Vote de cinq ordannances: Les députés n’ont pas dérogé à la règle

Vote de cinq ordannances

Les députés n’ont pas dérogé à la règle

El Watan, 22 septembre 2010

Hormis le RCD, El Islah et les dissidents du FNA, toutes les autres formations politiques, siégeant à l’hémicycle Zirout Youcef, ont approuvé haut la main les cinq ordonnances programmées hier, en séance plénière à l’APN.

Une séance consacrée exclusivement au vote de ces textes de lois. Il s’agit de l’ordonnance n°10-02 du 26 août 2010 amendant et complétant l’ordonnance relative à la Cour des comptes, celle amendant et complétant l’ordonnance relative à la répression de l’infraction à la législation et à la réglementation de change et des mouvements des capitaux de et vers l’étranger, l’ordonnance n°10-04 du 26 août 2010 amendant et complétant l’ordonnance relative à la monnaie et au crédit, et celle portant sur la loi de finances complémentaire. A l’exception également des députés RCD, le reste des membres de l’Assemblée ont approuvé à la majorité le projet de loi complétant la loi relative à la prévention et à la lutte contre la corruption. Un texte de loi qui prévoit la création d’un office central de répression de la corruption.

A l’issu de ce vote «positif » et dont s’est «félicité» M. Ziari, président de l’APN, le groupe parlementaire du RCD et El Islah ont réagi.
Le RCD regrette que la session d’automne s’ouvre avec une fuite en avant des pouvoirs publics. Le recours aux ordonnances pour expédier les questions qui engagent le destin d’un pays et de la génération entière est qualifié par le RCD d’un manque de respect à l’égard de la chambre basse. «En ignorant le rôle de l’Assemblée et en l’agressant avec cinq ordonnances, dès l’entame de cette session d’automne, le pouvoir réaffirme sa véritable nature. La majorité, par son vote en faveur de ces ordonnances, confirmera la soumission et le rôle alibi de l’institution parlementaire», note M. Mazouz, président du groupe parlementaire de ce parti.

S’attardant sur le contenu des ordonnances, les députés du RCD sont convaincus que la loi de finances complémentaire 2010, comme les précédentes, ne servira que les desseins d’un régime sans projet ni stratégie de sortie de crise. L’intérêt du citoyen, note le RCD, est le grand absent des dispositions de ce projet de loi, mais il explique plus loin que le recours systématiquement aux ordonnances pour son adoption est la preuve de l’existence d’une opacité et d’un manque de transparence dans les affectations budgétaires. Quant au chapitre portant sur la corruption, le RCD ne comprend pas, encore une fois, le refus persistant du gouvernement quant à l’ouverture d’un débat général sur la corruption.

«Pourquoi ce pouvoir corrompu réfute l’idée d’un débat sur cette question, alors que le pays fait face à une corruption galopante et une délinquance économique sans égal», s’est interrogé Mazouz. S’agissant de la répression de l’infraction à la législation et à la réglementation des changes et de mouvements de capitaux de et vers l’étranger, notre pays, souligne le RCD, est l’un des rares à devenir une passoire dans les transferts illégaux de fonds. «Comble des déprédations, les responsables du secteur sont incapables de donner une estimation des transferts illicites des capitaux qui grèvent dangereusement le potentiel économique national», fait remarquer notre interlocuteur.

Dans son lot de critiques, le RCD pense que l’ordonnance portant institution d’un office de répression de la corruption et l’établissement d’une déclaration de probité, dans la passation des marchés publics, vient nous rappeler que le pays continue «d’être pillé, sans que la justice ne daigne réagir. Par ailleurs, Ali Brahimi et Tarik Mira, dissident du RCD, ont regretté qu’encore une fois le rituel de l’ordonnance soit convoqué pour déposséder la représentation du peuple de l’un de ses rares canaux d’expression, à savoir la tribune du Parlement. Ces deux députés regrettent les promesses non tenus par le gouvernement et rappellent que la lutte anticorruption mérite au minimum un débat parlementaire et public.»

Comme chaque année, la loi de finances ne déroge pas à la règle. Significative de l’incapacité du gouvernement à planifier sa politique financière au-delà de six mois, la LFC outrepasse sa vocation corrective pour priver le Parlement de l’une de ses prérogatives fondamentales, à savoir l’allocation et le contrôle des deniers publics. Concernant la corruption, les deux députés estiment qu’étant acculé dans ses retranchements par la propagande de l’ampleur de la corruption, saisi également de malaise dans ses propres rangs, le pouvoir s’en remet à des ordonnances pour légiférer aussi sur ce fléau. «Pourquoi les pouvoirs publics ont réagi aussi tardivement, alors que les affaires de corruption n’ont cessé de s’accumuler sur la place publique.» Les parlementaires ont voté à la majorité les textes de loi.

Nabila Amir