Révision du code de la famille

REVISION DU CODE DE LA FAMILLE

Les islamistes hostiles au calque du code tunisien

Le Quotidien d’Oran, 28 octobre 2003

Le projet de révision du code de la famille repris par le nouveau garde des Sceaux, pour lequel il vient d’installer une commission, a suscité des réactions partagées de la part des partis politiques. Les partis de la mouvance islamiste rejettent catégoriquement le projet de Tayeb Belaïz pour des raisons d’abord d’opportunité.

Dans le fond, les deux partis représentatifs de cette mouvance islamiste, le MSP et El Islah, ont tenu à réitérer leur attachement au code actuel. Ils reconnaissent cependant que «les lacunes contenues dans le texte doivent être comblées de manière à l’adapter complètement à la charia». D’ailleurs, les deux partis se disent surpris par la précipitation avec laquelle a été installée, dimanche soir, la commission. Ainsi, M. Benkhelaf d’El Islah a estimé que le code de la famille ne figure pas parmi les priorités. Cela d’autant qu’il était programmé, selon l’aveu de l’ancienne ministre chargée de la famille, Mme Cheriet, pour le mois de juin 2004. D’ailleurs, le dossier était déjà prêt mais bloqué, selon elle, par le président de la République. Il accuse le président Bouteflika «d’avoir temporisé pour l’utiliser dans sa pré-campagne électorale». Il l’assimile à l’installation du «mécanisme ad hoc» sur les disparus. Le responsable d’El Islah a estimé par ailleurs que les conditions politiques de l’amendement du code de la famille sont inexistantes. L’objectif recherché à travers l’ouverture de ces dossiers sensibles est considéré par M. Benkhelaf comme une manoeuvre pour toucher une large frange de la société et autant de nombre de voix. Il dénonce au passage l’attitude du président de la République qui traite le peuple comme «un chiffre électoral».

El Islah refuse enfin que les amendements touchent aux constantes nationales, les valeurs religieuses du peuple algérien et surtout le retrait de l’article sur la tutelle, comme c’est le cas en Tunisie. «La dégradation des moeurs en Tunisie est le résultat de la suppression de la tutelle sur la femme», disent les islamistes. «La présence obligatoire du tuteur de la femme lors de la conclusion du contrat de mariage a des incidences positives sur la vie de la société», a-t-il souligné tout en continuant à soupçonner le président de vouloir importer le modèle tunisien.

Au MSP, l’on affiche le même étonnement qu’à El Islah. Les responsables du parti de Bouguerra Soltani ne cachent pas leur surprise de voir remis sur le tapis un dossier jugé «secondaire» face aux urgences du pays. «S’il s’agit d’une commission comme il en existe déjà dans les autres ministères, cela rentre dans la logique de la culture des commissions, la démocratie des commissions qui est à l’origine des erreurs du pays», a affirmé M. Menasra, le porte-parole du MSP. Il a par ailleurs considéré la manière dont a été installée la commission comme «assez surprenante».

M. Menasra ajoute que des textes d’importance ont souvent été «adoptés de manière douteuse». Il citera d’ailleurs celui de la réforme de l’éducation, les ordonnances présidentielles et maintenant le code de la famille. La problématique, a-t-il dit, n’est pas dans la loi mais réside dans son application. Et un tel texte devrait tenir compte des préceptes de l’islam, la culture du peuple et nécessite un débat national. Par contre, dans le camp «nationalo-démocrate», le soutien de l’amendement ne fait aucun doute. C’est même une revendication. Le RND d’Ouyahia réclame la révision du code mais insiste néanmoins sur le respect des valeurs et des traditions algériennes. Le FLN ne donne pour le moment aucun avis. A peine s’il rappelle que M. Belaïz hérite d’un dossier déjà ficelé par l’ex-ministre déléguée chargée de la famille, Mme Cheriet. Pour le reste, le texte est laissé à l’appréciation des élus lors de sa présentation à l’Assemblée populaire nationale.

B. Djilali