Affaire Matoub: trois ans de prison pour Cherbi Hamid

Les prévenus ont été jugés hier

Affaire Matoub : trois ans de prison pour Cherbi Hamid

Par Lakhdar Siad, La Tribune, 22 mars 2004

 

Poursuivis pour appartenance à groupe terroriste, non dénonciation de crime et vol dans l’affaire de l’assassinat de Matoub Lounes, le 25 juin 1998, Cherbi Hamid, 48 ans, et son fil Ahmed, 23 ans, ont été jugés hier par le tribunal criminel près la cour de Tizi Ouzou en présence de la mère du défunt, de responsables de la Fondation Matoub Lounes et de délégués du mouvement populaire. A l’issue du procès qui a duré plusieurs heures, Cherbi Hamid, en détention préventive depuis le 6 avril 2002, a été condamné à trois ans de prison ferme pour approvisionnement d’un groupe terroriste alors que son fils Ahmed, «kidnappé» le 27 février 2002 avant d’être remis en liberté provisoire le 2 mars 2003, a été acquitté par les juges. Les deux prévenus ont nié tout contact avec les terroristes et rejeté catégoriquement leur implication dans l’assassinat de Matoub. Ils ont fait part au tribunal des «déclarations et propos tenus sous l’effet du sérum et de menaces de mort, et d’aveux arrachés par la torture» dans les secteurs militaires de Tizi Ouzou et Blida. Dans la Tribune du 10 novembre 2003, Ahmed Cherbi avait témoigné de la torture et des sévices corporels endurés par lui et son père, tous les deux enlevés au chef-lieu de wilaya de Tizi Ouzou par des personnes qui les ont conduits au secteur militaire de Tizi Ouzou avant leur transfert à Blida. Leurs tortionnaires voulaient leur faire déclarer qu’ils étaient impliqués dans l’assassinat de Matoub, ou du moins, pouvaient reconnaître les assassins. Pour rappel, la parcelle de terre où a été «liquidé» Matoub appartenait à la famille Cherbi qui en a fait don à la Fondation portant le nom du Rebelle. Le procureur a requis 20 ans de prison contre Cherbi Hamid et trois ans pour Ahmed. Dans cette affaire, la Fondation Matoub parle «de nouveaux candidats à l’inculpation» et «refuse de cautionner les pyromanes de la Kabylie qui tiennent en otage une région si chère à Lounes». Malika Matoub, lors d’émissions radio et conférences publiques, avait accusé le président du RCD Saïd Sadi et Nordine Aït Hamouda d’être derrière l’assassinat de son frère. L’audience d’hier a été marquée par la plaidoirie de Me Chellat, bâtonnier de la cour de Tizi Ouzou, qui a qualifié le procès de «mise en scène parce qu’il fallait à tout prix accréditer la thèse que ce sont les terroristes qui l’ont assassiné [Matoub Lounes, NDLR]. Vous avez devant vous les boucs émissaires de l’assassinat de Lounes», déclarera sans nuance Me Chellat qui a ajouté que «les cerveaux de la sécurité militaire se sont penchés sur la question de l’assassinat de Matoub des mois et des mois pour jeter en pâture Cherbi Hamid et son fil». Pour le bâtonnier, «c’est l’affaire Matoub qui est visée par le procès d’aujourd’hui. C’est une annexe très importante de son assassinat». De plus, «il y a piétinement du respect même de la vie humaine. A-t-on besoin d’un gosse comme Ahmed pour savoir les déplacements et mouvements de Matoub Lounes. Ceux qui ont décidé de le liquider ne savaient-ils pas l’itinéraire de Lounes ?» s’est interrogé Me Chellat pour qui «les assassins de Lounes ont besoin d’enrober son forfait à travers, par exemple, les Cherbi».En conclusion, il dira : «J’ai honte quand j’entends parler de l’Etat de droit.» Le procès Cherbi devait se dérouler le 10 novembre 2003 mais il a été reporté à hier pour non présentation des prévenus.

L. S.