Grèves et protestatins diverses

Le bâtonnat refuse de plaider devant les huissiers de justice

La grève des greffiers suivie à 92%, selon le syndicat

El Watan, 11 avril 2012

Les greffiers ont entamé, aujourd’hui, une grève de trois jours. «L’écho est très favorable.

La grève a été suivie à 92% au niveau national», a déclaré Mourad Ghedia, secrétaire général du syndicat des greffiers affilié au Snapap. Ainsi, le représentant des greffiers s’est montré très satisfait des résultats de cette action, annonçant également la tenue d’un rassemblement samedi prochain devant le ministère de la Justice. «Nous demandons la satisfaction de nos revendications dont la liste est au niveau de cette institution depuis le 11 février 2011», a-t-il réitéré. Mais sur le terrain, certains tribunaux ont fonctionné durant la matinée d’hier, notamment ceux traitant les affaires criminelles. Les tribunaux de première instance ont tout de même tenté de tenir les affaires programmées.

Les audiences ont-elles été tenues sans la présence des greffiers ? Inconcevable ! D’après les témoignages des avocats, certains tribunaux de première instance ont fait appel aux huissiers de justice pour remplacer les greffiers. «C’est une procédure illégale», a expliqué maître Sidhoum contacté par téléphone. Mais la justice a procédé ainsi. Devant cette situation, les avocats constitués dans les affaires programmées pour la journée d’hier ont demandé le report des audiences.

Ainsi, «au niveau des tribunaux de Bir Mourad Raïs et de Baïnem, les affaires programmées ont été reportées en bloc», a constaté Me Boumerdaci contacté par nos soins. Idem pour le tribunal Abane Ramdane. Le bâtonnat a refusé de cautionner la procédure du remplacement des greffiers par les huissiers de justice. «Ils ont le droit de réclamer leurs droits», ont soutenu les deux avocats. «Nous avons demandé le report de toutes les affaires, pour manifester notre solidarité avec les greffiers d’une part. D’autre part, nous ne pouvons pas cautionner cette procédure illégale», a souligné Me Sidhoum.

Par ailleurs, le représentant des greffiers dénonce les pressions que subissent ses confrères sur le terrain. «Une greffière a été agressée ce matin (hier matin) par un autre greffier qui n’adhère pas à ce mouvement au niveau de la cour d’Alger», a condamné M. Ghédia. Il convient de rappeler que cette action intervient suite à une manifestation des membres du bureau national du syndicat devant le siège du ministère de la Justice. Une manifestation qui s’est avérée sans écho. La revendication majeure des greffiers demeure le statut particulier qui soit en mesure d’améliorer leurs conditions socioprofessionnelles.

Djedjiga Rahmani


Grève des fonctionnaires de la justice

par Houari Saaïdia & A. M., Le Quotidien d’Oran, 11 avril 2012

Les fonctionnaires de la justice, à leur tête le corps de greffe, ont entamé hier une grève nationale de trois jours. Contrairement au débrayage de fin février 2011, qui était plutôt improvisé, celui-ci intervient à l’appel d’un syndicat, le Conseil national des fonctionnaires de la justice, affilié au syndicat autonome Snapap.

En effet, samedi 31 mars dernier, cette section syndicale avait, au terme d’une réunion tenue à la Maison des syndicats de Dar El-Beïda, donné au ministère de tutelle un ultimatum jusqu’au 10 avril pour la concrétisation de tous les engagements qu’il avait donnés l’an dernier en réponse aux revendications des fonctionnaires de la justice. «En réponse à la volonté des fonctionnaires de la justice, il a été décidé à l’unanimité de demander au département de tutelle de concrétiser sur le terrain les revendications pour lesquelles elle s’est engagée. Le 10 avril est la date butoir fixée pour une grève générale de trois jours», avait prévenu alors le syndicat dans un communiqué. Hier, il est passé à l’action. Bien qu’en mal de représentativité jusque-là, ce syndicat émergent semble avoir réussi le défi de se faire entendre dans les quatre coins du territoire national, puisque son appel à la grève a été observé dans la quasi-totalité des juridictions du pays. 95%, selon un représentant syndical. Un chiffre qui n’a pas pu être vérifié, les maintes tentatives d’avoir le son de cloche du côté du ministère de la Justice n’ayant pas abouti. Sur le terrain, en tout cas, la situation qui prévalait durant la journée d’hier dans la plupart des 36 cours du pays et les tribunaux qui en dépendent était marquée par un arrêt de travail collectif observé, dans un premier temps, par le personnel de greffe en début de matinée, et ensuite, au fil des heures, par les corps communs qui ont rejoint leurs collègues grévistes.

