Smail Mira: «Le dossier sera présenté à l’APN»

Nous sommes tous justiciables

Nadia Kerraz, Le Jour d’Algérie, 30 juillet 2007

L’affaire Smaïl Mira qui a défrayé la chronique ces dernières semaines constitue pour le Parlement et ses deux chambres un test particulier qu’il n’aurait certainement pas aimé subir. Et pour cause, cette institution est appelée à trancher sur la demande de levée de l’immunité parlementaire d’un de ses membres, le député Mira en l’occurrence, accusé du meurtre d’un jeune homme dans la région Tazmalt. Le dossier est au niveau de l’Assemblée, a déclaré hier le ministre de la Justice, garde des Sceaux. C’est sans nul doute une manière d’éloigner les feux des projecteurs. En fait, Belaïz, en désignant l’APN, a tout simplement situé les phases que doit suivre l’enquête menée par les services habilités. Mais en agissant de la sorte, il a aussi mis le Parlement devant ses responsabilités. Que va-t-il décider ? En toute logique, l’institution parlementaire ne saurait agir autrement que par la levée de l’immunité parlementaire dont jouit M. Mira aux fins de permettre son audition, voire son inculpation, si les faits reprochés sont confirmés par les enquêteurs en charge de cette affaire d’assassinat. A défaut, et quand bien même il n’est pas certain que la culpabilité du député soit prouvée, le Parlement commettrait une grave erreur. En effet, cela viendrait à dire que les députés censés connaître mieux que quiconque le droit seraient des personnes au-dessus de la loi et qu’ils peuvent agir en toute impunité, sous couvert de l’immunité que leur confère leur siège de député. Un cas de figure qui ne serait pas sans conséquences. Car dans le cas de figure où le Parlement ferait le choix de ne pas lever l’immunité du député Mira, cela signifierait qu’il cautionne tous les abus de ses membres, voire qu’il les encourage à en commettre à l’avenir, vu que quel que soit le délit commis, ils ne courront pas le risque d’être poursuivis par la justice. Mais peut-on vraiment envisager une telle éventualité alors que dans le discours officiel, nos gouvernants ne cessent d’appeler à l’instauration de l’Etat de droit qui mettrait tous les Algériens sur le même pied d’égalité, car étant tous justiciables aux yeux de la loi.

N. K.


Belaïz à propos de l’affaire Smaïl Mira

«Le dossier sera présenté à l’APN»

Le ministre a indiqué que seul le Parlement est en mesure de trancher dans cette affaire.

Le ministre de la justice, garde des Sceaux Tayeb Belaïz a déclaré, hier, en marge de la cérémonie organisée à la prison d’El Harrach que le dossier du député impliqué dans une affaire d’homicide volontaire, en l’occurrence Smaïl Mira, sera étudié au niveau de l’APN.

M. Belaïz a indiqué que seul le parlement est en mesure de trancher dans cette affaire, en retirant ou en gardant l’immunité parlementaire à l’accusé. Il a, également, ajouté que le dossier sera bientôt achevé au niveau du ministère de la justice.

En effet, la constitution de 1996 consacre l’immunité parlementaire pour les membres des deux chambres du parlement – le conseil de la nation et le l’assemblée populaire nationale – durant tout le temps que dure leur mission parlementaire, et cela conformément à l’article 109 de ladite constitution. Il est donc anticonstitutionnel qu’un parlementaire soit arrêté ou poursuivi en justice même pour un délit commis. Ce qui signifie qu’il est impossible d’attaquer un parlementaire en justice quelle que soit la nature de l’affaire dans laquelle il est impliqué – que ce soit pour une simple infraction ou pour un crime. Toutefois, des concessions ont été prévues par le législateur algérien. Il est stipulé dans l’énoncé des deux articles 110 et 111 de ladite constitution que la levée de l’immunité parlementaire est tributaire de la décision de l’APN ou du conseil de la nation. Les tenants et les aboutissants de l’affaire Smaïl Mira, député RPR remontent à une quinzaine de jours. Un jeune homme de 31 ans a été assassiné par ce dernier au niveau de la commune de Ath Mlikech, à Tazmalt. Selon les parents de la victime, le jeune Kamel Saâdi était en train de faire du sport à 300 mètres de chez lui quand il a été interpellé par un groupe de trois individus dont le député et ancien chef du groupe d’autodéfense local (Smaïl Mira). Après une succincte altercation, le mis en cause a tiré sur le jeune homme avec son arme de poing, lui occasionnant de graves lésions. Le blessé a succombé à ses blessures 11 jours plus tard.

Les parents de la victime se sont rendu compte en se rendant au groupement de gendarmerie pour déposer plainte contre l’assassin de leur fils que celui-ci a déjà déposé la sienne. L’accusé a donc plaidé non coupable en invoquant l’alibi de la légitime défense. Il a estimé que son acte est survenu après que la victime ait tenté de le déposséder de son arme.

Il y a lieu de souligner que ce n’est pas la première fois que Smaïl Mira serait impliqué dans une affaire d’homicide involontaire. Il a déjà été accusé d’avoir délibérément assassiné un jeune de la région, en l’occurrence, Hamza Ouali, lors des évènements qui ont ébranlé la région après l’assassinat du chantre Kabyle Lounès Matoub.

Par Salah Harirèche