CPA : Privatisation opaque, intermédiation et Omerta

CPA : Privatisation opaque, intermédiation et Omerta

Par Arab Amazigh, http://www.lemaghrebin.com/, 10 octobre 2007

Il se dit dans les milieux bancaires algérois que l’association Crédit Agricole (Calyon)-Deutsche Bank serait bien placée, voire favorite pour le rachat du Crédit Populaire d’Algérie. Ce groupe bancaire s’appuierait sur « Stratégica » un très intéressant cabinet de consultance basé à Alger animé par un certain Stéphane Boudjenah. Ce cabinet fondé par un algéro-canadien, spécialiste de l’éthique en économie (ca ne s’invente pas!) a joué le rôle de conseil pour le CPA et vient d’être racheté par la Deutsche Bank. Il est vrai qu’à Alger on ne connaît pas les notions de conflits d’intérêts et de délit d’initié. Mais au delà de l’assistance « technique » fournie par ce relais local, ce serait l’influence décisive d’Abdelatif Benachenou qui pourrait faire la différence en faveur du consortium franco-allemand. Les dirigeants de Calyon ne manquent pas de se féliciter du dynamisme et de l’entregent de l’ancien ministre des finances actuellement sans fonctions officielles.

Cette affaire, on s’en doute, est suivie de près par les autres banques françaises Société Générale et BNP-Paribas qui restent dans la course. L’interminable processus de privatisation a déjà vu le départ de la Banque espagnole Santander et de l’américaine Citibank. La sortie de cette dernière de la compétition serait due à la détérioration des relations américano-algériennes et un signal de mauvaise humeur à destination de Bouteflika qui n’est plus en odeur de sainteté à la chancellerie des USA. On notera aussi que le directeur de Citibank à Alger est très proche du chef du DRS.

La privatisation permettrait de masquer définitivement, en les effaçant au nom de la reconstruction de ses équilibres comptables, les créances irrécouvrables du CPA. La pratique de  »l’assainissement » qui consiste à injecter des capitaux du Trésor Public vers les banques publiques déstructurées a déjà permis de relooker les comptes du CPA. Il n’en demeure par moins qu’aucun artifice ne pourra camoufler le fait que des concours financiers déboursés par la banque n’ont pas été honorés par les heureux récipiendaires de la manne d’Etat. On sait que cette banque du temps des PDG Madjid Nassou et Hachemi Meghaoui avait en effet consenti des crédits colossaux à des protégés du système.

Ces crédits, n’ont pas été remboursés et ont lourdement obéré le portefeuille de cette banque. Une des affaires les plus connues est celle du concours obtenu par le général Betchine pour le financement intégral de son usine connue sous le nom de « Numidia Céramiques ». Ce général alors au faîte de sa puissance, en tant qu’adjoint du Président Zeroual, avait en effet pu faire financer à 100% « son » investissement au mépris de tous les usages bancaires qui plafonnent ce genre de financement à 80% maximum du montant de l’investissement, le différentiel devant être obligatoirement apporté par le promoteur. On estime que le montant total des crédits non performants ayant été accordé par le CPA à des privilégiés serait de l’ordre de 900 millions de dollars.

Le CPA est actuellement dirigé par Mohamed Djellab, un ex-chef d’agence à la promotion météorique et dont le grand mérite aura été d’assumer la liquidation, dans les conditions que l’on sait, de la Banque Khalifa. Le commissaire au compte de cette banque étant quant à lui une figure célèbre de cette affaire, il s’agit de Moncef Badsi, celui là même qui, en tant que liquidateur de la banque Khalifa, a reconnu devant un tribunal avoir fait détruire des documents comptables susceptibles d’incriminer gravement le sommet de la hiérarchie politico-policière du pays.

On le voit donc cette privatisation très peu transparente profitera à quelques acteurs passés ou actuels du régime, il est fort à parier qu’aucun journal « indépendant » ne consacrera la moindre ligne à ses dessous peu ragoûtants mais révélateurs du fonctionnement du système.

Il y a également fort à parier que Calyon et Deutsche Bank se garderont bien d’exposer les conditions de négociation du CPA et du rôle éminent joué par l’ex-ministre des finances Abdelatif Benachenou.