Paraphrases et molles critiquesParaphrases et molles critiques

Paraphrases et molles critiques

Par Abdou B., La Tribune, Dimanche 27 février 2005

Il aura fallu que le président de la République s’exprime sur deux sujets sensibles et importants pour que la scène politique frissonne, artificiellement, durant une séquence qui sera courte, faute de propositions et d’autonomie. Le phénomène récurrent s’installe, se rode et devient systémique. Tout le monde ronronne, chacun tente une conférence de presse ou un communiqué, s’assoupit et hausse le ton de quelques octaves, dès que le chef de l’Etat sort de la réserve, pour s’aligner ou s’opposer. L’exercice objectivement stérile n’éclaire aucunement sur les enjeux et les Algériens ont compris que l’initiative appartient à M. Bouteflika qui agit là où la majorité et l’opposition ne font que réagir, pour paraphraser ou critiquer. La tentation est grande qui consisterait à ne pas prendre en considération les agitations ponctuelles et à attendre de connaître le cap que veut fixer le premier magistrat du pays. Le coup de froid qui a suivi les propos du Président quant à la réconciliation et à l’amnistie conforte cette thèse. Des partis, des associations étatiques, des personnalités se sont alignés pour animer une campagne incohérente, éclatée aux quatre coins du pays au moment même où M. Bouteflika assène qu’«il attendra que les plaies soient cicatrisées et les cœurs apaisés». Frappés du sceau de la sagesse, ces mots jurent avec l’activisme ambiant autour de la réconciliation et de l’amnistie dont personne ne connaît encore le contenu, les contours juridiques et les modalités d’un éventuel référendum. D’un côté, les partis de la coalition laissent croire que ces deux dossiers sont sur le point d’être bouclés alors que M. Bouteflika laisse entendre qu’il laisse le temps au temps. Il y a assurément des acteurs qui vont plus vite que la musique à moins que ce ne soit la mise en place d’un tempo. Dans les deux cas, il y a de fausses notes. La vraie partition est en lieu sûr et elle sera connue en temps voulu par l’initiateur de la réconciliation qui a déjà ses «marsiens» et ses ralliés de fraîche date.Un des chantiers présentés comme une pomme de discorde à l’intérieur des composantes du pouvoir, tous secteurs confondus, a été clôturé sans douleur, sans révolte de palais après avoir suscité des psychodrames journalistiques et ressuscité brièvement la chanson du «socialisme triomphant». La loi sur les hydrocarbures, emblématique par sa charge symbolique pour les réformes à venir, est passée sans coup férir. Avec la bénédiction de l’UGTA parfois présentée à tort comme une opposition conjoncturelle ou un soutien critique. Le temps pressant, M. Bouteflika a décidé d’en finir avec cette loi comme pour les amendements du code de la famille qui comporte désormais des avancées à prendre.Si le Président entend accélérer les choses, ce qui ne manquera pas de générer des tensions, le front social est comme un volcan qui gronde. Il manque encore aux réformes des logistiques décisives : les médiateurs, les espaces de la médiation et les instruments de la négociation permanente restent les meilleurs garants pour des réformes pacifiques, porteuses et susceptibles d’aboutir.

A. B.