Le sit-in de l’Intersyndicale empêché

Tenu devant le palais du gouvernement

Le sit-in de l’Intersyndicale empêché

Par :Nabila Afroun, Liberté, 16 avril 2008

Sept enseignants ont été interpellés lors du rassemblement devant le Palais du gouvernement. Les syndicalistes dénoncent ce comportement qualifié d’ “irresponsable”.

Les fonctionnaires qui espéraient, à travers leur action d’hier, que le gouvernement, lâcherait du lest ont vite déchanté. Les contestataires ont subi la foudre des éléments de la Sûreté nationale, lors de leur tentative de sit-in devant le Palais du gouvernement.
Un important dispositif de sécurité, bouclier à la main prêt à intervenir, est placé aux alentours des ruelles menant vers le Palais du gouvernement, à Alger-Centre.
Il est 10h30, une marée humaine dont certains venus d’autres wilayas, dont la majorité représente le secteur de l’éducation nationale, ont tenté de franchir le dispositif sécuritaire pour accéder au lieu du rassemblement afin de convaincre l’Exécutif d’ouvrir le dialogue avec les syndicats autonomes.

Les fonctionnaires ont été bousculés, malmenés puis empêchés d’accéder à la chefferie du gouvernement. Ils ont été bloqués au niveau de la Grande-Poste, où ils ont tenu leur sit-in qui a duré près de 30 minutes avant d’être dispersés par la brigade anti-émeutes. Sept enseignants parmi les grévistes ont été interpellés puis relâchés quelques heures après. “Le gouvernement a utilisé tous les moyens, notamment musclés pour résoudre le problème des fonctionnaires, à l’exception de la négociation qui est pourtant l’unique clé pour le règlement de tous les conflits des travailleurs algériens”, s’indigne Lamdani, responsable de l’information au Conseil national des professeurs de l’enseignement secondaire et technique. Percutant, notre interlocuteur a rappelé que les fonctionnaires ne font pas grève par gaieté de cœur, ni pour l’exhibition, mais plutôt pour faire pression et rendre visible leur mécontentement social. “Nous sommes indignés par le comportement irresponsable du gouvernement qui fait la sourde oreille devant le marasme des travailleurs de la Fonction publique. Négocier avec les syndicats autonomes est le seul moyen d’aller vers une issue de secours avant d’arriver au pire comme cela s’est fait récemment dans certain pays”, déclare un médecin fonctionnaire.

On retrouve ce discours prônant l’ouverture de dialogue avec le gouvernement sur toutes les lèvres des syndicalistes qui ont appelé à la grève. Les professeurs, docents et maître-assistants des sciences médicales, ont décidé eux aussi, lors de leur rassemblement qui s’est tenu hier dans l’enceinte de l’hôpital Mustapha-Pacha, de hausser le ton et d’aller vers un durcissement du mouvement en concertation avec la coordination nationale des syndicats autonomes de la Fonction publique.

À main levée, ils ont voté pour le boycott global des travaux scientifiques et toutes collaborations avec le ministère de la Santé. “Il faut négocier avec les syndicats autonomes et ouvrir le débat sur le point indiciaire. Les fonctionnaires s’apercevront rapidement que leur fiche de paie a été gonflée et ne représente pas les valeurs promises par le gouvernement notamment le diplôme et le nombre d’années d’études”, a souligné M. Djidjik, responsable du syndicat autonome des maîtres- assistants des sciences médicales.

Vers la tenue d’assises des syndicats autonomes
Il est clair que les intimidations n’ont fait qu’attiser le mécontentement de la Coordination nationale des syndicats autonomes de la Fonction publique qui revendique plus que jamais la concrétisation de leurs doléances et dénonce le “mutisme” ainsi que la répression du sit-in devant le Palais du gouvernement. “Le Chef du gouvernement refuse de nous écouter et persiste dans sa politique du niet et de l’indifférence à l’égard des fonctionnaires. Notre mouvement s’inscrit dans la duré et dans la lutte syndicale notamment le droit de protester et de participer au dialogue social”, a déclaré M. Merabet, porte-parole da la Coordination nationale des syndicats autonomes de la Fonction publique. Il a estimé que leur revendication ne se résume pas à l’augmentation de salaire mais également à faire valoriser leur droit syndical qui est protégé par la Constitution.

À cet effet, il a annoncé que les syndicats autonomes envisagent d’aller vers des assises afin de débattre des droits et la possibilité de la création d’un espace syndical en incluant les travailleurs du secteur économique afin de contrer la Centrale syndicale. “Nos revendications ne se résument pas aux problèmes pécuniaires, certe c’est un élément fédérateur mais le plus important est le combat syndical et de s’imposer comme partenaire social”, a-t-il souligné.
Il faut noter qu’une délégation de la coordination s’est déplacée avant- hier au Palais du gouvernement pour demander audience au Chef du gouvernement afin de lui remettre leur plateforme revendicative et lui faire part de leurs problèmes ayant trait à la situation sociale marquée par l’inflation et l’exclusion des syndicats autonomes dans les négociations. Ces derniers se sont vus dans l’obligation de déposer leur missive au niveau du bureau d’ordre, tout en espérant avoir une réponse dans les meilleurs délais.

