Paris aurait demandé les noms des 2629 amnistiés dans le cadre de la réconciliation

2629 AMNISTIÉS DANS LE CADRE DE LA RÉCONCILIATION

Paris aurait demandé leurs noms

L’Expression, 03 janvier 2007

Les services de sécurité européens font état de leur crainte de voir ces amnistiés reprendre leurs activités.

Le quotidien espagnol à grand tirage El Pais a fait état récemment du nombre important d’islamistes détenus en terre ibérique. Le quotidien avance le nombre de 200 dont au moins 70 Algériens. Ces détentions, liées souvent à des activités douteuses ou en liaison avec le terrorisme, renseignent sur les soucis de Madrid de gérer un dossier devenu de plus en plus encombrant.
D’un autre côté, et selon des sources crédibles, Paris aurait demandé à Alger de lui donner les noms des 2629 amnistiés islamistes, libérés ou exemptés de poursuites judiciaires, dans le cadre de la réconciliation nationale, de crainte de voir ces islamistes transposer la guerre sur le sol français.
Cette crainte est surtout prise au sérieux après la récente collusion entre le Gspc et l’organisation Al Qaîda, et l’avertissement donné par celle-ci de frapper les Américains et les Français par le biais du Groupe salafiste algérien. Dans un enregistrement daté du 11 septembre 2006, le lieutenant de Ben Laden a demandé au Gspc, affaibli en Algérie, d’être «un os dans la gorge des croisés américains et français», de semer la peur «dans le coeur des traîtres et des fils apostats de France» et d’écraser «les piliers de l’alliance croisée». Avec l’exécution de Saddam Hussein, ressentie comme une grave atteinte aux sentiments de la communauté musulmane, un véritable climat «pré-terroriste» semble régner, et les suspicions, voire les animosités, entre Musulmans et l’Occident sont au plus fort. Le Groupe salafiste pour la prédication et le combat, dont le ralliement à Al Qaîda a été annoncé par Abdelmalek Droukdel, dit «Abou Mossaâb Abdelouadoud», le 11 septembre dernier, pourrait constituer, désormais, une menace sérieuse aussi bien pour les Etats-Unis que pour la France dans les prochains mois, après les avertissements brandis par le numéro deux d’Al Qaîda, Ayman al-Zawahiri, de frapper «les croisés américains, français et leurs alliés».
L’obédience prononcée par le chef du Gspc dans un de ses derniers communiqués disait: «Nous prêtons allégeance à cheikh Oussama Ben Laden (…). Nous poursuivrons notre djihad». «Tout en décidant de rallier Al Qaîda et de prêter allégeance à Ben Laden, nous conseillons à nos frères de tous les autres mouvements jihadistes, partout dans le monde, de ne pas manquer cette union bénie (…) L’Organisation d’Al Qaîda est la seule habilitée à regrouper tous les moudjahidine, à représenter la nation islamique et à parler en son nom», ajoute l’émir du groupe qui considère, fait paradoxal, non plus les Etats-Unis, mais la France comme son «ennemi n°1». Certains spécialistes ont même avancé l’hypothèse que l’idée d’inclure la France dans l’«axe du mal» provient de Droukdel et non pas de Zawahiri.
Il avait fallu beaucoup de pas, d’étapes et de preuves «par les faits et les armes» pour que pareille collusion soit définitive et prouvée, définissant sans équivoque les liens qui les lient aux plans idéologique, structurel et organisationnel. Dans un premier enregistrement, dont on a pu écouter quelques extraits, Oussama Ben Laden fait l’éloge du djihad lancé contre les Etats-Unis et les «forces du mal» et encense certains groupes djihadites dans le monde, dont le Gspc. Par la suite, Ayman Zawahri avait fait, lui aussi, les louanges des frères djihadistes d’Algérie.
Abou Mossaâb Zarkaoui, lui, citait, nommément, dans un enregistrement datant de peu avant sa mort, «le frère Abou Mossaâb Abdelouadoud» et renseignait sur les liens qui soudent toutes les organisations djihadistes actuelles et la stratégie qui les unit. Les incursions menées par ses troupes au Mali, puis en Mauritanie ensuite, renseignent sur la stratégie peu visible, parce que possédant des moyens limités, mais facilement «décodable» du Groupe salafiste pour la prédication et le combat.
Après avoir fait une sorte d’OPA sur tous les groupes armés à l’est et à l’ouest du pays, le Sud étant acquis depuis 1989, le Gspc cherche à se restructurer et à se donner les moyens de tenir le plus longtemps possible, dans une guerre de laquelle il ne veut pas sortir pour le moment.
Les attentats «médiatiques», disproportionnés par rapport à leurs effets réels, lui assurent une aura parmi ses pairs et dans l’évaluation d’Al Qaîda. «Le Groupe salafiste pour la prédication et le combat (Gspc) doit devenir l’os dans la gorge des croisés américains et français», avait prévenu le n°2 de l’organisation Al Qaîda, Aymane al-Zawahiri.
Cette formule belliqueuse lancée par le conseiller politique de Oussama Ben Laden constitue, aujourd’hui, la principale stratégie pour faire régner sur les esprits une sorte de tension permanente.

Fayçal OUKACI