Paramédicaux: « La grève se poursuivra en dépit des intimidations… »

Deuxième jour de débrayage des paramédicaux

« La grève se poursuivra en dépit des intimidations… »

El Watan, 18 mars 2008

Les paramédicaux étaient encore une fois au rendez-vous hier, et ce, malgré la pression, les intimidations et l’enclenchement de la machine judiciaire de la part du ministère de la Santé, de la Population et de la Réforme hospitalière.

Au deuxième jour de la grève de trois jours, à laquelle a appelé le Syndicat algérien des paramédicaux (SAP), les initiateurs de cette action semblent avoir ratissé large vu le suivi massif du mot d’ordre de débrayage au niveau national et dont le taux de suivi a dépassé les 90%. Dans la matinée d’hier, des piquets de grève, des sit-in et des rassemblements ont été improvisés dans l’enceinte des hôpitaux d’Alger et de toutes les wilayas du pays. Au Chu Mustapha, les infirmiers en blouse blanche discutaient de leurs problèmes et surtout de l’attitude « scandaleuse » de leur tutelle. Une tutelle, selon le SAP, qui tente par tous les moyens de casser ce mouvement pacifique. Une tutelle qui continue en 2008 à tourner le dos à ses fonctionnaires et à se substituer à la justice. « Au lieu d’ouvrir les portes du dialogue, M. Tou innove en la matière. Il qualifie notre grève d’illégale, tout en sommant le personnel paramédical à suspendre son mouvement et avance un taux de participation de 7% en moyenne. Ceci relève de l’aberration dans un pays qui se dit démocrate », a soutenu M. Ghachi. Celui-ci pense par ailleurs que M. Tou doit revoir sa copie en matière de calcul arithmétique. « Les infirmiers qui n’ont pas adhéré au mouvement de débrayage avoisine peut-être les 7% et nous pensons que le représentant du gouvernement parle de ce noyau. Il faut être aveugle et sourd pour réduire le débat à la guerre des chiffres », a déploré notre interlocuteur. Outrés, les paramédicaux ont appris hier, par le biais de l’administration de l’hôpital Mustapha Bacha, l’existence d’un communiqué émanant du ministère de la Santé stipulant l’arrêt de la grève. La chambre administrative aurait ainsi statué en référé suite à une action engagée par M. Tou. Mais officiellement, rien n’a émané de la justice ou de son porte-parole officiel. Nullement étonné, le SAP n’accorde pas d’importance à cette énième manipulation et compte poursuivre la grève et maintenir la pression jusqu’à la satisfaction de ses revendications. « Nous n’allons pas suspendre notre grève, car nous n’avons reçu aucun ordre des services de la justice. Rien ne nous a été notifié », a souligné M. Ghachi en s’interrogeant sur les missions attribuées à M. Tou. « Est-il ministre de la Santé ou de la Justice ? De quel droit se permet-il de se prononcer sur l’illégalité ou pas de la grève ? Est-il le garde des Sceaux ? Il est le seul ministre à brandir, à chaque fois, cette carte… », s’indigne notre interlocuteur en rappelant les agissements de ce dernier lors de la grève des 17, 18 et 19 février dernier qui a mobilisé un grand nombre de paramédicaux. « Ce jour-là, nous avons été fortement déçus par le ministère de tutelle. Il nous a reproché le fait de ne pas avoir prévenu l’inspection du travail. Comme notre syndicat couvre tout le territoire national, nous n’avons donc pas jugé utile de déposer le préavis de grève auprès de l’inspection du travail puisque nous l’avions déjà remis au ministère du Travail et à celui de la Santé dix jours avant la grève », a rappelé M. Ghachi qui estime qu’aujourd’hui le ministère ne peut pas les accuser d’être des « hors-la-loi » d’autant que le syndicat a respecté la procédure légale. Le SAP s’est insurgé contre les mesures visant à intimider les contestataires. « Je ne comprends pas pour quelles raisons les grévistes de la centrale syndicale n’ont jamais eu à subir des ponctions sur salaires. Alors que les syndicats autonomes, dès qu’ils enclenchent une grève, ils font face à ces intimidations. Qu’ils prennent tout le salaire s’ils le souhaitent, notre mouvement ne s’arrêtera pas », assène M. Ghachi. Le cri d’alarme des contestataires s’adresse au gouvernement dans son ensemble. Ils demandent l’amélioration de leurs conditions socioprofessionnelles, une meilleure formation, une rémunération digne de leur métier et leur garantir la sécurité pendant les heures de travail, notamment la nuit, ainsi qu’un minimum de moyens pour exercer leur activité en mettant à leur disposition des vestiaires et des chambres de garde. « Le SAP ne fait pas grève de gaieté de cœur. Il en a fait recours après épuisement de toutes les voies. Nous n’avons jamais refusé la négociation et nous y invitons d’ailleurs le ministre à la table du dialogue. Toutefois, si les autorités persistent dans leur logique de mépris, nous allons redoubler de férocité », a ajouté le secrétaire général du SAP. Ce dernier revendique également la mise en place du système LMD pour leur permettre d’évoluer dans leur carrière et de grimper des échelons. « Nous voulons un statut qui nous renforce et non qui nous dévalorise et un salaire décent nous permettant de subvenir à nos besoins les plus élémentaires », a souligné le porte-parole du SAP. Par ailleurs, le Syndicat national des praticiens spécialistes de la santé publique (SNPSSP) apporte son soutien au SAP tout en étant convaincu de la légitimité des revendications du SAP et de l’ensemble des professionnels de la santé ainsi que celles de tous les syndicats autonomes et interpelle à cet effet les pouvoirs publics pour un dialogue franc et sincère avec les véritables représentants des travailleurs. De son côté, le Syndicat national des praticiens de la santé publique (SNPSP) a exprimé sa solidarité avec le SAP .

