Energie: L’Algérie commencera cette année à raffiner son pétrole à l’étranger

Energie: L’Algérie commencera cette année à raffiner son pétrole à l’étranger

par Yazid Alilat, Le Quotidien d’Oran, 24 février 2018

L’Algérie va procéder, cette année, au raffinage d’une partie de son pétrole à l’étranger pour les besoins en carburants du pays, a indiqué jeudi devant le Parlement le ministre de l’Energie Mustapha Guitouni.

Il a expliqué devant les parlementaires que le groupe pétrolier algérien Sonatrach n’a procédé, depuis des années, à aucune opération de raffinage à l’étranger, car l’importation du produit fini était moins coûteuse que son traitement, le raffinage. En 2017, a-t-il rappelé, l’Algérie avait importé l’équivalent de 2,96 millions de tonnes de carburants avec une facture de 1,583 milliard de dollars, et 3,06 millions de tonnes de carburants pour une enveloppe de 1,348 milliard de dollars en 2016. M. Guitouni a précisé que l’objectif à travers le raffinage à l’étranger est d’importer uniquement les types de carburants qui manquent sur le marché local, en l’occurrence le diesel et l’essence.

Les autres types de carburants, comme le GPL, le nafta et le fuel, font l’objet d’opération d’échange ou de troc avec le propriétaire de la raffinerie, vu leur grande disponibilité en Algérie, en contrepartie d’essence et de gasoil, car les coûts de leur transport à l’intérieur du pays font que la transaction n’est plus rentable pour nous, a poursuivi le ministre.

C’est le 15 janvier dernier que le groupe Sonatrach avait signé un contrat de processing avec une raffinerie en Italie, qui permet au groupe algérien de transformer lui-même sur place en Italie une partie de son pétrole brut en carburants, avait indiqué son P-DG, Abdelmoumen Ould Kaddour. Le patron de Sonatrach avait rappelé que l’Algérie ne pourrait plus continuer à importer les carburants pour près de deux milliards de dollars/an. Ce contrat de processing consiste en la location des équipements du raffineur installé en Italie pour procéder aux opérations de traitement du brut algérien sur place, ce qui permettra à Sonatrach de produire ses propres carburants à un prix moins cher que sur les marchés. Ce contrat a été signé suite à un appel d’offres international lancé par la compagnie pétrolière algérienne.

Selon des experts, ce raffineur, dont le groupe Sonatrach n’a pas précisé l’identité, serait en fait le complexe d’Isab, en Sicile, et qui serait la propriété du Russe Loukoil. Ce complexe est doté d’une capacité de raffinage de 320.000 b/j de pétrole brut. Actuellement, les capacités de raffinage de Sonatarch sont de 11,5 millions de tonnes de carburants. Mais, cela n’est plus suffisant, la demande ayant explosé pour atteindre les 15 millions de tonnes/an de carburants ces dernières années, selon des chiffres de Sonatrach.

Le groupe pétrolier algérien a donc lancé, dès 2012, un vaste programme de développement de l’industrie du raffinage, dont la réhabilitation des vieilles raffineries d’Alger, Arzew et Skikda, avec un coût global de 4,5 milliards de dollars. Globalement, il s’agit d’un programme national à moyen terme scindé en deux axes: la réhabilitation des vieilles raffineries pour porter les capacités installées de 22 à 27 millions de tonnes par an, et la réalisation de nouvelles raffineries pour augmenter les capacités de production et de raffinage de carburants et produits dérivés pour répondre aux besoins nationaux, et l’exportation des excédents. Le ministre de l’Energie Mustapha Guitouni a ainsi précisé devant les parlementaires que «le secteur de l’énergie a tracé un programme ambitieux visant essentiellement à réhabiliter et à moderniser les raffineries en service et augmenter les capacités de production à près de 31 millions de tonnes d’ici à la fin de 2018 contre 27 millions de tonnes actuellement». Quant au programme de réalisation de nouvelles raffineries, il porte sur la construction d’une unité à Hassi Messaoud et une autre à Tiaret. La livraison de l’ensemble de ces projets devrait, avait indiqué fin 2017 le ministre de l’Energie, porter les capacités de production de carburants de 30 millions de tonnes/an actuellement à un peu plus de 40 MT/an. «Ce plan répond à la hausse de la demande de produits pétroliers au cours des dix dernières années, la demande de carburant ayant augmenté de 7% en moyenne annuelle au cours de cette période», avait-il souligné.

La consommation nationale de carburants et de gaz est de 15 millions de tonnes/an (MT) en moyenne, alors que la production nationale de ce type de carburants n’est que de 11,5 MT/an, soit un déficit de 3,5 MT/an, qui est importé avec une facture annuelle de deux milliards de dollars.

Pour autant, ce programme n’est pas nouveau, puisqu’il a été mis en place en 2012 par l’ex-ministre de l’Energie Youcef Yousfi, actuellement à l’Industrie, qui avait annoncé la mise en place d’un financement de 10 milliards de dollars pour la réalisation de cinq nouvelles raffineries en Algérie. «Les raffineries de l’Algérie sont vétustes. Nous avons donc décidé d’en construire cinq nouvelles. L’Algérie investira environ 10 milliards de dollars pour ce projet», avait alors indiqué M. Youcef Yousfi, ajoutant que »la capacité de raffinage de l’Algérie augmentera ainsi de 30 millions de tonnes par an après l’entrée en production de ces cinq nouvelles raffineries». Dès le début de mise en service des ces infrastructures de stockage et de raffinage de carburants, la réception des travaux de réhabilitation de la raffinerie de Baraki (Alger) étant programmée pour fin 2018, l’Algérie devrait cesser les importations de carburants dès 2020, selon les déclarations de responsables du secteur, dont le ministre de l’Energie, M. Guitouni, avec l’entrée en production des deux raffineries de Tiaret et Hassi Messaoud dès 2020. D’ici là, l’Algérie continuera d’importer une partie de ses carburants, y compris avec la location d’installations de raffinage à l’étranger.