L’informel discrédite la démarche de l’Etat

Les commerçants dénoncent l’injustice fiscale

L’informel discrédite la démarche de l’Etat

El Watan, 14 janvier 2017

Les réformes initiées par les pouvoirs publics en vue d’améliorer la collecte de l’impôt et les recettes du Trésor créent de fortes tensions non seulement au sein de la sphère commerciale, mais aussi dans d’autres secteurs d’activité.

Commerçants et entrepreneurs dénoncent ainsi la forte pression fiscale qu’ils subissent depuis l’entrée en vigueur de la loi de finances 2017, alors qu’à leurs yeux l’Etat continue à être impuissant, voire permissif face à la prolifération du commerce et de l’économie informels.

Pénalités de retard pour les dettes fiscales, cafouillage sur les modalités de paiement de la TVA et concurrence déloyale de la sphère informelle sont autant de préoccupations soulevées par des chefs d’entreprise et des commerçants lors d’une journée d’information sur les mesures fiscales introduites par la loi de finances organisée par la Direction générale des impôts, jeudi dernier à l’hôtel militaire de Beni Messous (Alger).

«Les commerçants sont confrontés à deux grands problèmes. Il s’agit des pénalités de retard et de la non-représentativité au sein des commissions de recours», a fustigé un représentant de l’Union générale des commerçants et artisans algériens (UGCAA), en réclamant l’effacement des pénalités de retard pour les dettes fiscales.

Un autre intervenant a dénoncé, quant à lui, l’inaction de l’administration fiscale envers les acteurs du marché informel, exemptés de fiscalité alors que les commerçants «légaux» sont confrontés à une pression fiscale. «Il faut régulariser le marché informel de sorte qu’il participe à l’effort» de collecte de l’impôt, a-t-il plaidé.

D’aucuns n’ont pas manqué d’accuser l’administration fiscale d’être brutale dans le recouvrement des impôts. «Il faut encourager le contribuable si l’on veut gagner sa confiance», ont-ils insisté. Des opérateurs activant dans le secteur du BTPH ont quant à eux mis l’accent sur les difficultés liées aux changements de taux de la TVA. Selon eux, cela implique la signature d’avenants, ce qui provoque une hausse des prix et nécessite une approbation d’une commission de réévaluation des marchés publics.

«Nous réclamons le maintien du taux actuel de la TVA en attendant la renégociation des marchés», a exigé le représentant d’une organisation patronale. Sur ce dernier point, le directeur général des impôts, Abderrahmane Raouia, a fait savoir que les marchés publics entamés avant 2017 continueront à bénéficier des anciens taux de la TVA (7% pour le taux réduit et 17% pour le taux normal) au lieu des taux de la loi de finances 2017, et ce, jusqu’a l’achèvement de leur exécution. «C’est le Premier ministre qui a pris en charge cette question pour éviter les désagréments que pourrait provoquer le réajustement de la TVA», a-t-il ajouté. Une annonce saluée par les opérateurs pénalisés.

A propos de la revendication des commerçants d’être représentés au sein de ces commissions de recours, la directrice du contentieux à la DGI, Amel Abdellatif, a expliqué que la grande majorité de cette catégorie de contribuables n’est pas concernée par les procédures contentieuses puisqu’elle est soumise au régime de l’impôt forfaitaire unique. S’agissant de la demande de supprimer les pénalités de retard pour les dettes fiscales, la même responsable a estimé qu’une telle démarche n’était pas envisageable.

Concernant les pratiques de l’administration jugées brutales, le directeur général des impôts a promis de sévir contre d’éventuels dépassements de ses agents alors qu’un autre responsable de la DGI, Ghanemi Arezki, a insisté sur le fait que l’administration fiscale demeurait «humaine» et disposée aux règlements des contentieux dans le cadre de la loi.

Dans leurs exposés, les responsables de la DGI se sont efforcés de rassurer les uns et les autres, tout en mettant l’accent sur le fait que la LF-2017 introduit des allégements de certaines procédures ainsi que des incitations fiscales au profit de l’entreprise. Il s’agit, entre autres, du rééchelonnement des dettes fiscales des entreprises en difficulté sur une période n’excédant pas 36 mois, ainsi que des facilitations pour le remboursement de la TVA par le Trésor public au profit d’opérateurs économiques.
Hocine Lamriben