Le dossier Tounsi devant la Chambre d’accusation en l’absence des parties

Le dossier Tounsi devant la Chambre d’accusation en l’absence des parties

La défense s’en prend au juge d’instruction

El Watan, 12 juillet 2010

Après avoir menacé de conseiller à leur client, Chouaïb Oultache, d’observer le silence durant le procès, les avocats de ce dernier mettent en garde les autorités judiciaires sur ce qu’ils qualifient de « forfaiture inadmissible » du juge d’instruction en charge de ce dossier.

Selon les maîtres Belarif et Dilem, le magistrat est tenu par le code de procédure pénale « d’informer toutes les parties de la transmission, le jeudi 1er juillet, de l’ordonnance des pièces du dossier au parquet général. Ce dernier a envoyé, à son tour, les convocations le 4 juillet, soit la veille d’un jour férié, pour nous informer que l’affaire a été inscrite au rôle de la chambre d’accusation pour la journée du 7 juillet. Le courrier recommandé n’a été reçu que le 8 juillet.

Ce qui n’a pas empêché la chambre d’accusation d’examiner l’affaire et de la mettre en délibéré pour le 14 juillet. Le procureur général est tenu de notifier par lettre recommandée à chacune des parties de l’enrôlement de l’affaire devant la chambre d’accusation, afin qu’elles puissent avoir une idée sur les qualifications et les arguments du juge, ses arguments juridiques et techniques et de construire sur cette base leurs plaidoiries devant la chambre d’accusation », explique Me Belarif. Pour lui, il s’agit d’une « violation délibérée de la loi et à ce niveau elle est intolérable et inadmissible ». Il révèle que le but recherché est « d’empêcher la défense d’exercer son droit. C’est extrêmement grave pour la justice et les institutions de la République ».

Son confrère Me Dilem déclare, pour sa part, qu’« en omettant d’informer à temps les parties de la transmission du dossier au parquet général relève d’une volonté délibérée d’empêcher la défense de préparer son argumentation juridique et technique, de sorte à pousser la chambre d’accusation à répondre aux questions posées et pourquoi pas, demander un complément d’enquête ». Ceci, et de dire : « Nous avons l’impression que le juge, le procureur et le procureur général participent tous à cette forfaiture et ce déni de justice, en ne retenant que les conclusions de l’enquête de la police judiciaire, qui imputent la mort de Tounsi à Oultache alors que ce denier nie l’avoir tué de deux balles dans la tête.

Tous refusent que l’énigme des balles, deux, selon la police, et quatre, selon Oultache, soit élucidée. Interrogé sur un éventuel renvoi du dossier vers le tribunal criminel, Me Belarif affirme : « Tout le monde sait que ce tribunal ne jugera que sur la base du dossier qu’il recevra et les avocats ne peuvent faire que du bavardage devant la barre et cautionner ainsi le tout. » Tout en annonçant un pourvoi auprès de la Cour suprême, l’avocat exprime sa « crainte » de voir son action vouée à l’échec. « Nous avons déjà vu cette haute instance statuer sur la rétractation en matière pénale, alors que c’est interdit. Nos craintes sont fondées. Aujourd’hui, l’appareil judiciaire ne veut pas aller au-delà du dossier établi par la police et que le juge d’instruction n’a fait qu’entériner. Il n’y a eu ni contre-expertise, ni confrontation, ni approfondissement des questions sérieuses, qui se posent à travers les déclarations des différentes personnes interrogées. La chambre d’accusation et peut-être même la Cour suprême ne sortiront pas de ce cadre », déclare Me Belarif.

Devant ces conditions, relève-t-il, « Oultache n’est pas disposé à participer à un simulacre de procès. Il refusera de parler quelles que soient les conséquences ». Il affirme qu’en tant que défense, « un recours aux instances internationales compétentes est envisagé, et ce, en dehors de toute considération de souveraineté nationale estimant que le respect de son pays est également un acte de nationalisme ». « Nous ne préjugeons pas, mais nous n’excluons pas l’internationalisation du dossier par des confrères étrangers. »

Par Salima Tlemçani

Les avocats de la partie civile dénoncent

Les avocats de la famille du défunt Ali Tounsi ont dénoncé la violation des articles 182 et 183 du code de procédure pénale, relatifs à la convocation des parties à l’audience de l’examen par la chambre d’accusation du dossier de l’assassinat de l’ancien DGSN. Me Khaled Bourayou affirme n’avoir reçu la convocation que le 11 juillet pour une audience prévue le 7 juillet dernier et mise en délibérée pour le 14 du même mois. Ce qui a privé la partie civile d’être présente à l’audience. « Comment se fait-il que le juge renvoie l’ordonnance de transmission des pièces du dossier au parquet général, alors qu’un appel à ses décisions a été introduit auprès de la Cour suprême ? Il y a là une violation manifeste de la procédure », s’est interrogé Me Bourayou.

Par Salima Tlemçani