Nabila Amir


Forte adhésion à l’Est

– A Constantine, les paramédicaux du CHU se sont, pour leur deuxième journée de grève, regroupés à l’intérieur même du centre hospitalier. En nombre, ces derniers n’ont pas manqué d’interpeller les responsables du CHU quant aux moult pressions subies par les grévistes et les menaces persistantes de certains médecins, chefs de service qui, nous dira Khemar Abdelkrim, SG de la section syndicale du SAP du CHU, « font tout pour casser notre élan contestataire et briser notre mouvement syndical, lequel a prouvé sa résolution, au demeurant inébranlable, à aller jusqu’au bout de ses revendications ». Pour ce qui est du taux de participation, les représentants du SAP sont unanimes à déclarer : « Avec presque 100% de suivi, mais encore le ralliement à notre cause d’autres syndicalistes et la demande d’adhésion à notre syndicat sans cesse croissante, l’on pense que notre action est une grande réussite. »

– A Mila, le mot d’ordre de grève a été, à l’exception du maintien du service minimum, reconduit pour la deuxième journée consécutive, affichant un taux de participation de plus de 90%, nous a révélé un représentant du SAP. Selon les propos de Rachid Siari, SG de ce syndicat, le mouvement de contestation a entraîné la paralysie de l’ensemble des structures sanitaires à travers les trois secteurs de la wilaya. « Un succédané d’amendements concernant le statut particulier nous a été proposé par la tutelle, mais nous ne céderons pas », a-t-il ajouté. « Nous rejetons cette translation transitoire et nous sommes décidés à aller jusqu’au bout de nos revendications », a martelé, de son côté, Mostefa Benchaoui, chef de la section du SAP à l’hôpital des Frères Tobal de Mila.

– A Skikda, la deuxième journée de grève a connu une plus forte adhésion. En effet, le personnel paramédical de l’hôpital de Skikda a observé un piquet de grève au niveau de la cour, enregistrant ainsi un taux de suivi estimé à 90%, selon le représentant du SAP. A Tamalous comme à Skikda, ce sont quelque 92 paramédicaux sur 102 qui ont adhéré au mot d’ordre de débrayage, soit un taux de 98%. « Malgré les tentatives d’intimidation de l’administration, le personnel n’en a été que plus encouragé à poursuivre le mouvement de grève », a déclaré M. Mesbah.

