Trois ministres s’en vont : Ouyahia à la tête du gouvernement

Trois ministres s’en vont : Ouyahia à la tête du gouvernement

par M. Saâdoune, Le Quotidien d’Oran, 24 juin 2008

Ahmed Ouyahia reprend ses quartiers au palais du gouvernement à la place d’Abdelaziz Belkhadem, nommé ministre d’Etat, représentant personnel du chef de l’Etat.

Son come-back était déjà annoncé par les différentes missions à l’étranger que lui a confiées récemment le président de la République. Ce retour sous les feux de l’actualité après une éclipse relative le confirme dans le statut particulier de recours presque obligé du système. Dans une scène politique lacunaire en information mais bruissant de rumeurs, on lui prêtait la destinée d’être un futur vice-président dans le cadre d’une fonction qui serait créée dans la foulée de la révision constitutionnelle. Sa désignation à la tête du gouvernement, sans être une surprise, puisqu’il a toujours été placé dans la posture du recours possible, affaiblit cette hypothèse de la vice-présidence. Au demeurant, Ahmed Ouyahia, lui-même, n’a pas semblé en faveur d’un chamboulement substantiel de la Constitution. Il a exprimé son soutien à un troisième mandat pour Bouteflika et soutenu qu’on devait se contenter de changer l’article 74 qui limite la durée des mandats du président. Le calendrier va donc sûrement le mettre en devoir de piloter cette révision constitutionnelle qui passera, selon toute probabilité, par la voie parlementaire et non par la voie référendaire. Mais l’aspect le plus important de ce changement tient sûrement à la reprise en main du gouvernail de la politique économique.

Il est patent que la désignation d’Abdelaziz Belkhadem a rompu avec une tradition qui faisait des chefs de gouvernement les coordonnateurs sinon les décideurs de la politique économique. Tous les chefs de gouvernement de ces deux décennies avaient ce profil «économique», M. Abdelaziz Belkhadem en est l’exception.

Ahmed Ouyahia, en tant que chef du RND, ne s’est pas privé de lancer des piques acérées à la gestion de la politique économique de son prédécesseur. En juillet dernier, il n’avait pas hésité à affirmer que les performances économiques réalisées par le pays depuis 1999 risquaient d’être perdues «sous les coups du populisme et des lobbies». En d’autres termes, il reprochait au gouvernement une absence de gouvernance. Plus récemment, il estimait que la décision du gouvernement de subventionner la semoule n’était pas judicieuse et constatait que «hormis les secteurs de l’éducation, de l’habitat et quelques autres, le reste des institutions travaillent au ralenti. De mon point de vue, les décisions prises dernièrement par le chef du gouvernement relèvent du replâtrage…».

Trois départs

C’est donc sur le terrain de l’économie qu’Ouyahia devrait marquer sa différence pour sa troisième affectation à la tête du gouvernement et essayer de remédier à des situations de blocage ou de retards nés de l’absence d’une prise de décision. On peut relever également, que dans sa dernière déclaration, Ahmed Ouyahia s’en est pris à ceux qui, selon lui, en rajoutaient en termes de soutien aux Palestiniens pour exiger que le président de la République ne participe pas au sommet de Paris prévu le 13 juillet prochain à Paris. Même s’il est admis que la décision de participation est du ressort du chef de l’Etat, Ahmed Ouyahia avait estimé que l’Algérie pouvait participer. C’est sans doute une conviction, mais cette sortie servait aussi à rouvrir les portes d’une participation que les déclarations des uns et des autres avaient tendance à fermer. Dans la foulée de ce changement, on enregistre trois départs.

Mohamed Maghlaoui quitte le ministère des Transports pour être remplacé par Amar Tou qui est remplacé par Saïd Barkat. Le second départ est celui de Boudjemaa Haïchour qui est remplacé au ministère de la Poste et des Technologies de l’information et de la communication, par Hamid Bessallah. On enregistre également le départ de Mlle Fatiha Mentouri, ministre déléguée auprès du ministre des Finances chargée de la Réforme financière. Faut-il y voir un effet des lacunes en matière d’information qui ont précédé l’annonce de report de la privatisation du CPA ?

Ce changement a vu également la promotion de Rachid Benaïssa à la tête du ministère de l’Agriculture et du Développement rural dont il était de facto la cheville ouvrière.