Les meurtres sans meurtriers

Les meurtres sans meurtriers

El Watan, 15 décembre 2008

Dans l’affaire Hasseni-Mecili, brouillée par de fausses pistes et noyée par des indignations nationalistes, il y a un problème de fond, sous la forme d’une question bien simple : l’Algérie officielle défend-elle l’assassinat d’un opposant algérien ? Comme à l’école, il n’y a que deux réponses possibles : si c’est oui, c’est-à-dire que ce crime est une opération qu’il fallait monter, le régime assume – position idéologique à la mode – l’assassinat par les services officiels de l’Etat d’un Algérien opposant, avocat et militant, sur un territoire étranger.

Il n’y a donc rien à faire de son point de vue, si ce n’est protéger les commanditaires du meurtre. Si c’est non, et la responsabilité de cet assassinat planifié étant trop lourde à porter, le régime refuse donc d’assumer ce crime et devrait commencer par condamner l’assassinat officiel d’un citoyen algérien par les services de l’Etat, ce qu’il n’a pas encore fait. Dans la même idée, s’il réprouve ce crime, pourquoi alors ne mène-t-il pas l’enquête lui-même en écartant le parasitage de la justice française et puisqu’il avance encore la thèse de l’homonymie, pourquoi ne rend-il pas publique l’identité du vrai commanditaire ? Parmi les deux, il semble évident que c’est la première réponse qui est la bonne.

Le régime algérien assume ce crime et fera tout pour bloquer l’enquête en se réfugiant derrière l’erreur judiciaire et l’arrogance d’une puissance colonisatrice méprisante. La gestion de ce dossier par la partie française ne devrait pourtant pas nous concerner, c’est à Alger qu’il faut d’abord régler le problème ; on peut comprendre que des services protègent les leurs, mais l’Etat algérien doit condamner cet assassinat parce qu’il y va de l’éthique ; si un régime n’avoue pas ses crimes et continue à les faire passer pour une gestion normale de l’opposition, il peut en théorie continuer à tuer n’importe qui.

Par Chawki Amari