Dans l’après-midi, l’impact de la grève sur le fonctionnement des tribunaux a atteint son pic. De tous les services, celui du casier judiciaire en était le plus perturbé. Dans certaines structures à l’instar de la cour d’Oran, cette prestation a été carrément mise à l’arrêt à cause de la grève, non sans faire grincer des dents parmi les nombreux citoyens qui sont revenus bredouilles. Les greffiers préposés aux guichets n’ont pas rejoint leurs postes, tout comme les techniciens qui assurent le fonctionnement de ce réseau informatique national, mais également les autres connexions reliant les différentes structures du secteur. Du coup, le service du courrier électronique inter-tribunaux, ce canal d’échange d’informations et de communication très important, n’était pas en reste. Dans nombre de cours, même le service minimum n’a pas été assuré. Si les audiences et autres actes de présentation, annulés faute de greffiers, peuvent être reportés sans grandes conséquences, il en est tout autre s’agissant des procédures d’appel et de pourvoi en cassation, lesquels sont soumis à des délais légaux stricts.

Pire, le débrayage des fonctionnaires de la justice n’est pas resté confiné entre les murs des tribunaux, il s’est propagé même -du moins dans certaines wilayas- aux différentes commissions électorales locales mises en place en prévision des législatives du 10 mai, puisque les greffiers désignés ont décidé de boycotter le travail au sein de ces instruments électoraux durant les trois jours de grève, selon nos informations.

A Constantine, le personnel des greffes au niveau du siège de la cour de Constantine et des tribunaux de Ziadia et du Khroub, soit un effectif total de 8OO travailleurs, nous a-t-on indiqué, ont répondu à l’appel à la grève. Rencontrés hier matin au niveau de la cour, des greffiers nous ont déclaré que leur corps a été complètement exclu des bénéfices induits par la réforme du secteur de la justice. Parmi les revendications non encore satisfaites, selon les grévistes, l’annulation pure et simple de l’actuelle loi régissant le corps de greffe judiciaire, texte assimilé à un «code pénal», en ce sens, arguent-ils, que «ces dispositions ne contiennent que les sanctions pénales encourues par le greffier en cas d’erreurs commises lors de ses tâches administratives quotidiennes, mais pas un seul petit chapitre concernant ses droits». Ils appellent les autorités compétentes à soumettre, dans les plus brefs délais, le nouveau statut de greffiers au débat et à l’enrichissement au niveau de chaque tribunal. Aussi, les fonctionnaires du greffe réclament que leur corps soit détaché de la Fonction publique et placé sous la coiffe de la Justice, au même titre que celui de la magistrature. L’inexistence d’un plan de gestion de carrière, la dépendance au parquet général et non au greffier en chef en matière d’attribution des tâches, la non-indemnisation pour les heures supplémentaires et les permanences…, autant de faits déplorés par les concernés, tous grades confondus, commis-greffiers, greffiers, divisionnaires ou greffiers en chef. Dans le registre «œuvres sociales», les greffiers disent avoir été victimes d’une vraie arnaque. «Dans la foulée de ces démarches entreprises au lendemain de notre action de protestation de février 2011, le ministère de la Justice avait signé deux conventions, avec Condor et Chevrolet portant respectivement sur l’achat avec facilité d’électroménagers et de véhicules touristiques respectivement. Au niveau de la cour d’Oran, pour ne citer que cette structure, des dizaines de fonctionnaires ont sitôt constitué un dossier qu’ils ont déposé auprès du délégué chargé des œuvres sociales. Quatorze mois sont passés et toujours rien. Pas la moindre réponse. On a appris dernièrement que c’est tombé à l’eau. Nombre de nos collègues courent toujours pour se faire rembourser leur premier versement, mais en vain. Ces conventions n’étaient en fait que la poudre aux yeux», déplore un greffier à la cour d’Oran, qui en appelle au ministre de la Justice par intérim, Ahmed Noui, pour qu’il vérifie par lui-même cette affaire, qui, à son avis, «résume à elle seule le manque de considération, voire le mépris avec lequel on traite le corps des greffiers».

Pour rappel, le secteur de la Justice avait été paralysé une semaine durant, du 17 au 23 février 2011, par une grève générale des fonctionnaires de la justice, avant que le gouvernement ne parvienne à désamorcer la crise grâce notamment à la promulgation d’un décret exécutif instituant le régime indemnitaire des personnels des greffes des juridictions, paru au JO du 23 février 2011, ainsi qu’un accord officiel entre le ministère de la Justice et la «Coordination nationale des fonctionnaires des greffes de la justice», composée des délégués des greffiers issus des 36 cours. L’accord soulignait en conclusion que «la tutelle s’est engagée à exécuter ses promesses qui consistent en six points revendiqués par les greffiers et à étudier cinq autres points en concertation avec d’autres instances du gouvernement». Le premier point portait sur une augmentation de salaire, avec effet rétroactif à dater de janvier 2008, après l’instauration de quatre nouvelles primes et indemnités, à savoir: la prime d’astreinte judiciaire (mensuelle, 40% du salaire de base), la prime de rendement et de qualité d’exécution des tâches (mensuelle, de 0 à 30%), l’indemnité sur la responsabilité personnelle (mensuelle, 40%) ainsi que la prime de caisse pour le personnel chargé du recouvrement des frais de justice et autres taxes (trimestrielle, entre 5.500 et 1.500 DA, selon le poste).

