Comme au bon vieux temps !

Comme au bon vieux temps !

par Mohamed Zaâf, Le Jeune Indépendant, 18 avril 2007

L’Administration et la télé algérienne nous ont replongés, hier, dans le mémorable unanimisme du passé, provoquant en nous une infinie nostalgie. Tous unis «comme un seul homme», l’UGTA, les APC, les entreprises, les partis et les associations civiles se sont pointés à la coupole du 5-Juillet pour répondre avec enthousiasme à ce qui leur semblait être le vœu du Président.

Il ne se peut plus que le peuple reste silencieux alors qu’on démolit le pays, disait-il dimanche lorsqu’il rendait visite aux victimes des attentats meurtriers du 11 avril. Une petite phrase qui, apparemment, déclencha les anciens réflexes et mit en branle les diverses sections amarrées au pouvoir.

Nous entendîmes alors fuser le classique «One, two, tree, viva l’Algérie» aux côtés d’autres slogans nouveaux qui, tous, faisaient la partie belle au président Bouteflika. La manifestation tournait pratiquement au plébiscite même si le terrorisme fut dénoncé comme il faut et avec abondance.

Les manifestations à l’air libre dans les autres wilayas ne différaient pas de beaucoup. Bouteflika y tenait la vedette là-bas aussi. Mais la phrase lachée par Bouteflika dans l’hôpital était-elle interprétée comme il se devait ? Etait-elle réellement un signe pour donner le départ à une mobilisation du peuple dans des marches où l’on dénoncerait haut et fort le terrorisme et proclamerait de nouveau le «soutien indéfectible» au pouvoir ? Possible.

Sauf que, si jamais il venait à se mobiliser réellement, le peuple algérien, tel qu’on le connaît, ne se contentera pas de défiler en ânonnant des slogans que les bonnes âmes lui auront soufflés ou en brandissant des banderoles que des bien-pensants lui auront écrites.

La seule fois où le président Boumediene, que Dieu ait son âme, parlait de mobiliser le peuple, c’était pour menacer de le lâcher contre les forces accusées de porter atteinte à ses intérêts. Peut-on s’interdire de penser que nous sommes dans un cas similaire aujourd’hui, alors que la déclaration présidentielle de dimanche dernier recevait un volet complémentaire à Constantine lorsque le Président faisait état de défaillances sécuritaires et économiques ? Des propos dits sans ménagement, dont on ne connaît pas les visées exactes mais qui, s’ils égratignent l’administration au passage, laissent imaginer que le pouvoir ne veut qu’une mobilisation populaire qui soit bien délimitée et tout à fait contrôlable.

Une mobilisation à la mesure des desseins immédiats, alors que le pays est sur le point de connaître une nouvelle configuration politique à partir du 17 mai prochain. D’où les nouvelles dégagées à la suite des attentats d’il y a une semaine.

Des nouvelles enveloppées de mystère, loin d’être rassurantes et qui se veulent aussi fausses qu’un faux barrage. Une situation où de fausses pistes et de faux kamikazes viennent le disputer aux «informations non confirmées» et aux bribes d’informations officielles.

Le peuple, enjeu de toutes les guerres subversives, peut-il offrir dans les conditions qui lui sont imposées autre chose qu’une fausse mobilisation ? M. Z. [email protected].