30%, l’entité a l’obligation d’attester ne pas tenir de comptes de citoyens américains ou, dans le cas contraire, communiquer nom, adresse et numéro d’identification fiscale.
«Recalcitrant Account Holder». Entité ou personne refusant de fournir les informations exigées pour identification de son compte. Pour être plus précis, il s’agit de clients susceptibles d’être des «US persons» et n’ayant pas apporté la justification du contraire, soit ayant reconnu le statut de «US persons», mais ayant refusé la levée du secret bancaire.
«US person». Personne physique ou entité répondant aux critères d’identification définis par l’administration fiscale américaine (IRS). Le terme «personne américaine» désigne : un citoyen ou résident des États-Unis ; un titulaire de la carte verte (green card) ; un partnership américain ; une société américaine ; certaines personnes qui passent un nombre important de jours aux États-Unis chaque année (ie plus de 183 jours sous réserve du respect de certaines conditions) ; un citoyen des États-Unis, y compris une personne née aux États-Unis, mais résident dans un autre pays (qui n’a pas renoncé à sa citoyenneté américaine).