Tempête sur l’école privée

Education

Tempête sur l’école privée

Par M. Saâdoune, Le Quotidien d’Oran, 26 février 2006

La force publique a été utilisée pour fermer des dizaines d’écoles privées sur l’ensemble du territoire national.

La fermeté gouvernementale, précédée l’année dernière par un ultimatum présidentiel, surprend surtout par son timing. Elle s’exerce, en effet, au milieu de l’année scolaire et met les élèves concernés et leurs parents dans une situation inextricable. Les pouvoirs publics pensent avoir pris en charge le problème en adressant une circulaire aux établissements scolaires publics pour prendre en charge les élèves qui se retrouvent sans école.

Ce n’est de toute évidence pas ce que pensent les parents d’élèves concernés qui considèrent qu’on aurait pu faire l’économie d’une perturbation néfaste, en prenant ces mesures avant le début de l’année scolaire ou en attendant la fin de l’année scolaire. Mais il s’agit également d’un refus de se voir imposer le retour à l’école publique qu’ils ont quittée. En filigrane de cette «bataille» autour de l’école privée, la question de la langue d’enseignement occupe une place importante.

Après des années de libéralisme et de laisser-faire qui a vu des dizaines d’écoles privées voir le jour en utilisant le français comme langue d’enseignement, les autorités ont commencé à réagir en 2005 en sommant ces écoles de se conformer au programme d’enseignement national. Si les écoles privées avaient quelques latitudes en matière de volume horaire dans l’enseignement des langues étrangères, elles étaient sommées, sous peine de fermeture, de faire de l’arabe la langue d’enseignement dans toutes les disciplines.

Cet alignement sur l’école publique faisait perdre aux écoles privées l’une des principales raisons de leur attrait, à savoir la conviction des parents d’élèves que l’enseignement en langue française donnait plus de chance à leurs enfants. Mais si cette question de la langue d’enseignement est importante, il ne faut pas négliger aussi le fait que certaines écoles fermées au cours des derniers jours l’ont été du fait qu’elles ne disposaient pas de locaux dignes de ce nom.

Il reste que c’est bien sur la question de la langue d’enseignement que ces écoles se sont distinguées vis-à-vis de l’école publique. Apparue au cours des années 90, ces écoles privées dispensaient un enseignement en langue française dans une «illégalité» tolérée, voire même encouragée par les pouvoirs publics. Il ne faut pas oublier que durant cette période, l’école publique, outre les critiques connues sur la mauvaise qualité de l’enseignement qui y est prodigué, était accusée d’être une «fabrique du terrorisme».

Accusation trop facile, relayée au sein même du pouvoir, qui était aussi un substrat idéologique qui a servi de justification à l’émergence de ces écoles privées. Les parents qui ont choisi de placer leurs enfants dans les écoles privées, parce qu’ils en ont les moyens, et les propriétaires des écoles privées semblaient compter sur le fait que l’émergence de ces écoles étaient une tendance qui avait ses soutiens au sein du pouvoir lui-même.

L’arrivée au pouvoir en 1999 de Abdelaziz Bouteflika et son attitude «décomplexée» à l’égard de la langue française les confortaient dans cette conviction. La mise en garde lancée par Bouteflika en avril 2005 sommant les écoles privées de se conformer au programme officiel sous peine de disparition les a surpris. «Il est tout à fait clair que toute institution privée qui ne tient pas compte du fait que l’arabe est la langue nationale et officielle, et qui ne lui accorde pas une priorité absolue, est appelée à disparaître», avait déclaré le président. Le propos du président allait clairement à contre-courant de la politique «d’illégalité autorisée» en cours depuis les années 90 et il heurte de front toutes les stratégies parentales en matière d’enseignement.

Les enfants qui ont passé plusieurs années dans les écoles privées se retrouvaient contraints à un retour à un programme d’enseignement commun. Apparemment, les parents escomptaient que l’on tienne compte du fait que cela fait des années qu’ils sont dans une illégalité autorisée ou tolérée et qu’on permettra à leurs enfants d’aller jusqu’au bout. En fermant les écoles au beau milieu de l’année scolaire, les autorités signifient qu’il n’en est plus question. Après l’illégalité autorisée et encouragée, c’est l’heure de la mise au pas.


Fermeture des écoles privées à Tizi-Ouzou

Le bras de fer est engagé

La tension monte d’un cran entre les parents de plus de 2.000 élèves scolarisés des neuf écoles privées que compte la wilaya de Tizi-Ouzou et les autorités locales représentées par le wali.

