Mouvement arch: Grève générale le 29 juillet

LE MOUVEMENT DES ARCHS LANCE DE NOUVELLES ACTIONS DE PROTESTATION

Grève générale le 29 juillet

El Watan, 9 juillet 2003

Le conclave extraordinaire de la CADC tenu lundi à Maâtkas s’est terminé avec l’adoption de plusieurs actions de protestation, après un long intermède qui dure depuis mai dernier. La CADC appelle à une grève générale dans la wilaya de Tizi Ouzou pour le 29 juillet, accompagnée de rassemblements devant les sièges des APC et de l’APW, pour protester contre l’installation des Assemblées locales sur la base de suffrages très infimes.

Les 15 et 22 du mois en cours seront marqués par des rassemblements devant les agences de Sonelgaz. La CADC reproche à cette entreprise d’exercer des pressions sur les citoyens qui ont suivi le mot d’ordre des archs appelant au non-paiement des factures d’électricité en raison de la quote-part réservée à la télévision nationale. Le conclave a en outre décidé de tenir une rencontre jeudi prochain à Ath Jennad à l’effet «d’approfondir la réflexion sur les perspectives politiques du mouvement». Cette deuxième rencontre est destinée à aplanir les divergences des délégués autour de la question des perspectives du mouvement, et les différentes coordinations vont remettre à débat le document établi depuis des mois sur ce sujet afin de trouver une formule consensuelle. L’intervention de Belaïd Abrika sur cette question lors du conclave de Maâtkas a quelque peu débloqué les débats en appelant à approfondir la réflexion et rediscuter le texte pour éloigner le spectre d’une crise profonde qui menacerait la cohésion du mouvement. Un document qui enfonce le mouvement n’a pas lieu d’être. Il faut trouver une solution, car il y va de la cohésion du mouvement et de la solidarité qui a caractérisé notre lutte», a déclaré Abrika. Ce dernier a par ailleurs essayé de calmer le jeu dans le débat passionné qui a marqué la scène locale depuis une semaine au sujet des relations archs-partis politiques. «Chacun doit faire des concessions. Il faut que les malentendus et les tirs cessent sur les partis politiques ou les délégués», a déclaré Belaïd Abrika lors de la plénière des coordinations des archs. Le discours des délégués connaît ces derniers jours une évolution, dans le sens de l’ouverture en direction des partis politiques et du recentrage du débat sur les objectifs initiaux des archs, à savoir la lutte pour la justice et la citoyenneté. Abrika a ajouté : «Nous avons tous le devoir de veiller sur le mouvement, de ne pas accepter l’exclusion, car notre structure est née pour bannir l’exclusion. Le mouvement citoyen n’est pas uniciste, à l’opposé du pouvoir qui a imposé l’hégémonie depuis 40 ans.» Le délégué de Tizi Ouzou appelle les acteurs politiques et les animateurs du mouvement citoyen à ne pas se tromper de cible, l’objectif du mouvement étant de combattre le déni de droit érigé en mode de gestion par le système en place. «Ce qui est en cause, ce ne sont pas les partis politiques, mais le pouvoir qui refuse de rendre justice à des dizaines de victimes de la répression», rappellent les animateurs des archs. Ce discours, qui a opéré un saut qualitatif dans la perspection des enjeux, intervient au lendemain des inquiétudes exprimées par le RCD, qui a mis en garde contre certaines dérives observées ces derniers temps sur la scène locale. Les propos de Saïd Sadi lors des conventions de son parti organisées dernièrement à Tizi Ouzou et Béjaïa ont eu un écho dans les structures des archs. Le président du RCD a notamment déclaré que «ceux qui s’attaquent au multipartisme travaillent pour le projet de Zerhouni». Ce parallèle fait avec l’attitude de l’adversaire numéro un des archs, le ministre de l’Intérieur en l’occurrence, a fait l’effet d’une douche froide au sein des délégués, dont certains ont oublié que la destruction des partis d’opposition d’essence démocratique est l’objectif principal et permanent des tenants du statu quo au niveau du système. Des flèches acérées ont été régulièrement lancées contre les formations politiques désignées sous le terme désavantageux de «chapelles», alors que ces dernières ont mis 15 ans pour se construire, pour le RCD, et 40 ans pour le FFS. Pour s’être engagé dans les élections du 10 octobre 2002, le FFS a été qualifié de «relais du pouvoir». Une accusation injustifiée s’agissant d’un parti qui adresse depuis dix ans d’implacables mémorandums aux tenants du régime. Après son engagement soutenu au sein des coordinations des archs, le RCD a fini lui aussi par être mis sur la sellette. Le parti de Saïd Sadi est soupçonné de nourrir des vélleités de caporaliser le mouvement. Les membres du bureau régional du RCD rétorquent à cette accusation en déclarant : «Nous accompagnons le mouvement car nos militants sont d’abord des citoyens (…) Nous n’avons pas cette idée de caporaliser le mouvement tout comme nous n’avions pas essayé de s’approprier les groupes de vigilance dans lesquels nous nous sommes investis pendant la résistance contre le terrorisme depuis 1994.»

