M. Abderrahmane Mehalli, victime de tortures

Cas DZA 240107.2

Suivi du cas DZA 240107 et DZA 240107.1

Conditions de détention dégradantes/ Crainte pour l’intégrité physique et psychologique/ Absence d’enquête sur la base des allégations de torture et de mauvais traitements

Le Secrétariat international de l’Organisation mondiale contre la torture (OMCT) a reçu de nouvelles informations concernant la situation suivante et sollicite votre intervention urgente en Algérie.

Nouvelles informations

Le Secrétariat international de l’OMCT a été informé par une source fiable et par Antenna International, une organisation membre du réseau SOS-Torture de l’OMCT, que M. Abderrahmane Mehalli, qui avait été torturé par des agents du Département pour la sécurité et le renseignement (DRS) à la suite de son arrestation, le 26 décembre 2006, est actuellement détenu à la prison de Chlef (à environ 200km d’Alger) dans des conditions dégradantes. Par ailleurs, il souffrirait d’une hernie discale nécessitant une opération chirurgicale.

Selon les informations reçues, M. Abderrahmane Mehalli a été transféré d’Alger à la prison de Chlef peu après avoir été condamné en décembre 2009 à quatre ans de prison pour « appartenance à un groupe armé terroriste». La date de son procès en appel n’a pas encore été fixée.

Depuis son arrestation, M. Abderrahmane Mehalli a été transféré dans plusieurs prisons[1] dont celle de Chlef qui est la plus éloignée de sa famille et dont les conditions de détention seraient mauvaises (notamment malnutrition). Le médecin de la prison aurait diagnostiqué une hernie discale chez M. Abderrahmane Mehalli et lui aurait recommandé une opération. Toutefois, à ce jour, aucune mesure n’a été prise dans ce sens. Par ailleurs, M. Abderrahmane Mehalli et sa famille ont demandé à la direction de la prison de Chlef et à la Direction des Prisons à Alger son transfert vers une prison près d’Alger mais aucune suite n’aurait été donnée à leurs démarches.

Enfin, selon les mêmes informations reçues, aucune enquête n’a été diligentée sur la base des allégations de torture et de mauvais traitements dont M. Abderrahmane Mehalli a été victime lors de son arrestation et sa détention (voir Rappel des faits).

L’OMCT prie les autorités algériennes de garantir, en toutes circonstances, l’intégrité physique et psychologique de M. Abderrahmane Mehalli, conformément au droit régional et international pertinent, et notamment aux dispositions de la Charte africaine des droits de l’homme et des peuples, de la Convention des Nations Unies contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants et du Pacte international relatif aux droits civils et politiques qui prohibent la torture et les mauvais traitements.

L’OMCT est particulièrement préoccupée quant à l’état de santé de M. Abderrahmane Mehalli et demande aux autorités algériennes compétentes de lui garantir immédiatement un traitement médical adéquat conformément entre autres, à l’Ensemble de règles minima pour le traitement des détenus des Nations Unies.

L’OMCT demande également aux autorités algériennes de garantir une enquête immédiate, efficace, exhaustive, indépendante et impartiale sur les allégations de torture et autres mauvais traitements subis par M. Abderrahmane Mehalli durant sa détention, dont les conclusions seront rendues publiques, et ce afin d’identifier les responsables, de les traduire devant un tribunal civil indépendant, compétent et impartial et d’appliquer les sanctions pénales, civiles et/ou administratives prévues par la loi.

L’OMCT rappelle enfin que, selon l’article 15 de la Convention contre la torture et autres peines ou traitements cruels, inhumains ou dégradants, « toute déclaration dont il est établi qu’elle a été obtenue par la torture ne (peut) être invoquée comme un élément de preuve dans une procédure.»

Rappel des faits

L’OMCT avait été informée des actes de torture et de mauvais traitements dont M. Abderrahmane Mehalli a été victime durant sa détention au secret et lors de sa détention à la prison d’El Harrach, à Alger.

Selon les informations reçues, M. Abderrahmane Mehalli a été arrêté le 26 décembre 2006 à 19h30 à son domicile de Bachdjerah par les services de la brigade mobile de la police judiciaire (BMPJ) de Oued Ouchayah, accompagné de membres des services du DRS sans motif apparent.

Durant 12 jours, le lieu et les conditions de détention de M. Mehalli étaient inconnus. Le 6 janvier 2007, M. Mehalli a été présenté devant le juge d’instruction de la 2ème chambre du Tribunal d’Alger. Il a été placé sous mandat de dépôt et transféré à la prison de Serkadji où il se trouvait détenu en cellule d’isolement avec cinq autres détenus.

Selon les mêmes informations, M. Mehalli a été torturé par les agents de la DRS. Il a été roué de coups de poings et de pied et a notamment subi l’épreuve du chiffon qui consiste à boucher le nez tout en mettant un chiffon dans la bouche, du liquide étant par la suite versé sur la tête. Il aurait également été menacé par les agents de la DRS sous les yeux de son avocat au moment où il devait être entendu par le juge d’instruction.

