L’ambition iranienne en Algérie

À la faveur de la visite du président Ahmadinejad aujourd’hui à Alger

L’ambition iranienne en Algérie

« Nous avons des points communs avec le peuple algérien qui a fait beaucoup de sacrifices face au colonialisme français », a révélé le gouverneur général d’Ispahan.

Ispahan (Iran). De notre envoyé spécial, El Watan, 6 août 2007

Le gouverneur général d’Ispahan a un grand souhait : faire jumeler sa ville, une grande cité de 1,2 million d’habitants, avec Alger. Mortadha Bakhtiyar a exprimé ce message, convaincu qu’il sera entendu à la faveur de l’actuelle visite du président Mahmoud Ahmadinejad en Algérie. Mortadha Bakhtiyar a reçu, samedi 4 août en soirée à la salle de protocole Ashraf, un lieu célèbre puisqu’il remonte à la dynastie safavide qui a gouverné la ville il y a plus de 400 ans, un groupe de journalistes algériens en visite en Iran. Il s’est fait accompagner par ses conseillers aux relations internationales et à l’investissement. La promotion de l’image d’Ispahan (située à un plus de 350 km au sud de Téhéran) est importante aux yeux de cet ex-recteur d`université. Massoud Nikaeen, conseiller aux relations internationales et au tourisme, rappelle que cette ancienne capitale de l`empire perse est déjà jumelée à onze villes à travers le monde comme Saint-Pétersbourg, Lahor, Kuala Lumpur, Florence et d’autres. « On souhaite qu’Alger soit la douzième », a-t-il lancé. Un consultant du ministère des Affaires étrangères lui glisse alors à l`oreille que son pays est prêt à envoyer une délégation à Alger pour discuter de cette question. « Nous avons des points communs avec le peuple algérien qui a fait beaucoup de sacrifices face au colonialisme français. Nous avons laissé beaucoup de victimes à cause de l’arrogance américaine et du régime tyrannique de Mohamed Reza Pahlavi », a relevé le gouverneur d’Ispahan, soulignant que la ville a enregistré 30 000 morts après la révolution islamique et la guerre contre l’Irak. Il s’est référé aux mémoires du président Ahmed Ben Bella pour évoquer les similitudes avec l’histoire algérienne et pour rappeler la demande du président Houari Boumediene de faire libérer Ali Chairati, penseur islamiste emprisonné puis tué par le régime de Mohamed Reza dans les années 1970. « Nous pouvons coopérer avec l’Algérie dans le domaine des sciences. Nous pouvons coordonner nos efforts dans la gestion des ressources naturelles qui sont similaires », a-t-il dit plus loin. Mortadha Bakhtiyar aime noter qu’Ispahan, que les Iraniens appellent « la moitié du monde », était une cité des sciences du temps des Safavides. Les livres de mathématiques, de médecine, de philosophie et d’astronomie ont été écrits à cette époque et sont enseignés aujourd’hui dans les universités. « Ibn Sina a vécu ici », a-t-il appuyé. L’ingénieur Akhawan, proche collaborateur du gouverneur d’Ispahan, a noté que l’Iran s’est doté de lois de promotion d’investissements en 2002. Il a fait appel pour que les hommes d’affaires algériens viennent tenter leur chance à Ispahan. Et il n’a pas manqué de noter que cette même loi autorise le remboursement des fonds investis à 100% en cas de perte et que tout l’argent engagé dans les projets est protégé par l’Etat. L’investissement direct étranger a dépassé les 21 milliards de dollars au cours des dernières années. La province d’Ispahan a attiré plus de 117 millions de dollars en 2006 d’investissements directs. Les opérateurs économiques sont venus, entre autres, des Emirats arabes unis, du Liban et de Suisse. A signaler également qu’Ispahan est célèbre pour l’industrie de l’acier, le textile (première au niveau national), l’agriculture et le tourisme. Le président soudanais Omar Al Bachir, qui a visité la région, a demandé à son homologue iranien d’envoyer des agriculteurs d’Ispahan pour développer les cultures dans son pays. Ispahan est connue par la qualité de ses noix, amandes et pommes. En cinq ans, la province a exporté pour 1,2 milliard de dollars sur un volume national de 10 milliards de dollars. De grands projets sont engagés dans la ville, comme celui d’un métro, qui sera le deuxième dans le pays après celui de Téhéran, et qui sera livré dans cinq ans, ainsi que le lancement d’un TGV livrable en 2010. Un projet d’autoroute Est-Ouest passera également par la région Ispahan.

Faycal Metaoui