France: Les syndicats contre le ministère de l’Immigration
La CFDT et la CGT se joignent à la mobilisation
Les syndicats contre le ministère de l’Immigration
par De L’un De Nos Correspondants A Paris: S. Raouf, Le Quotidien d’Oran, 25 juin 2007
Certains avaient parié sur une agitation de circonstance, promise à un essoufflement irrémédiable après les élections.
La mobilisation contre le ministère de l’Immigration et de l’Identité nationale ne se dément pas.Au contraire, elle est montée d’un cran avec l’irruption dans le mouvement de contestation de pans entiers du monde intellectuel et de dirigeants du mouvement syndical.
Au moment où les Français se préparent à prendre la route des vacances, un groupe d’historiens, vite relayés par des personnalités de tous bords, a choisi de donner de la voix. Dans une pétition au ton d’interpellation, ses membres demandent «solennellement» à Nicolas Sarkozy de revenir sur l’intitulé controversé du département de Brice Hortefeux. Rendu public vendredi, l’appel a dépassé, en moins de quarante-huit heures, le millier de signatures, dont celles de deux cents universitaires, hommes de culture et faiseurs d’opinion. Au rang des noms apposés au bas du texte, les noms de François Chérèque, secrétaire général de la CFDT, et de Bernard Thébault, SG de la CGT. Autres signatures, celles de Sylvie Thénault et de Raphaëlle Branche, deux figures de «la nouvelle génération d’historiens de la guerre d’Algérie», selon l’expression du défunt Pierre Vidal-Naquet. Elles avaient signé leur entrée sur le terrain de l’histoire en signant respectivement des travaux inédits sur la justice et l’usage de la torture pendant le conflit.
Accompagnée à coup de «une» mobilisatrice par la presse de gauche mais passée sous silence dans les principaux titres de droite, la pétition presse le chef de l’Elysée de «revenir à des choix» sémantiques «plus conformes aux traditions démocratiques» de la France. Quitte à ressasser des propos lus et entendus depuis deux mois, les auteurs du texte forcent davantage sur les mots pour mieux actionner la sonnette d’alarme. Adosser «identité nationale» à «immigration» dans la dénomination officielle d’un ministère «n’a jamais eu de précédent dans l’histoire de la République».
En mettant sur pied, sitôt installé à l’Elysée, le ministère de l’Immigration et de l’Identité nationale, Nicolas Sarkozy est allé jusqu’au bout d’un de ses multiples engagements de campagne. Les signataires du texte soumis à pétition y voient un «acte fondateur» de son quinquennat. Un acte, s’émeuvent-ils, qui inscrit l’immigration comme «problème» pour la France et les Français dans leur «être même».
Les pétitionnaires se disent inquiets de ce «rapprochement car il ne peut que renforcer les préjugés négatifs à l’égard des immigrés». Estimant que l’identité nationale française «constitue, aujourd’hui, une synthèse du pluralisme et de la diversité des populations», elle ne saurait, ce faisant, «être fixée» dans le champ d’action d’un ministère.
A la différence de leurs premières prises de position où ils ont chargé, pour l’essentiel, l’appellation, les «huit» mettent l’accent, cette fois-ci, sur les prérogatives du département de Brice Hortefeux. En vertu d’un décret présidentiel daté du 31 mai 2007, le nouveau ministère s’est constitué en absorbant les prérogatives de quatre ministères. De l’Intérieur, il a hérité de la gestion du séjour des étrangers, de la tutelle de la police des frontières et du contrôle des étrangers. Le Quai d’Orsay lui a légué la délivrance des visas et le traitement de l’asile. Le ministère des Affaires sociales a «lâché» le dossier des naturalisations et du dispositif d’intégration (regroupement familial). La Défense aurait été dépouillée de la Direction de la mémoire, du patrimoine et des archives.
«Cette confusion des rôles et des fonctions est inadmissible et inquiétante», selon les «huit».