Des slogans «peu accrocheurs et mal conçus»
La plupart des partis sombrent dans la monotonie
Des slogans «peu accrocheurs et mal conçus»
El Watan, 15 avril 2017
Le slogan est un art, il est porteur d’un discours et d’un message. Le slogan, selon le sociologue Mohamed Taïbi, est complexe et difficile à construire, mais il demeure un segment de la théorie de communication.
C’est en somme un genre de communication. Qu’en est-il en Algérie ? Et que reflètent les slogans retenus par les partis politiques en compétition pour les législatives du 4 mai prochain. Ces formations ont arboré des slogans qui diffèrent les uns des autres et portant notamment sur les questions relatives à la stabilité et au développement du pays, le changement, la justice sociale. A travers leurs slogans, les candidats en course à la députation veulent accrocher et séduire l’électeur. Mais ont-ils réussi ?
A ce sujet, M. Taïbi les a notés et leur a malheureusement attribué un zéro pointé ! L’on remarque, dit-il, sur les panneaux de campagne en analysant les slogans une indigence symétrique. Les mots utilisés sont très courants, très peu accrocheurs et relèvent d’une certaine banalité. M. Taïbi cite l’exemple d’un slogan où on intime presque l’ordre aux électeurs d’aller voter : «Ce slogan n’est pas accrocheur. Bien au contraire, il est mauvais et à bannir».
Notre interlocuteur ressent dans la plupart des slogans des partis politiques un populisme qui n’apporte pas la concision : «Parfois, nous sommes dans une logique de langue très classique alors que le slogan relève d’une autre symétrique qui est celle du langage de la subjectivité. Etant très mal conçus, la population n’accorde pas trop d’importance à ce types de slogans», croit savoir ce sociologue.
Très dur avec les partis et les concepteurs des slogans, M. Taïbi pense que nous vivons dans le rudimentaire et que nous sommes «dans une panne du sens politique». Citons quelques slogans : le FLN mène sa course électorale sous le slogan «Passé et présent riches, et un avenir optimiste» ; le MSP et le Front du changement (FC) ont choisi comme slogan «Ensemble pour une Algérie prospère et sûre», tandis que le RCD défend son programme avec le slogan «Pour un nouveau départ pour l’Algérie».
Le MPA se présente de son côté avec un programme porté sur le thème «Pour une démocratie paisible», alors que le Front national algérien (FNA) a pour slogan «Pour le changement et la défense de la justice sociale». Dans le même sillage, l’Union pour Nahda, El Adala et El Bina (UNAE) affiche le slogan «Préserver le pays et œuvrer pour l’intérêt public» ; pour le parti TAJ, la campagne est menée sous le slogan «Fidèles à l’Algérie», alors que le Parti des travailleurs (PT) innove en proposant un slogan en langues arabe et tamazight «Kafa El Ana» (ça suffit). Pour M. Taïbi, ce sont les mêmes slogans qui reviennent à chaque fois. «Nous avons tendance à la monotonie.
Pourtant, nous avons des compétences qui sont mises à l’écart. Nous sommes dans le recyclage politique», déplore M. Taïbi. De son côté, Belkacem Mostefaoui, enseignant à l’Ecole nationale de journalisme, rappelle que la conception du slogan politique de campagne est la première épreuve d’expression publique pour un parti politique qui ambitionne d’afficher une légitimité à entrer dans la compétition et en système d’élection régi par la gouvernance d’Etat de droit, les compétiteurs adossent ces slogans à des programmes.
Or, en Algérie, note Mostefaoui, nous avons des slogans orphelins de programmes (si ce n’est plutôt des sommaires pour 2 ou 3 partis). «Les concepteurs les plus créatifs de slogans s’inspirent du programme et des femmes et des hommes qui le portent, alors qu’en Algérie les faiseurs de slogans des partis politiques font dans le bricolage», assène cet universitaire.
Nabila Amir