Par D. Tamani
Tizi Ouzou : De notre bureau

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Conjoncture difficile

La fugace dynamique politique générée en Kabylie par l’invitation au dialogue lancée par le pouvoir aura eu le souffle court. Le statu quo se réinstalle après les quelques signes d’ouverture qui ont fait miroiter la possibilité d’une solution proche à la crise.Tout semble désormais suspendu à l’engagement de la Présidence de la République à satisfaire la plate-forme d’El Kseur, selon les termes exigés par le mouvement des archs.

Celui-ci, lors de son dernier conclave interwilayas tenu à Amizour les 26 et 27 mai dernier, sans autres formes de débats, a puisé dans ses textes pour renvoyer la balle non pas au seul Ouyahia mais à tout le pouvoir. Du coup, «l’évolution positive dans le discours» des gouvernants retenue comme telle dans la déclaration finale du conclave, et la reconnaissance des animateurs du mouvement comme interlocuteurs exclusifs dans tout processus de dialogue n’auront pas pesé lourds chez des délégués qui ont vite fait d’opposer le bouclier de l’intransigeance. La structure des archs, malgré le consensus dégagé, a l’air cependant de traverser un lourd moment de flottement dont les symptômes se sont multipliés ces derniers temps. La frêle cohésion des conclaves est ainsi vite supplantée par la cacophonie des meetings et autres sorties publiques et médiatiques des délégués. L’effet en est que les observateurs se retrouvent encore à se demander si le mouvement a opposé une fin de non-recevoir à Ouyahia, ou simplement réclamé des garanties quant à la sincérité du processus proposé. Autre élément de confusion, la coordination de Tizi Ouzou, présente en force au conclave d’Amizour, s’est réservée une intelligente porte de sortie en imposant à la plénière l’adoption d’une résolution stipulant que les délégués s’obligent à un retour à la base qui doit déterminer toute prise de décision qui engage l’avenir du mouvement. A quoi aura donc servi le conclave «historique» d’Amizour ? se sont demandés des animateurs d’autres coordinations. Est-ce ce flottement qui retarde le fameux engagement du président de la République ou, à tout le moins, une réplique du chef du gouvernement ? Très probable, estiment des observateurs avisés en soutenant que le pouvoir, qui a élaboré un plan de sortie de crise dont les contours ont été suggérés par les propos mielleux de M. Ouyahia, attend de voir le bateau archs prendre une option claire pour pouvoir régler sa boussole. D’autres points de vue accordent moins de «bonnes intentions» à l’offre du chef du gouvernement et laissent entendre que sa démarche se limite au coup médiatique destiné à l’opinion, avec pour objectif de coller la responsabilité de l’impasse aux seuls animateurs du mouvement. Dans l’intervalle, le mouvement des archs tente, non sans peine, de maintenir un rythme d’activité via des réunions aux ordres du jour récurrents et jamais épuisés. Ainsi en est-il du conclave de la CADC à Tizi Ouzou et de celui de la CICB prévu ce week-end à Taskeriout dans la wilaya de Béjaïa. Mais à y regarder de plus près, il s’avère que l’on continue à fonctionner à l’aune inévitable de la même offre, ce qui autorise à croire que les positions exprimées ne sont pas si tranchées sur la question, à moins qu’il s’agisse de signes avant-coureurs de décantations douloureuses au sein de la structure.

Par M. Slimani