La ministre de l’éducation: «Il y a beaucoup de pression sur ce secteur»

La ministre de l’éducation annonce de nouvelles mesures pour la rentrée

«Il y a beaucoup de pression sur ce secteur»

El Watan, 9 septembre 2014

Nouria Benghebrit annonce une batterie de mesures visant une refonte du système éducatif national qui, selon elle, fait beaucoup de mécontents.

Nouria Benghebrit fait sa rentrée et promet le changement. La ministre de l’Education nationale a annoncé hier, lors d’un point de presse animé à Alger, une batterie de mesures visant une refonte pédagogique qui sera en continuité avec la réforme initiée dans les années 2000 par ses prédécesseurs, mais contenant «des points de rupture qui concernent l’approche», précise-t-elle.

Suppression des secondes sessions de l’examen de la 5e année primaire, introduction d’une fiche de synthèse pour les élèves des terminales, la suppression catégorique du seuil des cours, la réduction du poids du cartable de 30%, entre autres mesures (lire l’ensemble des mesures ci-contre). «L’école algérienne fait beaucoup de mécontents», lâche-t-elle d’emblée. Un aveu, une reconnaissance sur laquelle elle prend appui pour développer sa vision de la refonte pédagogique qu’elle compte introduire cette année même.

«Le secteur de l’éducation regorge de problèmes», admet-elle. «Les disfonctionnements ont été répertoriés. Nous n’irons pas vers une gestion de l’urgence. Nous n’allons pas jouer aux apprentis sorciers bien que nous soyons très attentifs au changement radical demandé par la société». Sur un ton mesuré, elle tient à avertir que «l’urgence est la pire des politiques», comme pour se dédouaner de ne pas assouvir les nombreuses attentes dans les plus brefs délais. Elle le précise d’ailleurs : «Aux nombreux problèmes qui se posent, nous n’avons pas de solutions miracles mais des solutions provisoires que nous voulons appliquer avec beaucoup de prudence.»

La ministre a-t-elle les coudées franches ?

En répondant aux nombreuses questions des journalistes présents, elle survolera certains aspects de la refonte et en détaillera d’autres. L’essentiel pour elle, «dans un premier temps, est de redonner confiance en l’école». Les doutes sur la liberté d’action qu’elle peut avoir, dans un secteur aussi sensible que l’éducation, subsistent. A la question, Nouria Benghebrit répond : «Oui, j’ai les coudées franches puisque je m’inscris dans un cadre clair, celui de la lettre de mission du Président adressée à la commission chargée de la réforme en 2001, aux orientations et recommandations de ladite commission mais aussi aux recommandations du Conseil des ministres d’avril 2002, adoptés par l’APN. Il y a beaucoup de pression sur ce secteur, il n’y a pas de solutions miracles, ce que nous adoptons comme solutions sont des solutions provisoires qui répondent à des années de perturbations de la réforme par beaucoup de facteurs sociaux.»

Pour la ministre, il y a lieu de revenir à l’essentiel, «en donnant aux Algériens le droit de se demander quel profil intellectuel et de compétence l’école dessine pour leurs enfants». Qu’en est-il de la menace de grève brandie par les syndicats ? «Les revendications des syndicats sont prises en charge par le gouvernement. La question du statut est complexe. Il faut aller vers une délibération et non une imposition.

Les syndicats ne peuvent pas formuler des revendications et attendre de nous de les appliquer telles quelles. Il faut d’abord savoir que toutes les demandes formulées par les syndicats ne relèvent pas que de nos prérogatives. Je suis pour la négociation continue et organisée, cela prend du temps parce qu’il faut maintenir l’équilibre», répond-elle sur un ton intransigeant. Il n’est pas question, pour elle, «que l’école paye». En somme, la ministre semble d’entrée imposer son style, loin de toute langue de bois. Elle établit un diagnostic «juste» du mal qui ronge l’école algérienne. Aura-t-elle pour autant le bon remède ?

Surcharge des classes des lycéens à l’école primaire

Cette année, toutes les classes de terminale sont en surcharge. «Le problème de la surcharge des classes de terminales enregistré cette année est principalement dû à l’arrivée en terminale des deux générations touchées par la réforme», explique Nouria Benghebrit, ministre de l’Education nationale. Pour contrer le problème, la ministère «est contrainte momentanément» d’adopter le système des deux vacations «partielle et totale». «Il est nécessaire de procéder à un changement de système à travers le recours à la double vacation ‘‘partielle et totale’’, cette mesure n’est pas la solution efficiente mais nous sommes contraints momentanément d’y recourir», annonce-t-elle.

A l’origine, un manque d’infrastructures dû à des retards dans les réalisations prévues. Le ministère a donc été dans l’obligation de recourir aux écoles primaires pour l’accueil d’élèves de terminales lors de l’année en cours (2014-2015). «La non-remise, par les entreprises de réalisation, de certains établissements éducatifs prévus depuis 2008 est à l’origine de ce problème», a-t-elle précisé. Le taux de «réalisation des établissements d’enseignement moyen et secondaire a atteint 60 à 70%, tandis qu’un nombre insuffisant d’établissements primaires ont été réceptionnés». Les écoles privées ne doivent plus être diabolisées mais au contraire encouragées. Elles sont contrôlées par les inspections du ministère de l’Education, elles appliquent le programme national d’éducation. Elles sont soumises à la même obligation de résultat. (F. B.)

Les nouvelles mesures :

-Révision de la conception actuelle de l’évaluation du travail scolaire des élèves,— y compris les examens —, afin de réhabiliter leur effort par le contrôle continu.

-Introduction de la fiche de synthèse pour les élèves de terminales,— un coefficient sera adopté à la fin du mois —, pour ajouter une note à celle du bac et ainsi permettre aux élèves ayant fourni des efforts tout au long de l’année d’obtenir une meilleure moyenne et ainsi augmenter leurs chances d’accéder aux études qu’ils souhaitent.

-Suppression de la seconde session de l’examen de la 5e année primaire.

-Réduction du poids du cartable de 30%, pour les écoliers des 1re, 2e et 3e années secondaires.

-Redéploiement du calendrier des examens scolaires : le 3 juin pour l’examen de 5e année primaire, du 8 au 10 juin pour le BEM et du 14 au 18 juin pour le bac.

-Edition d’un guide de gouvernance spécifique au secteur.

-Institution du principe d’obligation de résultat auprès de tous les responsables du secteur, et ce, à partir d’indicateurs internationaux et pas uniquement des taux de réussite au bac.

-Instituer la médaille du mérite éducatif.

-Lancement des cours télévisés pour les candidats au baccalauréat.

-Repère : 8 618 155 élèves

-Education préparatoire
(5 ans) : 425 800

-Cycle primaire : 3 929 427

-Cycle moyen : 2 706 873

-Cycle secondaire : 1 556 055.

-668 739 nombre du personnel de l’éducation, tous statuts confondus. 25 496 établissements scolaires

-18 273 écoles primaires

– 5171 collèges

-2052 lycées

Bouredji Fella