Face à la pression des chômeurs, le gouvernement algérien multiplie les gestes de bonne volonté

Face à la pression des chômeurs, le gouvernement algérien multiplie les gestes de bonne volonté

Aïssa Bouziane, Maghreb Emergent 17 avril 2013

Procédures plus souples, délais plus courts pour financer les projets lancés par les jeunes : le gouvernement algérien multiplie les démarches pour contenir la grogne des jeunes, symbolisée par les protestations des chômeurs du sud.

Le gouvernement algérien a encore lâché du lest face aux protestations des chômeurs, multipliant les facilités de financement au profit des jeunes, pour éviter tout risque de dérapage social. Les multiples facilités mises en place ont été encore renforcées, notamment avec des instructions aux administrations et aux banques en vue d’accélérer et de faciliter les procédures, alors que l’efficacité économique de ces dispositifs suscite de sérieuses critiques.

Ces dispositifs sont essentiellement portés par deux organismes, L’ANSEJ (Agence de soutien au jeunes) et la CNAC (caisse d’assurance chômage), qui préparent le terrain au financement fourni par les banques, dont les prêts sont garantis pat l’Etat. Dans ce dispositif, les banques servent de simples guichets, car elles n’ont rien à perdre : la validation des dossiers se fait sans elles, elles se contentent des remboursements, pour s’adresser à un fond de garantie quand le projet se révèle inconsistant.

Sous la pression de la rue, avec notamment la multiplication de manifestations de jeunes, en premier lieu dans le sud du pays, le gouvernement a encore levé certaines contraintes liées à la procédure. Les investissements dans le domaine des transports, gelés en juillet 2011 en raison de la saturation de ce créneau, ont repris, a indiqué M. Ali Zanoun, directeur central des prestations de la CNAC. L’administration se contente d’essayer d’orienter les jeunes vers d’autres créneaux, de les informer des filières disponibles, sans possibilité réelle de dissuasion. Un minimum de qualification est toutefois exigé, ainsi qu’une adaptation aux besoins de la région où l’investissement est lancé, selon M. Zanoun. Mais les règles ne sont guère respectées, et les jeunes investisseurs réussissent à dépasser ces écueils.

L’investissement est couvert à 60% par la banque, et jusqu’à 95% dans le sud. Le crédit est bonifié jusqu’à 100% : l’emprunteur ne paie que le principal, sans intérêt, avec un différé d’une année. En fait, en raison de l’inflation, la banque perd de l’argent, qu’elle récupère auprès de l’Etat.

Peu d’impact sur l’économie

En 2012, près de 100.000 micro-entreprises ont été créées, dont 65.000 pour l’ANSEJ et 34.500 pour l CNAC. Malgré le nombre élevé de projets lancés, seuls 1.100 dossiers ont été présentés par les banques au fond de garantie, ce qui signifie que leurs promoteurs sont dans l’impossibilité de rembourser. Cela représente 1.7% du total des 74.000 projets engagés par la CNAC depuis 2005, ce qui est con sidéré comme un chiffre « faible » par M. Ali Zanoun. Au total, les projets défaillants représentent un milliard de dinars (dix millions d’euros), ce qui constitue un chiffre dérisoire par rapport aux besoins de financement de l’économie algérienne.

Les banques et l’administration sont aussi extrêmement diligentes dans le traitement des dossiers. Les délais ont été ramenés à un minimum, moins d’un mois, et 95% des demandes de financements reçoivent des demandes favorables de la part des cinq banques publiques partenaires de l’opération. En plus de ces facilités, la CNAC et l’ANSEJ assurent une formation rudimentaire, notamment pour initier les jeunes à la gestion et à la comptabilité.

Quant aux diplômés de l’université, ils peuvent bénéficier d’un crédit non rémunéré, en plus du dispositif CNAC et Ansej. Le prêt non rémunéré peut notamment couvrir la location d’un local, jusqu’à hauteur de 500.000 dinars, ce qui couvre la location d’un local modeste pour une période de deux ans. De jeunes universitaires qui se regroupent pour lancer des cabinets de médecine, d’architecture, d’avocat ou autres bénéficient de facilités supplémentaires.

Ces facilités ont suscité des critiques sur deux plans. L’économie algérienne est constituée de petites et très petites entreprises. Ces procédures ne font qu’augmenter le nombre d’entreprises de faible envergure, sans réelle portée sur la croissance. Les financements qui en résultent sont éparpillés, et ont peu de consistance technologique, tout en monopolisant une partie de l’administration et d’un secteur bancaire, largement décrié. Les jeunes investisseurs sont soustraits du marché du travail, car ils ne sont plus considérés comme chômeurs. Comme ils ont une formation, seule condition pour accéder au crédit, leur décision de lancer de lancer des entreprises a provoqué une sérieuse pénurie de main d’œuvre spécialisée.