Nabila Afroun

 


3e jour de la grève de l’intersyndicale

Les délégués syndicaux ont fait le déplacement à Alger

Par :Rédaction de Liberte, 16 avril 2008

“Tous à Alger !” Les représentants des syndicats autonomes de Tizi Ouzou se sont déplacés, hier, en masse à Alger pour rejoindre le rassemblement devant le Palais du gouvernement décidé par l’Intersyndicale autonome de la Fonction publique (IAFP). Si les responsables syndicaux se sont mobilisés pour le sit-in, la grève dans son troisième et dernier jour a été largement suivie, notamment dans le secteur de l’éducation, comme nous l’avons constaté de visu dans certains établissements scolaires. Selon le Cnapest, les enseignants des lycées ont massivement suivi le débrayage, puisqu’on parle d’un taux de suivi dépassant largement les 90%.

Par ailleurs, en Oranie, les staffs locaux étaient pris hier par les préparatifs de leur déplacement à Alger, en nous réaffirmant leur volonté de ne pas en rester là “jusqu’à une révision juste de nos salaires et la reconnaissance que nous sommes des partenaires sociaux au même titre que l’UGTA…” Pour nos interlocuteurs, il est clair malgré tout que ce statut de partenaire social à part entière, ne s’arrachera que par des actions comme celles de ces jours derniers. Dans l’ouest du pays, ce clivage entre les deux structures a été aussi constaté comme nous l’ont rapporté nos correspondants. En effet, le corps des médecins spécialisés à Mascara a limité la grève à deux jours seulement, décidant par là même la reprise du travail sur les instructions de leur syndicat, les enseignants exerçant au niveau des établissements secondaires et techniques maintiennent toujours la pression en prolongeant le mouvement jusqu’au terme de la troisième journée. Ainsi, l’arrêt du travail est observé selon le Cnapest par 75% du corps enseignant puisque, selon nos sources, 24 établissements sur les 32 que compte la wilaya sont touchés par ce débrayage. Mais ces chiffres sont très contestés par les enseignants eux-mêmes qui estiment que le mouvement de grève est très peu suivi pour cette troisième journée puisque la grande majorité a assuré normalement le service.
Néanmoins, dans toute cette “marmelade”, les principales victimes restent les élèves devenus des otages entre les mains de ceux censés leur inculquer le savoir et contribuer à la préparation de leur avenir. De même à Béchar et Saïda, où nos correspondants respectifs ont constaté la reprise du travail par les syndicats autonomes en majorité. Ainsi, à Saïda, la grève s’est clôturée avec un taux de 63% pour les deux jours de grève dans le secteur de l’éducation. Pour les Snpssp et Snapap, ce mouvement a été massivement suivi avec des taux revendiqués entre 72% et 74%.

Bien que le mouvement de protestation soit achevé, les syndicats autonomes déclarent que “les protestations ne cesseront pas avant d’aboutir à la concrétisation des revendications sur le terrain…”, à savoir l’amélioration du cadre de vie des travailleurs, la révision de la grille des salaires et l’amélioration du pouvoir d’achat.
Si à Béchar, la reprise a été constatée après deux jours, les représentants des travailleurs tiennent à préciser que la suspension de la grève n’est pas due à la pression exercée par la tutelle, mais fait suite aux directives du syndicat du secteur de l’éducation, le Snapest. L’ensemble des interlocuteurs souhaitent que le gouvernement ouvre les portes du dialogue à tous les syndicats, nous précise notre correspondant.

À Constantine, hier, seul le Cnapest a prolongé la grève pour une troisième journée. Le reste des syndicats s’est limité à deux journées de protestation. Ainsi, selon le coordinateur de l’Intersyndicale de Constantine, l’adhésion à la grève a été, hier, à hauteur de 65% au niveau des établissements scolaires de la wilaya.
Par ailleurs, le département des sciences politiques de Batna a été secoué par des évènements. Tout a commencé lorsque des étudiants se sont rassemblés à l’entrée de la faculté de droit et des sciences politiques. “On est venu pacifiquement tenir un sit-in, sans violence, pour revendiquer nos droits”, nous confie le représentant des étudiants. Les protestataires demandent “la réouverture du projet de doctorat et des concours de magistère”, pour les reprendre. Ce qui a poussé à la colère, selon nos interlocuteurs, c’est le fait qu’un étudiant de nationalité étrangère soit inscrit en doctorat malgré le rejet de sa candidature par le conseil scientifique. Le sit-in a failli tourner à l’émeute lorsque le vice-recteur de la faculté de droit et des sciences politiques est intervenu avec violence. Les étudiants exigent une commission d’enquête ministérielle pour mettre fin à ce qu’ils qualifient de dangereux dépassements au niveau du département. “On est, dès aujourd’hui, dans une grève ouverte et illimitée jusqu’à nouvel ordre”, disent-ils.