L’Algérie propose une stratégie commune pour contrecarrer l’immigration clandestine

Alors que la présidence de l’UA continue à éclipser
les autres questions

L’Algérie propose une stratégie commune pour contrecarrer l’immigration clandestine

Par Ghada Hamrouche, La Tribune, 23 janvier 2006

«L’Afrique vit une véritable hémorragie dans le domaine de la migration des compétences», a affirmé hier M. Abdelkader Messahel, ministre délégué chargé des Affaires maghrébines et africaines, durant les travaux de la 8ème session ordinaire du conseil exécutif de l’UA. Plaidant pour une politique africaine commune pour stopper le phénomène de l’émigration clandestine, le ministre a fait remarquer que les migrants représentent, actuellement, une personne sur 35 dans le monde, mettant l’accent sur le phénomène de la migration des compétences dont souffre le continent africain. M. Messahel a indiqué, à ce titre, que «20 000 cadres africains s’expatrient chaque année» et «plus de 4 millions d’experts africains sont établis en Europe».
L’intervention persuasive de M. Messahel sur la question des migrations et développement, a souligné l’urgence d’engager «un dialogue politique global et inclusif» autour des questions de migrations et de ses profondes implications pour l’ensemble des pays africains. Dans ce contexte, M. Messahel a appelé la commission de l’UA à entreprendre les démarches nécessaires pour «la convocation à un niveau significatif, en 2006 à Addis-Abeba ou dans une toute autre capitale de l’UA», d’une conférence afro-européenne sur la question de la migration. Une conférence que l’Algérie veut être de «haut niveau, associant toutes les institutions nationales et régionales intervenant dans la question de la migration» en vue d’«ouvrir un dialogue afro-européen sur la migration dans sa globalité».
Le ministre a souligné, également, l’urgence pour les pays africains de «travailler ensemble» entre Africains et avec les Européens pour rechercher les solutions qui «prennent en charge les intérêts [à] de tous».
Ces solutions résident, a encore affirmé le ministre, dans «le développement», notamment, celui des régions à fort potentiel d’émigration, rejetant ainsi «les politiques unilatérales» fondées sur la fermeture des frontières des pays développés, par le resserrement des conditions d’octroi de visas, les refoulements et les expulsions. Pour M. Messahel, le durcissement des politiques de contrôle et d’octroi de visas «favorise le développement des flux de migrations clandestins». Il a, en outre, insisté sur les raisons de prendre en charge, rapidement, le problème de la migration, expliquant que l’évolution importante du mouvement migratoire en Afrique impose, aujourd’hui, de suivre une politique commune pour régler ce problème.
Pour stopper la migration des jeunes africains, le ministre a précisé que l’Afrique a choisi la voie de la promotion du développement, affirmant que dans le cadre du NEPAD, sur le plan national et au niveau régional, «une forte dynamique de relance du développement socio-économique a été lancée». La proposition de M. Messahel a été entérinée derechef par les réunis qui l’ont qualifiée d’«excellente initiative» à soutenir pour faire entendre la voix de l’Afrique sur la question de la migration.
La proposition algérienne intervient la veille du sommet bisannuel de près de 30 chefs d’Etats et de gouvernements africains qui se tiendra aujourd’hui et demain, soit les 23 et 24 janvier à Khartoum. Ces deniers discuteront essentiellement des questions touchant à la paix et au développement dans le continent. Un programme qui s’annonce comme une incongruité diplomatique, selon de nombreux observateurs dans la mesure où le pays hôte de cette réunion, soit le Soudan, doit selon la tradition de l’UA, hériter automatiquement de la présidence de l’organisation pour les douze mois à venir. Une tradition non respectée lors du dernier sommet à Tripoli où le dirigeant libyen n’a pas réussi à arracher la confiance des dirigeants africains qui ont reconduit le Nigérian Oluesgun Obasonjo pour six nouveaux mois. En sera-t-il de même à Khartoum ? La présidence soudanaise de l’organisation africaine est d’ores et déjà contestée par le Tchad voisin et de nombreuses Organisations non gouvernementales, qui considèrent le Soudan comme trop «agressif» pour se voir accorder une telle fonction diplomatique. Il se retrouvera, de ce fait, dans la situation intenable de juge et partie notamment, dans la région du Darfour.

G. H.