GI’s à Kaboul: Yes we can!

GI’S À KABOUL : YES WE CAN !

par K. Selim, Le Quotidien d’Oran, 2 décembre 1009

Au fil des jours et à mesure que se rapproche la date butoir que s’est fixée Barack Obama pour annoncer sa décision quant à l’envoi de renforts en Afghanistan, l’incertitude qui prévalait au départ s’est progressivement dissipée.

Le prix Nobel de la paix fera en définitive ce que l’establishment a ordonné: il enverra les soldats demandés par sa hiérarchie militaire. La presse américaine précise que le renfort sera de 35.000 hommes, soit légèrement moins que les 40.000 hommes exigés par le général Stanley Mac Chrystal, le commandant des forces américaines à Kaboul. Le déficit de 5.000 hommes sera comblé par des alliés peu convaincus de l’issue de la guerre, mais soucieux de complaire à la puissance tutélaire.

Car ces soldats n’embarqueront pas vers la victoire, hors de portée d’après tous les experts. Ils ne rejoindront ce malheureux pays que pour stabiliser une situation sans issue. Ils ne livreront aucune bataille, les pertes causées aux talibans le sont essentiellement du fait de drones, des avions sans pilote téléguidés. Le président Obama a dû manger son chapeau et démontrer qu’en dépit de son slogan de campagne, il ne peut pas changer grand-chose.

La supériorité rhétorique et intellectuelle du président sur un establishment néoconservateur ne lui confère aucune prééminence, ni aucune emprise sur les appareils de pouvoir. Pour les électeurs démocrates, la déception est à la hauteur des illusions nourries pendant la campagne des présidentielles. Les espoirs du dépassement de l’ère aberrante de George W. Bush par la magie rédemptrice de l’élection d’un président métis tournent court. De plus en plus d’Américains qui croyaient au changement promis comprennent que le système est verrouillé à double tour et qu’un homme aussi bien intentionné et aussi bien élu que Barack Obama est condamné à se renier sur l’essentiel. La réalité du pouvoir est concentrée par le complexe militaro-industriel, les libertés démocratiques s’arrêtent à ses portes.

Les équilibres de pouvoir étant clairement établis, la question de la viabilité de la stratégie afghane du vrai pouvoir impérial dans son aventure afghane reste posée. Que recherche une armée qui ne peut espérer la victoire et en quoi ces renforts, très insuffisants, de l’aveu même de ceux qui les réclament, peuvent modifier la donne sur le terrain ? Renforcer la présence militaire sur le terrain ne peut que multiplier les cibles potentielles pour une résistance afghane moins religieuse, aux inclinations nationalistes plus marquées et de plus en plus présente sur le terrain.

Espérer que le régime Karzaï se consolide relève plus de l’incantation que de l’hypothèse plausible, tout comme il paraît vain d’attendre que l’armée afghane constitue une force décisive. Il est donc clair que l’option retenue est de s’accrocher, d’élargir la confrontation au Pakistan voisin en tablant sur la lassitude des insurgés et de la population. Les mois qui viennent montreront la validité d’une approche fondée sur des postulats incertains.

En l’endossant, bon gré mal gré, il s’agit désormais de la politique du président Obama. Yes, we can ! Vraiment ?