Ouyahia efface les traces de Tebboune

Après la désignation d’un nouveau gouvernement

Ouyahia efface les traces de Tebboune

El Watan, 22 août 2017

Ahmed Ouyahia ne perd pas de temps. Moins d’une semaine après son installation à la tête du gouvernement, le Premier ministre a déjà entamé la mise en œuvre de ce qui s’apparente à une nouvelle feuille de route.

Réunions avec des ministres, instructions et rencontres avec les responsables des établissements publics sont déjà les signes d’une accélération de l’agenda que le pouvoir veut mettre en œuvre. A-t-il le temps et les moyens ?

Selon différentes sources, la première étape de la mission d’Ahmed Ouyahia, qui consiste notamment à «effacer» les traces du travail entamé par son prédécesseur, a commencé dimanche. Deux jours après la nomination des ministres de son gouvernement, le Premier ministre a réuni les principaux ministres concernés par les questions économiques.

Contrairement aux pratiques instaurées par son prédécesseur, Ahmed Ouyahia n’est pas le genre de responsable à rendre publiques ses activités. Il est donc difficile d’avoir le détail de cette rencontre. Mais des fuites distillées dans la presse évoquent la préparation du document qui devra servir à Ahmed Ouyahia de «plan d’action» de son gouvernement. Et à première vue, il n’y aura pas de révolution à l’horizon. Puisque dans son «programme», inspiré de celui du chef de l’Etat — qui a produit la crise que vit le pays — Ahmed Ouyahia s’appuie sur des slogans habituels : diversification de l’économie, facilitations des démarches administratives pour les citoyens et renforcement des secteurs à forte densité de main-d’œuvre, notamment l’éducation, la santé et l’enseignement supérieur.

Le secteur de l’habitat semble également constituer une «priorité» pour le gouvernement Ouyahia. L’Exécutif peut espérer continuer, au moins, la réalisation des projets en cours. Ce qui est déjà un sacré défi pour un gouvernement qui manque de ressources financières nécessaires. Mais le pari est loin d’être gagné, puisque deux jours avant cette réunion, une cérémonie de remise des clefs à des bénéficiaires de certaines formules de logements a été annulée. Le nombre d’unités déjà réalisées est en effet en deçà des promesses des autorités. Autant donc retarder la livraison de certains sites en attendant d’avoir un nombre suffisant de logements à attribuer.

Avant de rencontrer ses «partenaires sociaux» ce jeudi à Alger, le Premier ministre s’est réuni, hier, avec les responsables des banques publiques. Il a été question du financement de l’économie et de la politique monétaire à mener. Ce dernier point est très important dans la situation actuelle de l’économie nationale, puisque le gouvernement a besoin de liquidités pour financer ses propres projets. Va-t-il avoir recours à la planche à billets ? Va-t-il rapatrier une partie des devises du pays stockées ? Les intentions du gouvernement ne sont pas claires à ce sujet. Mais une chose est acquise : le chef de l’Etat «interdit» tout recours à l’endettement qui «compromettrait la souveraineté» nationale.

La rencontre entre Ahmed Ouyahia et les banquiers a une autre signification. C’est le signe que les changements projetés par Abdelmadjid Tebboune dans ce domaine n’auront visiblement pas lieu. Le statu quo qui a prévalu avant la nomination de Abdelmadjid Tebboune va donc redevenir la règle après les remous suscités par la brouille estivale qui a opposé l’ancien Premier ministre et certains patrons. Ces derniers ne reçoivent d’ailleurs plus les mises en garde concernant les retards de réalisation de certains projets.
L’autre signe de «rupture» avec la méthode Tebboune est sans doute la limitation du recours aux licences d’importation. Un sujet qui a notamment précipité le départ de l’ancien Premier ministre.

Ali Boukhlef