La Cour de sûreté de l’Etat supprimée

Du nouveau dans le code de justice militaire

La Cour de sûreté de l’Etat supprimée

El Watan, 3 janvier 2017

Un avant-projet de loi portant amendement du code de justice militaire a été approuvé, mercredi 28 décembre, par le Conseil des ministres. Le texte propose deux importants amendements.

Premièrement, les infractions à la sûreté de l’Etat commises par des civils sont dorénavant jugées par des juridictions civiles de droit commun. En clair, il ne revient plus à la justice militaire de juger des infractions à la sûreté de l’Etat commises par des civils. Cette tâche est dévolue aux juridictions civiles de droit commun.

Pour Noureddine Benissad, avocat et président de la Ligue algérienne pour la défense des droits de l’homme (LADDH), si cette décision représente un premier pas dans «le sens de la mise en conformité du pays avec sa Constitution, la défense des droits de l’homme et celle de la présomption d’innocence», elle ne règle pas le problème. Pour le président de la LADDH, la justice militaire est une juridiction d’exception et ne doit, par conséquent, pas exister. «En 1989, l’Algérie avait décidé de supprimer la cour de sûreté de l’Etat.

A partir de là, je considère que les tribunaux militaires sont des juridictions d’exception qui n’ont pas lieu d’être», explique-t-il. Reste à se demander ce qui a poussé l’Etat algérien à prendre une telle décision. Maître Benissad a sa petite idée sur la question. S’il estime que les pressions exercées par les organisations nationales de défense des droits de l’homme ont joué un rôle certain, il évoque également celles du Conseil des droits de l’homme de l’ONU.

«Tous les quatre ans, le Conseil des droits de l’homme se penche sur la situation des droits de l’homme dans chaque pays et les passe aux cribles. L’Algérie a dû recevoir des recommandations pour se mettre en conformité», affirme-t-il. L’autre amendement concerne la mise en place d’une cour militaire d’appel. Cette disposition doit permettre à un condamné par le tribunal militaire de faire appel de la décision, alors que jusqu’à maintenant, il n’avait que la Cour suprême, la plus haute juridiction du pays, comme ultime recours.

Comme l’explique Me Farouk Ksentini, «on a mis en place un deuxième degré de juridiction», mais pour le président de la Commission consultative de protection et promotion des droits de l’homme, cette décision est insuffisante. Pour lui, il est primordial de mettre en place une cour suprême militaire, qui prendrait en charge les affaires militaires.

«La juridiction militaire est une juridiction d’exception par conséquent il lui faut une cour suprême propre à l’institution spécialisée dans le traitement des affaires militaires», juge-t-il. En outre, dans l’avant-projet de loi portant amendement du code de justice militaire, il a été décidé de l’octroi de la qualité d’officiers de police judiciaire militaire aux «officiers de la sécurité de l’armée». Pour le président de la République, ces dispositions sont de «nouvelles avancées» dans la réforme de la justice et dans la garantie des droits des justiciables.

Mesbah Salim