L’opposition mise au défi par Bouteflika

L’opposition mise au défi par Bouteflika

par Kharroubi Habib, Le Quotidien d’Oran, 27 novembre 2014

Sur l’éclipse inexpliquée qu’a connue le dossier de révision de la Constitution, depuis la clôture du cycle de consultations sur le sujet entre Ahmed Ouyahia et les acteurs politiques et sociaux ayant accepté d’y prendre part, il a été hâtivement dit que sa cause en était que le Pouvoir aurait été déstabilisé par la levée de boucliers suscitée au sein de l’opposition par son projet et la résonance dont a bénéficié la revendication par celle-ci d’une transition démocratique, excluant que les autorités en place procèdent unilatéralement à de quelconques changements dans la loi fondamentale actuelle. L’opposition s’est prématurément bercée de l’illusion qu’en se constituant en front face au pouvoir et en posant des exigences communes à ce dernier, elle est parvenue ainsi à instaurer avec lui un rapport de force l’obligeant à renoncer à un passage en force pour son projet de révision de la Constitution, voire même à en abandonner l’idée. Le silence observé par ce pouvoir, alors que la thèse de se renoncement forcé a été publiquement développée et présentée comme l’explication de la mise en veilleuse de son initiative, a incontestablement fait considérer à l’opposition que son offensive anti-révision de la Constitution l’a fait reculer. Il lui faut déchanter maintenant que Bouteflika a officiellement fait savoir que, non seulement il s’en tient à son agenda politique dont la révision de la Constitution est le rendez-vous fondamental, mais qu’il a l’intention d’accélérer le processus conduisant à cette opération. En faisant savoir cela, le chef de l’Etat a clairement signifié qu’il n’a nullement écouté ce que l’opposition pense de son projet et encore moins accordé une quelconque attention à ses demandes qui convergent sur la revendication de son départ du Pouvoir.

Tout à son euphorie d’apparaître comme ayant confisqué au Pouvoir l’initiative politique, l’opposition a incontestablement subi une douche froide au constat que son offensive n’a nullement déstabilisé le Pouvoir et qui plus est a décidé de passer à la vitesse supérieure sur le dossier de la révision constitutionnelle. Au vu de cela, l’opposition est désormais acculée à faire la démonstration quelle n’est pas un simple rassemblement de «moulins à paroles» ou un conglomérat d’états-majors d’appareils confiné dans une contestation du pouvoir «salonarde». Le moment est venu pour elle de prouver qu’elle est vraiment et réellement bien plus que cela. Il est clair que la partie du discours de Bouteflika consacrée à la révision de la Constitution a sonné comme un défi à cette opposition à faire autre chose que de l’incantation contre un projet de Constitution qu’elle dénonce comme voué à pérenniser le système et le régime. Elle nous semble encore loin d’être en situation d’entraver la marche vers une révision constitutionnelle à l’initiative du Pouvoir. Elle est certes et contre toute attente parvenue à se rassembler et à proposer des alternatives qui ne laissent pas insensibles l’opinion et la société algérienne. Mais sans parvenir encore à les convaincre d’y adhérer faute de ne pas savoir comment aller vers les citoyens pour transformer l’écoute qu’ils lui accordent en adhésion militante pour ses propositions. Il est évident que le Pouvoir n’entend pas lui accorder le temps d’opérer la symbiose avec les citoyens et la société. D’où l’accélération annoncée par Bouteflika du processus menant à la révision de la Constitution.