Les redditions, l’autre saignée

GROUPES TERRORISTES AU SUD DU PAYS

Les redditions, l’autre saignée

Le Soir d’Algérie, 18 avril 2018

Depuis le second semestre de l’année dernière particulièrement, les mois, voire les semaines se suivent et se ressemblent sur le plan de la lutte antiterroriste dans le Grand Sud du pays où la chronique sécuritaire n’en finit pas, depuis, de faire l’objet de communiqués du ministère de la Défense nationale faisant état de la reddition, et d’arrestations en de nombreuses occasions, de terroristes.
Une chronique singulière, le long de l’année dernière, qui a vu une trentaine de terroristes se rendre aux autorités militaires notamment dans les wilayas de Tamanrasset et Adrar. Une quarantaine d’autres a, par contre, été arrêtée suite à des opérations des détachements de l’ANP stationnés sur l’immense bande frontalière du sud que partage l’Algérie avec des voisins où la situation sécuritaire est, depuis plusieurs années maintenant, pour le moins brinquebalante.
Une partie du pays qui a attiré l’attention depuis que l’état-major de l’ANP avait décidé de renforcer son dispositif de sécurisation de façon très singulière en y déployant pas loin d’une quinzaine de milliers d’hommes, il y a près de trois ans de cela, lorsque au Sud-Est et plein Sud, la crise libyenne et la tension au Sahel prenaient des contours qui incitaient la mise sur pied d’un extrêmement rigoureux plan de protection des frontières et des wilayas du Sud, notamment après les tentatives d’attaques contre des installations gazières et pétrolifères ou encore les tentatives d’intrusion de terroristes lourdement armés comme cela avait été le cas lorsque, au début du mois de mars d’il y a deux ans, des patrouilles de l’ANP avaient repéré deux véhicules suspects, des Toyota de type Station, au nord d’El-Borma en allant vers El-Oued plus à l’Est, pas loin de la frontière avec la Tunisie.
La chasse à l’homme engagée dans le désert avait été marquée par un long et très violent accrochage avec les occupants des deux véhicules tout-terrain dont les six membres de ce groupe avaient récupéré des kalachnikov, des fusils mitrailleurs FMPK, entre autres armes, et un important lot de munitions de différents calibres.
Le genre d’opérations de l’armée qui avait de quoi dissuader les groupes disséminés dans la région, comme a pu les en dissuader encore plus la riposte énergique de l’ANP, deux semaines après la chasse à l’homme d’El-Borma, et toujours dans le Grand Sahara, à environ 200 kilomètres d’In Salah, lorsque des tirs de roquette ont été dirigés sur le site gazier de Krechba, exploité par Sonatrach, les Britanniques de BP et les Norvégiens de Statoil.
Ou encore cette opération au cours du même tourmenté mois de mars 2016, lorsque les forces combinées de l’ANP avaient réussi à neutraliser trois terroristes, dont un vétéran des années GIA, A. Kamel dit Abderrahmane.
Une opération mémorable du fait qu’elle avait permis aux éléments de l’ANP de récupérer 6 systèmes de missiles anti-aériens Stinger, deux dizaines de kalachnikovs, des lance-roquettes RPG-7, des fusils mitrailleurs RPK, des fusils à lunettes, des pistolets automatiques, des grenades et une cargaison de munitions.
Depuis, c’est donc un renforcement impressionnant du plan sécuritaire, avec une quinzaine de milliers d’hommes mobilisés, qui a évidemment limité, certes pas totalement mais dans une grande mesure, les capacités de mouvement des groupuscules qui ont essaimé dans le Grand Sud, ne laissant souvent qu’une seule alternative aux terroristes, celle de se rendre tellement ils se retrouvent coupés de leurs bases arrière ou encore l’impossibilité de s’infiltrer dans les territoires des pays voisins, les frontières étant surveillées avec une attention jamais égalée. C’est ce contexte qui pourrait expliquer le mouvement de redditions des terroristes au sud du pays, marquant depuis le second semestre de l’année dernière. Si l’on doit se fier à la série de communiqués officiels du MDN, depuis le début de cette année, le ballet des redditions de cette année a été ouvert le 4 janvier lorsqu’un certain K. Hamza s’était rendu aux autorités militaires de Tamanrasset auxquelles il a indiqué le lieu d’une cache où était entreposé un arsenal constitué d’un fusil mitrailleur FMPK, d’un fusil mitrailleur lourd de 14,5 mm, trois kalachnikovs, un fusil G3, deux fusils semi-automatiques Simonov, des munitions de différents calibres, et un véhicule tout-terrain.
En janvier, selon le bilan établi par le Commandement de l’ANP, 15 terroristes ont été abattus, à Jijel, Khenchela, Médéa et Boumerdès, alors que cinq se sont rendus, tous à Tamanrasset, aux autorités militaires qui, en même temps, ont pu récupérer un armement toujours en impressionnante quantité. En février, cinq terroristes également ont rendu les armes à Tamanrasset alors, que durant ce mois, l’opération la plus impressionnante de l’armée a été menée dans la région d’Adrar où une cache d’armes de guerre a été découverte. Le mois de mars a été inauguré avec la reddition à Tamanrasset de M. Ismaïl, alias Abou Timaghil, qui avait rejoint les groupes terroristes de la région il y a de cela quatre ans.
Le mois dernier, en revanche, ce sont six terroristes qui ont mis fin à leur «carrière» de criminels, dont un à Aïn Amenas. Jusqu’à lundi soir, moment choisi par B. Mohamed, alias Abou Mahdi, pour se rendre aux militaires à Tamanrasset, deux autres terroristes s’étaient rendus le même jour, le 6 du mois courant, aux autorités de la 6e RM à Tamanrasset.
Et au regard du maintien de la vigilance à son maximum, en raison de la situation aux frontières sud du pays, il est fort à s’attendre que le mouvement de redditions n’est pas près de connaître un ralentissement, aussi bien de terroristes faisant l’objet d’avis de recherche depuis les années 1990 que de nouvelles recrues.
Az. Maktour