– A Oum El Bouaghi, le taux de participation à la grève a augmenté de quelques crans. En effet, le taux avancé par la DSP est de 11,72% à son deuxième jour, alors qu’il n’était la veille que de 8,90%. Cela s’explique par le fait que les grévistes, qui n’étaient qu’au nombre de 98, sont passés à 112 et ce au niveau de la ville de Aïn Beïda, tandis que dans celle de Aïn M’lila, il a atteint 82, après avoir été seulement de 50 au premier jour. Selon la DSP d’Oum El Bouaghi, sur les 1876 paramédicaux, seulement 112 ont observé le mouvement de grève. L’information fournie par Abdelhakim Abdoun, secrétaire du SAP au niveau de l’établissement public de santé de Aïn Beïda, fait ressortir un pourcentage de 96,09%, alors que celui de Aïn M’lila dépasse la barre des 98%.

– A Tébessa, le mouvement de grève initié par le SAP a été largement suivi au niveau des centres sanitaires de Bir El Ater et de Chréa, où l’on a enregistré le taux appréciable de 90%, notamment au centre hospitalier Tidjani Haddam. Quant au chef-lieu de wilaya, le taux fluctuant entre 12 et 15% n’a pu être dépassé vu les tiraillements et autres conflits entre syndicalistes du SAP datant depuis des mois déjà. Pour ce qui est du taux global de participation pour les deux journées de débrayage, on notera que pour tout le territoire de la wilaya il a atteint une moyenne de 58,70% de participation.

– A El Oued, les différents établissements hospitaliers de la wilaya sont toujours paralysés puisque les paramédicaux de la région poursuivent massivement leur grève. Le taux de participation a dépassé, pour ce deuxième jour, les 85%, a noté le coordinateur de wilaya de syndicat, qui indiquera que le ministère de la Santé a adressé une lettre au directeur de la santé de la wilaya selon laquelle la grève est déclarée illégitime. Il ajoutera que la direction du SAP a refusé cette menace en demandant aux paramédicaux grévistes de continuer leur mouvement.

– A Jijel, la deuxième journée de la grève a été moins suivie que la première, où l’on avait enregistré un faible taux au niveau de la wilaya avec seulement 6,71%. Seuls certains paramédicaux de Taher ont adhéré à la grève avec un nombre moins important que celui de la première journée.

Dj. B.

M. B.

D. D.

L. B.

R. S. Y.

L. S.

F. S.

 


Échos de l’Ouest

– A Chlef, la grève des paramédicaux qui en est à son deuxième jour a été largement suivie dans l’établissement public hospitalier (EPH) de Sobha, dans la daïra de Boukadir, où plus de 68 agents ont observé le mouvement, selon des informations concordantes. Cela a engendré, selon des sources locales, des répercussions sur le fonctionnement des structures sanitaires implantées dans cette région rurale. L’hôpital de Chettia, à 7 km au nord de Chlef, ainsi que ceux du chef-lieu de wilaya, ont été partiellement touchés par le débrayage, ce qui n’a pas eu, dit-on, d’incidences sur la prise en charge des malades. Selon une source du secteur de la santé, le taux de suivi a atteint 5,87%, soit 102 agents grévistes sur les 1736 que compte le secteur à travers la wilaya.

– A Mecheria, malgré les intimidations de l’administration, l’appel à la grève a été largement suivi par les paramédicaux affiliés au SAP. Depuis dimanche dernier, les contestataires ont encore une fois observé un piquet de grève suivi d’un un sit-in pour exprimer leur mécontentement face à la grille des salaires imposée par la tutelle et revendiquent un statut particulier et un régime indemnitaire décents. Ces derniers déplorent la dégradation des conditions de travail qui, disent-ils, se répercute inévitablement sur les patients. Le taux de participation à ce mouvement estimé par ce syndicat est de 87,5% en milieu hospitalier.

– A Relizane, le débrayage de trois jours auquel a appelé le Syndicat des paramédicaux (SAP) n’a pas eu d’écho, du moins pour son premier jour, dans l’entourage des différents EPH et autres EPSP de la wilaya de Relizane. En effet, seuls 12 syndicalistes ont observé la grève. Une virée à l’EPH Mohamed Boudiaf de Relizane nous a permis de constater que tous les services ont fonctionné normalement.

Y. a.

D. S.

I. B.