Paysage politique : une recomposition rampante

Cooptation, guerre de leadership, course

Paysage politique : une recomposition rampante

El Watan, 10 juin 2009

Les bruissements du sérail si audibles ces deniers jours préfigurent une probable recomposition politique. La cascade de mouvements des « redressement ».

Et les petites révolutions organiques que connaissent certains partis politiques s’apparentent aux premières secousses annonciatrices d’un séisme qui pourrait ébranler la carte politique. Les réactions épidermiques et faussement quiètes des deux partenaires clés de l’Alliance présidentielle Ouyahia-Belkhadem par rapport à ce fameux parti du frère du président, cristallisent un peu cette ambition d’incertitude. Commençant d’abord par cette rumeur bien distillée par le cercle intéressé. La création de ce parti est théoriquement inutile pour la simple raison que si le « système » – c’est-à-dire les décideurs – a retenu le frère du président pour être son prochain cheval, l’appareil FLN sera alors le mieux indiqué et sa machine plus outillée pour servir de rampe de lancement. Le régime risque tout au plus de devoir fomenter un coup d’Etat « scientifique » pour placer les hommes du futur président. Ceci dans le cas improbable que Belkhadem ne donnait pas son onction au frère de Bouteflika. A moins que les architectes de ses fuites organisées n’aient voulu à travers cette rumeur faire accepter par l’opinion la candidature et l’imposer ne serait-ce que par la presse.

L’énigme Ouyahia

Cette hypothèse paraît plausible en ce sens que Saïd Bouteflika, que certains journaux ont présenté comme un Barack Obama à l’algérienne et lui ont même prêté un QI supérieur à la moyenne, n’ a pas l’étoffe d’un chef d’Etat. Bien qu’il soit le frère du président, Saïd Bouteflika reste aux yeux de l’opinion cet ancien universitaire qui militait au sein du syndicat du CNES. Mais les voies du système étant tellement impénétrables, et ses calculs insondables qu’il ne faut jurer de rien. Ceci d’autant plus que cette annonce intervient curieusement au moment où le gouvernement s’apprête à faire voter un amendement de la loi cadre relative aux partis politiques. Le dernier Conseil des ministres a justifié cet amendement par le souci « d’éviter les dérives » dans l’exercice politique.

Il est évident que c’est un autre tour de vis que le pouvoir s’apprête à opérer dans la pratique politique. En plus du fait que le gouvernement bloque systématiquement l’agrément de nouveaux partis, d’obédience démocratique surtout, cette loi pourrait être un costume sur mesure pour ce virtuel nouveau parti. Et en la matière, il n’y a pas meilleure recette pour lancer un mouvement politique que de casser ceux existants quand bien même ces derniers ont fait preuve de fidélité au régime. Il n’est pas fortuit si Belkhadem fait face à des intrigues cycliques dans son parti et que Bouguerra Soltani assiste à la dévitalisation du MSP au profit du MPC de Menasra qui installe ses structures au nez et à la barbe des autorités. Ce sont même des signes qui ne trompent pas quant à une recomposition politique qui s’appuierait sur deux grands partis, l’un au pouvoir et l’autre dans la périphérie…

Le FLN pourrait bien jouer ce nouveau rôle d’être à califourchon sur le pouvoir et l’opposition à l’intérieur du pouvoir. L’autre élément qui accrédite cette hypothèse, ce sont ces projets de partis annoncés, comme celui de Benbitour et éventuellement celui des dissidents du RCD. La grande inconnue dans cette équation, c’est la position de Ahmed Ouyahia longtemps désigné comme le successeur presque « légitime » de Bouteflika. Il est en effet difficile de l’imaginer « ranger » encore ses ambitions au profit d’un Saïd Bouteflika parachuté par son frère. En tout cas, si la création de ce nouveau parti venait à être confirmée, elle signifierait une chose : le régime a décidé de changer les béquilles sur lesquelles il s’appuyait. A moins que ce ne soit juste un « tube » de l’été pour la consommation des médias.

Par Hassan Moali