Le retour du MDS au «soutien critique»

Le parti a réuni son conseil national

Le retour du MDS au «soutien critique»

Le  Quotidien d’Oran,  25 décembre 2004

Un recentrage ! Voilà l’objectif derrière lequel le MDS court aujourd’hui ! Dans quelle direction ? Son hostilité à l’égard du pouvoir n’étant plus ce qu’elle était, il semble bien que le parti cherche à se rapprocher du président de la République.

Il y a quelques semaines, le numéro 1 par intérim, Ali Hocine, a laissé entendre que sa formation n’aurait pas de complexe ni de préjugé négatif vis-à-vis du projet annoncé par Bouteflika d’appeler à une amnistie générale pour solder le dossier de la «sale guerre». Hier vendredi, le même Ali Hocine a presque confirmé cette attitude en annonçant que sa formation allait revoir sa position à l’égard des futures échéances électorales.

Dans une déclaration à l’APS, qui l’interrogeait à l’occasion du conseil national du parti qui s’est tenu ce week-end, le secrétaire général par intérim a soutenu que la nouvelle attitude du MDS est dictée par les «changements sociopolitiques» induits par les «présidentielles d’avril dernier» et par «l’évolution du discours officiel» sur le statut de la femme dans la société, la question de la «légitimité historique», ainsi que sur «la position de l’Algérie sur les questions régionales et internationales».

Autrement dit, il s’agit d’une option politique mûrement réfléchie, qui a fait débat dans les instances du MDS, et qui est maintenant défendue en perspective d’une rupture avec une ligne politique vieille de plus de dix ans. Depuis 1991, en effet, le «Mouvement» n’a jamais participé à aucun rendez-vous électoral. Son refus, expliquait souvent son leader Hachemi Cherif, était motivé par l’argument que le mal de l’Algérie a sa source dans la nature du régime rétif à tout changement démocratique véritable; et que toute élection dans ce contexte ne peut conduire qu’à faire le jeu de l’islamisme et perpétuer la catastrophe que le pays a connue à l’époque du FIS.

Toute la démarche du MDS tenait en cette rhétorique et tous ses grands textes – y compris ceux publiés immédiatement après les présidentielles d’avril 2004 – aboutissent à la conclusion que l’Algérie est dans une impasse historique et qu’il n’y a aucune offre politique possible sauf celle de renforcer le pouvoir dominant et ses différents clients. Qu’est-ce qui a pu alors changer ? Une praxis réformiste que M. Ali Hocine semble prudemment mais réellement voir dans l’action politique de M. Bouteflika. Mais son discours plaide davantage pour un changement au sein même du parti qu’ailleurs. Fait significatif, il se produit alors que son leader Hachemi Cherif poursuit une longue convalescence qui s’est traduite par une éclipse de la scène politique.

Cette absence momentanée est-elle pour quelque chose ? La question vaut la peine d’être posée même si des observateurs proches du parti préfèrent d’autres arguments. Parmi ces derniers, la nécessité au MDS, disent-ils, de «renouer avec les luttes démocratiques par les élections» pour éviter que l’atrophie qu’il a connue durant une décennie d’opposition radicale ne le fasse disparaître totalement. Une profession de foi qui laisse supposer que le MDS a totalement exorcisé le traumatisme du suffrage réalisé en 1991 lorsque le FIS dominait le champ politique. Et qu’il est prêt à se mesurer à l’épreuve des urnes. Un défi bien problématique aussi, car personne ne peut raisonnablement parier sur la gauche algérienne aujourd’hui, encore moins sur sa frange qui s’inspire du communisme. Le «Mouvement» va devoir compter sur des militants nombreux et mobilisés pour affronter une telle perspective, or il n’est pas sûr qu’il dispose de telles ressources hormis les oasis traditionnelles qu’on connaît et qui ne débordent pas de l’horizon encore étroit des démocrates et des républicains. A moins que le MDS n’ait l’assurance qu’on lui réservera dans les gestions électorales prochaines une place pour assumer ce rôle dans lequel il a toujours excellé: le soutien critique. Dans ce cas, le retour aux urnes ne sera pas une épreuve mais un simple jeu d’intégration dont la nature et l’importance seront décidées par le pouvoir et lui seul.

Noureddine Azzouz