Gestion des grandes entreprises publiques : l’opacité s’installe

Elles ne communiquent plus sur leurs résultats financiers

Gestion des grandes entreprises publiques : l’opacité s’installe

Riyad Hamadi, TSA, 13 novembre 2012

Après une période de relative transparence ces dernières années, l’opacité s’installe de nouveau dans la gestion des entreprises publiques. Après avoir été prolixes sur leurs activités durant le milieu des années 2000, les gestionnaires des groupes détenus par l’État sont, depuis deux ans, de plus en plus discrets sur les résultats de leurs sociétés.
Le retour en arrière a été entamé par Sonatrach, la plus grande entreprise du pays, juste après le limogeage de l’ex-PDG Mohamed Meziane, impliqué dans le scandale de corruption qui a ébranlé le groupe pétrolier début 2010. Ses successeurs respectifs, Nouredine Cherouati (mai 2010-février 2011) et Abdelhamid Zerguine (depuis février 2011) ont, petit à petit, réinstauré la chape de plomb sur les activités de Sonatrach.

Sur le site internet du groupe, le seul et unique rapport financier de la compagnie disponible est celui de 2010. Même les autres rapports, publiés sous l’ère Meziane, ont été retirés. Pour 2011, Sonatrach n’a pas publié ses résultats financiers. Paradoxalement, c’est sous l’ère de Chakib Khelil, un ministre dont le nom est régulièrement cité dans des affaires de corruption présumée, que Sonatrach a le plus communiqué sur sa gestion.

Le football, principal axe de communication de Sonatrach

Curieusement, depuis quelques mois, Sonatrach occupe le devant de la scène médiatique grâce… au football. Les dirigeants du groupe pétrolier semblent très occupés par le rachat du MCA et de trois autres clubs de Ligue 1. Il est vrai que le sujet permet de faire diversion sur les vrais problèmes du secteur et de l’entreprise.

Sonatrach, qui avait l’ambition de se hisser par les majors du secteur, est un géant aux pieds d’argile. Gérée dans l’opacité totale, la compagnie investit peu dans la recherche et le développement. Tous ses projets sont réalisés avec des partenaires étrangers, y compris des groupes issus de petits pays comme le sultanat d’Oman !

Les autres groupes suivent

En donnant le ton, le groupe Sonatrach a rapidement fait des émules. Les autres entreprises détenues par l’État ont suivi son exemple : elles ne publient plus leurs résultats financiers. Parmi elles figure Algérie Télécom. Jusqu’au début des années 2010, ses responsables organisaient régulièrement des conférences de presse pour annoncer les résultats annuels et les objectifs à atteindre. Les temps ont changé. Affaibli par la multiplication des scandales de corruption et les changements fréquents de PDG, l’opérateur historique de téléphonie Algérie Télécom se fait discret. Sa seule communication concerne le développement supposé de l’ADSL et des messages régulièrement adressés par le PDG aux salariés à différentes occasions : Ramadhan, Aïd, 1er novembre, etc.

Dans le BTP, Cosider, un groupe redressé à coups de milliards par l’État, s’est retiré lui aussi sur la pointe des pieds de la scène médiatique. Cette année, son PDG Lakhdar Rekhroukh, en poste depuis plusieurs années, n’a pas organisé la traditionnelle cérémonie pour annoncer « les bons » résultats de son groupe qui profite pleinement des investissements publics dans le BTP. La société n’a fourni aucune explication sur ce silence. L’année 2011 a-t-elle été mauvaise en termes de résultats ? Ou s’agit-il d’une nouvelle politique décidée sur injonction du gouvernement qui n’aime pas les critiques dans un contexte économique difficile marqué par le recul de la commande publique ?