Les Douanes «éclaboussées»
13 OFFICIERS ENTAMENT LEUR 7E JOUR DE GRÈVE DE LA FAIM
Les Douanes «éclaboussées»
Par Mohamed BOUFATAH, L’Expression, 28 Novembre 2011
Les 13 douaniers poursuivaient, hier, leur grève de la faim entamée dimanche dernier devant le siège de l’Union générale des travailleurs algériens (Ugta) pour dénoncer leur suspension «arbitraire». Hormis la visite des représentants d’organisations de droits de l’homme et d’institutions ainsi que le soutien de leurs collègues des différentes wilayas, les grévistes sont restés «sans aucun contact avec leur hiérarchie dont le premier responsable est en visite en Chine», a indiqué leur porte-parole. S’ils ont noté le passage de Sidi Saïd, le patron de l’Ugta, il n’en demeure pas moins que la direction n’a pas jugé utile de les approcher pour les dissuader de ce genre d’action extrême ou du moins s’enquérir de leur situation. Les grévistes apparaissent aujourd’hui sous les lanternes de certains comme des «milliardaires». Or, «d’aucuns se souviennent que l’assainissement du corps de douane fut le cheval de bataille des responsables», indiquent-ils. Ce programme qui devait être entamé en 2006 est loin d’être achevé dès lors que le responsable fédéral du Syndicat national des douanes qualifie les grévistes de «milliardaires», cité par notre confrère arabophone Ennahar. Cela revient à réduire à néant le résultat dudit programme d’autant plus que cette institution est dotée de l’inspection générale, un instrument de contrôle interne dont le responsable est «le deuxième homme» sur l’organigramme des douanes, commentent en substance les grévistes. Les officiers et cadres grévistes (dont le cas est laissé au pourrissement donc poussé vers la porte) ont anticipé cette action pour empêcher leur «limogeage arbitraire», confient-ils. Toutefois, comme dans tous les secteurs, la corruption a trouvé dans cette institution un terrain privilégié. Les scandales des métaux ferreux et non ferreux, ayant causé un préjudice de 7 milliards de dollars au Trésor public et dont le procès est programmé pour la mi-décembre dans le rôle du tribunal criminel d’Alger, a montré que cette institution était gangrenée. Le transfert de fonds à l’étranger est un autre scandale qui a éclaté en 2002, pour ne citer que ces deux exemples. Un réseau organisé utilisant des prête-noms avec la complicité de certains responsables de banque et de commissionnaires en douane parvenait à transférer d’énormes sommes en devises à l’étranger. Le préjudice causé au Trésor public est estimé à plus de un milliard d’euros. Paradoxalement, la douane, l’instrument de contrôle de l’économie nationale, se trouve face à un manque de moyens pour assurer ses missions. Tous les ports ne sont pas dotés de scanners. Elle manque aussi de moyens financiers pour assurer l’entretien du matériel. Face à l’étendue des frontières, plus de 7000 kilomètres, ses moyens restent rudimentaires face aux puissants réseaux de contrebande. «A l’absence d’un encadrement qualifié pour couvrir tout le territoire national depuis des années, s’ajoutent des carences dans la mise à niveau des connaissances d’une partie du personnel.» «Les différents responsables qui occupaient de hautes fonctions sont partis soit en retraite soit limogés soit poussés à la sortie», apprend-on encore.
Nombre d’officiers de douane se trouvent mis en cause aujourd’hui dans différents dossiers d’évasion fiscale et de transfert illicite de devises.