Bentalha : Dossier clos ?

APRES LA CONDAMNATION DE BOULEMIA A LA PEINE CAPITALE

Bentalha : Dossier clos ?

Le Soir d’Algérie, 3 août 2004

Seconde condamnation à mort pour Fouad Boulemia, accusé d’avoir pris part au massacre de Bentalha et de Raïs. A l’issue d’un procès qui n’aura pas duré plus d’une journée, le juge l’a condamné à la peine capitale alors que le ministère public avait requis la perpétuité. Sur les neuf prévenus, quatre ont écopé de peines allant de six mois à dix années de réclusion criminelle, tandis que les autres ont été acquittés. Les débats qui auraient dû permettre d’en savoir plus sur le carnage qui avait fait au moins 240 morts, n’auront finalement pas tenu leurs promesses. Après l’audition des neufs accusés et de quelques témoins, plusieurs questions sont restées sans réponse.
Fouad Boulemia, sûr de lui et très éloquent semblait atteint d’amnésie. Affirmant ne se souvenir de rien, l’assassin de Hachani a nié avoir tué et violé, répondant que tout ce qui était écrit sur les procès verbaux établis chez le juge d’instruction n’était pas fidèle à ses déclarations dont il ne se souvenait même pas ! Une attitude qui a exaspéré le juge, surtout que Boulemia n’était pas le seul à donner ce genre de réponse. Accusé d’appartenance à groupe terroriste et d’activité de nature à semer la terreur, Chemlel a adopté la même attitude. Pourquoi a-t-il raconté au juge d’instruction qu’à l’époque où il activait au sein d’un groupe terroriste, il avait été en contact avec des filles enlevées pour être violées ? Pourquoi a-t-il affirmé être tombé dans un traquenard tendu par les forces de sécurité et avoir été blessé ? Où se trouvait-il à l’époque du massacre ? Pourquoi était-il en possession de faux papiers lors de son arrestation ? Toutes les réponses qu’il a données hier ne semblaient pas convaincre le juge. Trop de zones d’ombre, de fuites en avant. L’intervention du troisième accusé ne permettra pas de les éclaircir : pourquoi a-t-il remis une copie de sa carte d’identité et de sa carte militaire à Chemlel ? Était-il au courant de ses activités ? Il dit que non et qu’il pensait «sincèrement » que son ami allait lui trouver du travail. Au regard des déclarations, c’est tout le monde qui a été «berné» par Chemlel. Une autre de ses connaissances comparaissait pour avoir récupéré un carton censé contenir un four, qui, aux dires des services de sécurité contenait une arme. Pourquoi a-t-il accepté de rendre ce service à son ami ? Parce que jamais, il n’aurait cru qu’il pouvait être mêlé à des «histoires de terrorisme». Même réponse de Wahiba, la cousine de l’ami chez qui a été entreposé le four (l’arme ?) chez elle : elle n’avait aucune raison de douter de la bonne foi de son cousin. Cet imbroglio n’a pu être élucidé en l’absence de preuves : pas de photos du dit carton, pas de rapport détaillé de perquisition. Une brèche dans laquelle s’est allégrement engouffrée la défense qui a déploré l’absence de preuves et l’absence de partie civile. Les avocats ont tous demandé l’acquittement pour leurs clients dont seuls Boulemia et Chemlel avaient un lien direct avec le massacre qui avait, en septembre 1997, plongé toute la région de Bentalha et de Raïs dans une horreur indescriptible. Les sept autres étaient poursuivis qui pour apologie du terrorisme, qui pour avoir soutenu les terroristes en les hébergeant ou en leur donnant des sommes d’argent. Ces personnes répondent que ce n’est pas de plein gré mais sous la menace que cette aide a été octroyée. Tous les accusés avaient cependant un point en commun : des réponses floues, une perte de mémoire sélective et une tendance à nier tout ce qui était consigné dans les procès-verbaux, ce qui n’a pas permis de connaître ne serait-ce qu’une partie de la vérité.
N. I.