Ce qu’a dit Ahmed Ouyahia au patronat

Réunion préparatoire de la Tripartite

Ce qu’a dit Ahmed Ouyahia au patronat

El Watan, 29 août 2017

Responsabilité et exemplarité patronales, consensus national et discours de vérité sur la situation financière et économique du pays.

Le Premier ministre, Ahmed Ouyahia, qui s’est réuni jeudi dernier à Alger avec les organisations patronales en vue de préparer la prochaine réunion tripartite — finalement reportée à une date ultérieure —, a livré de nombreux messages au patronat algérien.

Présent à ladite réunion, le président de la Confédération nationale du patronat algérien (CNPA), Mohamed-Saïd Naït Abdelaziz, résume : «C’était une prise de contact.

Dans son message, le Premier ministre a parlé de la responsabilisation des patrons d’entreprise afin de reprendre en main la relance de l’économie nationale. Il a aussi mis l’accent sur la nécessité pour les patrons de donner l’exemple (…). Ahmed Ouyahia cherchait aussi un accompagnement et un consensus avec les partenaires sociaux.»

Sur la situation économique et financière de l’Algérie, le Premier ministre a tenu un discours dépourvu de langue de bois devant les représentants des organisations patronales, juge, pour sa part, le président de la Confédération algérienne du patronat (CAP), Boualem M’rakech.

«Ce qu’il faut retenir de cette réunion, c’est que le Premier ministre a tenu un discours assez nouveau, contrairement à ce prétendaient par le passé certains qui voulaient nous faire croire que tout allait bien», raconte le président de la CPA, également présent à la réunion de jeudi. Et d’ajouter : «Le Premier ministre a dit pour la première fois que la situation est des plus difficiles. Selon ses propos, on risque même des situations catastrophiques. Il a dit que si dans trois ans nous consommions 25 milliards de dollars, il ne restera rien (dans les caisses, ndlr). C’est une vérité connue de tous.»

Depuis l’été 2014 et la chute des prix du pétrole — qui représente 95% des sources de devises du pays —, l’Algérie a dû piocher dans les réserves de change, estimées à 108 milliards de dollars à fin juin 2017, contre 143 à la fin 2015 et 177 milliards à la fin 2014.

L’Etat avait aussi adopté des mesures d’austérité budgétaire, douloureuses pour les Algériens dont le pouvoir d’achat ne cesse de se dégrader.

A titre d’exemple, la loi de finances de 2017 a prévu une batterie de mesures d’économies, notamment la hausse de plusieurs taxes, dont la TVA de deux points, la réduction du budget d’investissement, mais aussi de fonctionnement. Avant de réunir à nouveau les partenaires sociaux, Ahmed Ouyahia devra d’abord présenter prochainement son plan d’action devant le Parlement. Pour le président de la CNPA, le temps joue en défaveur du nouveau gouvernement. «Tout ce qui nous importe est de voir comment tenir un langage franc face aux Algériens sur la situation économique.

On doit se mobiliser pour trouver des solutions consensuelles. Nous avons les possibilités. Mais à mesure que le temps passe, les marges de manœuvre de notre pays s’amenuisent. Il faut prendre le taureau par les cornes et réfléchir avec une nouvelle approche économique et sociale parce qu’actuellement c’est le flou total», déplore Mohamed-Saïd Naït Abdelaziz.

Son organisation veut une «réelle» évaluation des résultats du pacte économique et social de croissance liant le gouvernement et le patronat. De son côté, Boualem M’rakech affirme fonder beaucoup d’espoir sur le plan d’action du nouveau gouvernement.

«Nous, on attend beaucoup de ce programme du gouvernement et nous attendons surtout la définition de l’action qu’il entend mener avec les opérateurs. Les objectifs de la nation doivent être clairs, visibles et précis», insiste-t-il en relevant que l’Algérie dispose de «possibilités à même de régler les problèmes» qui se posent au niveau économique et social.

«Nous disons qu’aujourd’hui il faut une démarché claire. C’est d’instaurer une économie capable de produire. Nous sommes contre l’économie de bazar», suggère le président de la CPA, tout en plaidant en faveur de la sauvegarde du pouvoir d’achat des Algériens.
Hocine Lamriben