Excepté cela, les autres engagements n’ont pas été suivis d’effet à ce jour, à savoir: «régulariser la situation au profit des fonctionnaires occupant des logements de fonction par une cession de ces biens immeubles, faire bénéficier les greffiers des différentes formules de logements attribuées par l’Etat, assurer le transport pour ce personnel dans le cadre des œuvres sociales en commençant par les grandes cours en attendant sa généralisation progressivement, le maintien d’une relation avec le seul syndicat élu par la corporation et diligenter des enquêtes sur les cas d’abus de mauvais traitement déplorés par certains greffiers dans l’exercice de leurs fonctions». Concernant les cinq revendications, que le ministère avait annoncé qu’il allait étudier ultérieurement, elles concernaient «la révision du statut des greffiers, notamment en ce qui concerne le système disciplinaire et la promotion, l’accès aux postes supérieurs, l’indépendance de la gestion des personnels des greffes, l’indemnisation sur les heures supplémentaires, la prime de zone (le Sud), notamment».


Rassemblement et lettre ouverte à Bouteflika

Les travailleurs du nucléaire en colère

Rien ne va plus aux centres de recherche nucléaire d’Alger, de Draria et de Birine. Sous tutelle du Commissariat à l’énergie atomique (Comena/MEM), les chercheurs du centre d’Alger ont décidé d’observer, aujourd’hui, un rassemblement devant leur direction pour protester contre la démarche unilatérale adoptée par le gouvernement dans la confection de leur statut.

De son côté, l’ensemble du personnel du centre de recherche nucléaire de Birine (chercheurs, soutien à la recherche, soutien technico-administratif), dénonçant une multitude de problèmes qui persistent depuis de longues années, ont décidé, en ultime recours, de saisir le premier magistrat du pays pour lui faire part de doléances relatives aux problèmes récurrents que connaît leur secteur.
Ce secteur à vocation nucléaire souffre, selon les plaignants, depuis plus de 20 ans de l’absence d’un statut adapté qui réponde à sa spécificité et aux aspirations de ses travailleurs, toutes catégories confondues.

Pour remédier aux carences induites par la gestion obsolète des carrières des employés, un projet de statut a été élaboré par l’administration du Comena et transmis aux autorités gouvernementales pour examen en vue de son approbation. Ce document était un espoir pour ces travailleurs ; seulement ces derniers se disent étonnés de constater que la version finale intégrale du projet de statut n’a pas été remise pour consultation au partenaire social : «Le Comena refuse de mettre à la disposition des travailleurs, à travers leurs représentants légitimes, la dernière version du projet de statut pour consultation sous prétexte qu’il ne s’agit pas d’une convention collective, qu’il est spécifique et distinct de la Fonction publique et, à ce titre, non négociable», expliquent les travailleurs de ce centre.

La préoccupation majeure de ces travailleurs demeure la version finale du contenu du statut spécifique. «Nous avons fait part de nos doléances au premier responsable du Comena et au ministre de tutelle et nous leur avons demandé d’initier un dialogue serein afin d’élucider cette confusion et d’éviter les incompréhensions ou les mauvaises interprétations, mais en vain», regrettent-ils.
Cette situation de fin de non-recevoir a exaspéré les personnels du Centre et a donné lieu à un vaste mouvement de protestation. Comme ultime tentative, les travailleurs sollicitent l’intervention du chef de l’Etat pour mettre fin à ce «mépris caractérisé et éviter à un secteur aussi stratégique et sensible davantage d’arbitraire et d’instabilité».

Les chercheurs et assimilés de Birine prient le premier magistrat du pays de rappeler et d’instruire les autorités concernées en charge du dossier de statut en vue d’énoncer des dispositions statutaires spécifiques, applicables aux personnels du Comena, tout en rétablissant l’ensemble des travailleurs dans leurs droits.
Par ailleurs, les travailleurs du centre ont dénoncé l’entrave à l’exercice de leur droit syndical par le premier responsable et ce, suite à la mise en place d’une section syndicale au profit du personnel du centre. Ceci est interprété par les contestataires comme «une démonstration manifeste du verrouillage de toute possibilité de dialogue et en même temps une transgression gravissime des lois de la République».
Nabila Amir


Réclamant une augmentation des salaires

Les travailleurs du groupe avicole du Centre en colère

Des représentants des travailleurs des différentes filiales du Groupe avicole du Centre ont tenu hier un rassemblement devant leur direction générale pour réclamer «l’amélioration des conditions socioprofessionnelles».

