Confusion autour du rachat de Djezzy

Désaccord entre actionnaires russes et norvégiens de Vimpelcom

Confusion autour du rachat de Djezzy

El Watan, 13 octobre 2010

L’affaire Djezzy est en passe de connaître une nouvelle tournure à la faveur de l’intervention publique du copropriétaire norvégien dans le groupe russe
Vimpelcom, qui a considéré qu’il faut encore attendre avant de
parler «d’accord conclu» avec Sawiris.

L’affaire Djezzy a réveillé les vieilles rancœurs entre les deux principaux actionnaires du groupe Vimpelcom. Le patron de l’opérateur norvégien Telenor, propriétaire à hauteur de 36% du groupe Vimpelcom, a exprimé des doutes sur le projet d’acquisition d’Orascom, soulignant qu’un accord n’est pas gagné d’avance.
A ses yeux, le principal obstacle reste la prise de contrôle de la filiale algérienne d’Orascom, Djezzy, que Vimpelcom souhaite conserver car il s’agit, selon lui, de l’actif le plus lucratif de l’opérateur égyptien.
Dans une interview au quotidien russe Vedomosti, reprise par l’agence Reuters, le directeur général de Telenor, Jon Fredrik Baksaas, a considéré l’accord conclu entre Vimpelcom et Naguib Sawiris comme «une somme de différentes conditions». «Un grand nombre de questions doit être résolu avant de pouvoir parler d’accord conclu», a-t-il souligné.
Prié de dire si l’opération irait à son terme même si Vimpelcom n’obtenait pas Djezzy, il a répondu : «Il n’y a pas encore de réponse.»
Les querelles entre les actionnaires de l’opérateur russe sont récurrentes dès qu’il s’agit de la stratégie de l’expansion du groupe à l’étranger.

Un conflit juridique, ayant pris ses racines dans l’achat de l’opérateur ukrainien Kievstar, a déchiré l’entreprise Vimpelcom pendant plus de six ans. L’actionnaire norvégien a fait, par ailleurs, l’objet de poursuites judiciaires de la part d’un actionnaire minoritaire Farimex (soupçonné d’œuvrer au profit du russe Alfa Group). Le dernier épisode de ce feuilleton qui a ébranlé le groupe a été la saisie, en février 2009, par les tribunaux russes, des droits de vote et des actions (d’une valeur de 11,8 milliards de couronnes) de Telenor dans Vimpelcom.
Après un bras de fer de plusieurs années, Telenor et Alfa ont convenu de regrouper leurs parts dans ces deux sociétés au sein d’une nouvelle filiale commune qui ciblera les pays émergents. «Nous avons transformé un conflit de cinq ans en un projet enthousiasmant pour l’avenir», a déclaré Jon Fredrik Baksaas dans un communiqué.
L’entente aura été de courte durée puisque l’opérateur norvégien commence déjà à émettre des critiques au sujet de l’acquisition d’Orascom. Pour l’heure, les marchés financiers, d’ordinaire sensibles au moindre frétillement, n’ont pas réagi négativement aux propos du patron norvégien.

Vimpelcom est détenu à hauteur de 45% par le 23e homme le plus riche au monde, selon le classement de Forbes, Mikhail Fridman.
L’oligarque est impliqué dans des scandales secouant la scène politique russe.
De son côté, Telenor est le 7e opérateur mobile mondial : avec 172 millions de clients, il devance largement Orange ! Telenor a payé 800 millions d’euros pour 60% du nouvel opérateur mobile indien Unitech Wireless.
L’affaire Djezzy prend ainsi une nouvelle tournure. Dalibor Vavruska, analyste à ING, spécialisée dans les télécoms sur les marchés émergents, estime que la décision de l’Etat algérien de recruter un cabinet international pour l’évaluation de la valeur d’OTA va bouleverser la donne. «Recruter des conseils potentiels rend un compromis (avec Vimpelcom) moins probable», a-t-elle expliqué à l’agence Reuters. «Si les Russes (n’obtiennent pas Djezzy), ils devront vraiment reconsidérer leur position concernant l’ensemble de l’accord.»
Des sources du secteur et au sein du gouvernement algérien, citées par la même agence, estiment qu’un prix compris entre deux et trois milliards de dollars serait équitable.
Le directeur général de Vimpelcom, Alexandre Izossimov, a déclaré de son côté que Djezzy valait sept fois son résultat avant charges financières, impôts, dépréciations et amortissements, ce qui valoriserait la société à hauteur d’environ sept milliards
de dollars.
Amel Blidi