Problématique du retour des Algériens de l’étranger, investisseurs et cerveaux

Problématique du retour des Algériens de l’étranger, investisseurs et cerveaux

Le Soir d’Algérie, 31 janvier 2018

Avec, d’une part, 2,4 milliards de dollars de transferts de fonds vers leur pays en 2016, et 2 milliards une année plus tôt, selon des chiffres énoncés par des institutions internationales tels le Fonds international de développement agricole (FIIDA) ou la Banque mondiale et, d’autre part, un retour pas vraiment massif de ses «cerveaux», l’Algérie ne compte pas parmi les pays dont la diaspora participe franchement à son développement. Un constat qui appelle des explications, ce à quoi s’est attelé Raïf Mokretar Karroubi, expert financier international, lors de son passage à la rédaction de la Chaîne 3.
Déjà, selon l’invité de la Chaîne 3, hier, il serait bien d’établir un «mapping», une cartographie des pays où se sont installés les Algériens et quelles sont leurs compétences, et puis voir comment s’y prennent d’autres pays pour espérer capitaliser sur cette diaspora, pas seulement financièrement mais surtout sur sa matière grise. Ainsi, on évalue à 100 milliards de dollars le potentiel d’investissement en Algérie à travers ses émigrés, mais ce n’est pas tellement l’argent qui est intéressant chez les Algériens de l’étranger, estime R. M. Karroubi qui préfère plutôt mettre l’accent sur le savoir-faire acquis par cette diaspora et qu’on pourrait capitaliser. Que faudrait-il entreprendre alors pour attirer ces compatriotes émigrés ? L’expert financier attend un peu plus que «leur tendre la main», comme l’a fait le chef du gouvernement lors de son déplacement à Paris, à la fin de l’année dernière. «Mieux les connaître, où sont-ils installés et dans quels domaines ont-ils développé leurs compétences», c’est de là que nos chancelleries notamment devraient commencer avant de penser à les faire revenir, temporairement ou définitivement, conseille Raïf Mokretar Karroubi. Et à ce titre, il faudrait commencer par instaurer un climat de confiance «parce qu’en fait, il y a beaucoup d’effets d’annonce, beaucoup de séminaires et de congrès qui ont été organisés pour capter l’intérêt de la diaspora, mais dès lors que l’on essaye de passer aux choses sérieuses, on est rapidement confronté à certaines réalités liées à l’environnement algérien. C’est la difficulté d’accomplir l’acte d’investissement, la bureaucratie de certaines administrations… Tant qu’on ne franchira pas ce cap-là, cela restera toujours juste un effet d’annonce….» argumente l’invité de la rédaction de la Chaîne 3.
Malgré tout, il y a déjà un flux «encourageant» de ces Algériens établis à l’étranger, mais ce qu’il faudrait entreprendre «immédiatement» pour stimuler ce mouvement, il faudrait, donc, établir un climat de confiance, mettre en place des instruments comme sur le plan financier, par exemple, où c’est très difficile pour un Algérien ou un non Algérien d’investir dans le sens où il n’y a pas d’instrument de gestion de risque de change, il y a également le droit de préemption, il y a aussi la règle du 51/49 qui n’a pas eu le don de stimuler le flux d’investissements directs étrangers, de l’avis de l’expert financier international qu’est Raïf Mokretar Karroubi, désolé de constater que le cadre juridique ne soit pas favorable. «Et puis, changer souvent de réglementation n’est pas une bonne chose, même lorsqu’on change bien. L’instabilité juridique, la loi de finances complémentaire qui devient pratiquement une règle, tout cela nous coûte 2 % du produit intérieur brut (PIB). Pour un investisseur étranger, qui fait des paris sur l’avenir, c’est une donnée très importante», s’est plaint R. M. Karroubi. En guise de seconde étape, après la cartographie des pays où se sont installés les Algériens et quelles sont leurs compétences, il faudrait que l’on situe exactement nos besoins et faire, ainsi, comme ces 56 pays qui ont créé 400 institutions dont l’objectif unique est de catalyser la diaspora pour qu’elle revienne investir et transférer le savoir-faire dans son pays d’origine. C’est dire combien il reste à faire pour convaincre nos compatriotes, un potentiel qui pèse pas moins de 5 milliards de dollars en termes de capitaux, pour revenir investir ou ramener leur savoir-faire.
M. Azedine