«Nous avons frappé à toutes les portes pour exiger nos droits ayant trait à l’augmentation des salaires et à la considération, en vain», expliquent les représentants de la Coordination syndicale de l’entreprise relevant de l’UGTA. Selon M. Mecili, secrétaire général de cette coordination, «les travailleurs vivent une situation sociale médiocre». Un travailleur occupant le poste de chef de projet estime que son salaire est en deçà des efforts fournis : «Je touche 26 000 DA après 5 ans de carrière alors que nos homologues du privé font presque le double.» La revendication principale est liée donc à la hausse des salaires, puisque selon les protestataires «une grande partie des travailleurs sont payés au SNMG».

La direction générale estime pour sa part que la situation financière que traverse l’entreprise ne peut permettre une quelconque révision des salaires. «L’entreprise vient tout juste de débloquer l’augmentation des salaires dans le cadre de la convention collective et à effet rétroactif. La trésorerie ne pourrait faire face à une autre augmentation», affirme M. Afroukh, président du directoire de ce groupe.
Les syndicalistes se disent «déterminés à poursuivre leur mouvement de protestation jusqu’à l’aboutissement des revendications». Les protestataires se sont séparés avec la décision d’organiser une journée de grève dimanche. «Et si aucune suite n’est donnée à notre mouvement de protestation, une grève illimitée sera à l’ordre du jour», menacent les syndicalistes.
Fatima Arab


A l’appel du cnapest

La majorité des lycées paralysés

Par : Malika Ben, Liberté, 11 avril 2012

Un refus catégorique a été signifié par les responsables du Cnapest convoqués par la tutelle qui leur a demandé d’arrêter la grève.

Le département de Benbouzid ne sait plus à quel saint se vouer pour mettre fin à la tension qui gagne de plus en plus les établissements scolaires.
Pris entre les revendications des syndicats et la position des représentants de la commission ad hoc en charge d’examiner l’amendement du statut particulier des travailleurs de l’éducation,
M. Benbouzid fait face à une situation inextricable. Le secrétaire général et le chef de cabinet du ministère ont échoué, hier encore, dans leur tentative de convaincre les responsables du Cnapest à geler le débrayage des enseignants. La grève illimitée entamée hier à travers tout le territoire national a été largement suivie. Le responsable de la communication du Cnapest évoque un taux de suivi atteignant les 95% dans la majorité des lycées du pays. “Le taux de suivi de la grève se situe entre 80 et 95%. Pour ce qui est de la capitale, le suivi était de 90% à Alger-Ouest, 80% à Alger-Est et 65% à Alger-Centre”, souligne Messaoud Boudiba. Le suivi massif du débrayage a, semble-t-il, créé la panique au département de l’Éducation qui a opté cette fois-ci pour la souplesse et non les menaces. En effet, le ministère de l’Éducation nationale s’est empressé, hier matin, de contacter le Cnapest pour une rencontre dont le seul point inscrit à l’ordre du jour est la grève des enseignants. “Le secrétaire général et le chef de cabinet au ministère de l’Éducation nous ont demandé d’arrêter la grève”, révèle le chargé de communication du Cnapest. Une demande refusée par le syndicat soutenant que “l’action de débrayage a été prise par le conseil national et il est le seul habilité à l’arrêter”. Mais faudrait-il encore qu’il y ait une raison valable voire concrète pour cela. “Le conseil national attend l’évolution de la situation voire la satisfaction des revendications formulées pour en décider de la suite. Sans cela, la grève se poursuivra”, ajoute Boudiba.
Pour tenter d’apaiser la tension, les deux responsables de la tutelle ont demandé au syndicat d’attendre la fin des négociations pour décider d’une éventuelle action de protestation.
Le Cnapest a rejeté cette proposition en leur rappelant que “le même scénario a été vécu en 2008. Toutes nos revendications que la tutelle a pourtant acceptées, ont été rejetées par la commission ad hoc.” “La grève, avant l’aboutissement du statut amendé, est un message pour la commission. Car une fois les négociations achevées sans la satisfaction des doléances, le pourrissement sera inévitable. Nous ne pourrons plus contrôler la situation”. Le Cnapest persiste et signe “le débrayage se poursuivra jusqu’à la satisfaction des revendications qui ne sont en fait qu’un simple rattrapage des lacunes et injustices entre les secteurs”.

M B