M. Mehalli était accusé « d’appartenance à un groupe terroriste armé et non-dénonciation d’assassin ». Il aurait reconnu les faits qui lui étaient reprochés sous le coup de la menace et aurait été contraint de signer un procès verbal sans pouvoir le lire auparavant. Par ailleurs, M. Mehalli n’a pas reçu de soins médicaux suite aux actes subis mais il aurait été obligé de signer un document attestant du fait qu’il a été bien traité.

Selon les mêmes informations reçues, le 14 juin 2008, lors d’une visite régulière à la prison d’El Harrach, dans laquelle M. Abderrahmane Mehalli avait été transféré en mai 2008, dans l’attente de la programmation de son procès, sa famille l’aurait trouvé dans un très mauvais état de santé. Il avait notamment une plaie à la tête et était totalement amorphe.

M. Abderrahmane Mehalli aurait alors confié à sa sœur que des agents du DRS étaient venus à plusieurs reprises à la prison où ils auraient torturé un groupe de prisonniers dont M. Abderrahmane Mehalli faisait partie. Ils auraient d’abord été entièrement déshabillés avant d’être torturés, y compris abusés sexuellement.

Selon les mêmes informations, M. Abderrahmane Mehalli a déjà été arrêté à plusieurs reprises depuis 1993 et a été victime de mauvais traitements par le passé.


Actions requises

Merci d’écrire aux autorités de l’Algérie, afin de leur demander de:

1. Prendre toutes les mesures nécessaires afin de garantir la sécurité et l’intégrité physique et psychologique de M. Abderrahmane Mehalli, notamment en mettant à sa disposition des soins médicaux appropriés;

2. Garantir à M. Mehalli l’accès immédiat et inconditionnel à sa famille et à un avocat de son choix; notamment en permettant son transfert vers une prison d’Alger ;

3. Garantir une enquête immédiate, efficace, exhaustive, indépendante et impartiale sur les allégations de torture et autres mauvais traitements, dont les conclusions seront rendues publiques, et ce afin d’identifier les responsables, de les traduire devant un tribunal civil indépendant, compétent et impartial et d’appliquer les sanctions pénales, civiles et/ou administratives prévues par la loi;

4. Déclarer irrecevables les éléments de preuve ou les déclarations extorqués sous la torture ou les mauvais traitements;

5. Garantir que M. Abderrahmane Mehalli bénéficie d’un procès en appel équitable;

6. Garantir un recours effectif et une réparation adéquate, y compris l’indemnisation et la réhabilitation, à M. Abderrahmane Mehalli;

7. Garantir le respect des droits de l’homme et des libertés fondamentales à travers le pays selon les lois nationales et les instruments internationaux des droits de l’homme.

Adresses

Prière d’écrire aux représentations diplomatiques de l’Algérie dans vos pays respectifs.

Ø M. Abdelaziz Bouteflika, Président de la République algérienne, Présidence, El-Mouradia, Alger, Algérie. Tel : +213 (0)21 69 15 15 – Fax : +213 (0)21 69 15 95 – E-mail : [email protected]

Ø M. Farouk Ksentini, Président de la Commission Nationale Consultative pour la Promotion et la Protection des droits de l’Homme (CNCPPDH), avenue Franklin Roosevelt, Allée du Peuple, 16000 Alger, Algérie. Tel : +213 (0)21 23 03 11 / 23 02 14

Ø M. Abdelaziz Ziari, Président de l’Assemblée Nationale Populaire, 18 boulevard Zirouf Youcef, 16000 Alger, Algérie. Tel : +213 021 73 86 00 / 10

Ø M. Dahou Ould Kablia, Ministre de l’intérieur, Ministère de l’intérieur et des collectivités locales, rue du Docteur Saâdane, Alger, Algérie. Fax : +213 (0)21 92 12 43

Ø M. Tayeb Belaiz, Ministre de la Justice, Ministère de la Justice, 8 Place de Bir-Hakem. El-Biar, Alger, Algérie. Fax : +213 (0)21 74 76 64 / + 213 (0)21 92 17 01 / 29 56

Ø H.E Idriss Jazaïry, Ambassadeur, représentant permanant de l’Algérie auprès de l’ONU à Genève, route de Lausanne 308, CH-1293, Bellevue, Suisse. Fax : +41 (0)22 / 774 30 49 – E-mail : [email protected]

Prière d’écrire également aux représentations diplomatiques de l’Algérie dans vos pays respectifs.

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Genève, le 15 octobre 2010

Veuillez nous informer de toute action entreprise en citant le code de cet appel dans votre réponse.

[1] Les prisons d’El Harrach, de Serkadji, de Berouaghia et de Chlef.