En effet, tout a débuté mercredi dernier dans l’après-midi, quand des policiers se sont rendus dans ces écoles pour signifier «un arrêté du wali» ordonnant la fermeture immédiate de ces établissements faute d’agrément. Ainsi, un collectif de gérants et gestionnaires de ces écoles, appuyé par les parents d’élèves, s’est constitué en cellule de crise pour «sauver l’avenir de leurs enfants».

Hier matin, à la première heure, le collectif a été reçu par le président de l’APW de Tizi-Ouzou, qui a rassuré les parents et chefs d’établissements de sa disponibilité à tout faire pour que les enfants reprennent le chemin de l’école. Une lettre revendiquant la même chose a été remise au cabinet du wali par les parents qui qualifient d’«arbitraire» la décision «qui trouvera sa genèse dans la tutelle nationale de l’Education».

Du côté des chefs d’établissements, on précise que le motif des agréments est «fallacieux» puisque depuis l’été dernier, leurs écoles ont tenté de se conformer à la nouvelle réglementation. En effet, une commission ad-hoc au niveau de la direction de l’éducation s’est chargée de trier, puis de transmettre les dossiers de demande d’agréments sanctionnées de récépissés. Le tout aurait été transmis au ministère de l’Education vers le 2 septembre 2005, sans qu’aucune réponse ne parvienne aux demandeurs à ce jour.

Enfin, il est à noter que le collectif des parents, enseignants et chefs d’établissements se dit «en cellule de crise ouverte». Il faut signaler aussi que ces écoles fermées garantissaient les cours des cycles primaire et secondaire.

Mohand Maokli


TEMPETE SUR L’ECOLE PRIVEE

La polémique relancée

Malgré leur courte existence et leur nombre limité, les écoles privées font déjà parler d’elles. La décision du gouvernement de fermer certains établissements privés a été un véritable pavé jeté dans la mare pour les parents d’élèves qui pensaient trouver chez le privé un refuge. Cette décision avait de quoi nourrir une polémique et ouvrir le débat sur ce phénomène nouveau, en vogue ces dernières années, qui est l’école privée.

Pourquoi une telle mesure au beau milieu de l’année scolaire ? Pourquoi avoir permis à ces établissements d’exercer si leurs dossiers n’étaient pas conformes ? Il est clair qu’un tel événement a provoqué une réelle tempête chez les parents d’élèves pour qui le choix d’un enseignement «libre» a été fait dans le seul souci d’assurer un bon encadrement à leurs enfants. Il faut dire aussi que la décision gouvernementale a coïncidé avec l’ébullition que connaît, actuellement, le secteur de l’éducation et la montée au créneau du mouvement syndical. En fait, c’est tout le système éducatif qui est, ainsi, remis en cause.

Panique chez les parents

Tombée tel un couperet, la nouvelle a mis parents et élèves dans l’émoi. La colère était à son summum, ce lundi, lorsque des pères et des mères, accompagnant leurs enfants à cette école privée, «Oroudj Rais», appartenant à la société EURL «Hadatha» située à Oran, ont appris que l’établissement a été interdit d’exercer. Difficile pour ces centaines de parents d’élèves de retenir leur colère face à une situation qui les dépasse. Les 250 élèves scolarisés étaient à la rue. Leurs cours ont été interrompus.

Peu d’explications ont été données sur les raisons de cette fermeture. Un sentiment de panique s’est alors emparé des parents. Que vont devenir ces enfants ? Pourront-ils intégrer d’autres établissements et s’adapter à leur système éducatif ? Chacun devait faire à nouveau un choix, avant qu’il ne soit trop tard. Aller vers une autre école privée ou revenir au public ? Un autre établissement privé qui enseigne le moyen et le secondaire, il n’y en a qu’un seul à Oran, en plus de celui qui vient de fermer. Opter pour l’école publique, certains parents ont du mal à trancher sur la question, vu que leur déception à l’égard de l’enseignement public est grande. Pour eux, il n’y a pas de doute, la qualité de l’enseignement est meilleure chez le privé.

Toutefois, l’affaire est actuellement entre les mains de la justice. Les parents d’élèves ont déposé plainte pour demander un sursis jusqu’au mois de juin pour appliquer la décision du gouvernement. Entre-temps, certaines écoles privées se sont frottées les mains et commencent à faire «monter les enchères». Il est vrai que le malheur des uns fait le bonheur des autres. Au lendemain de la fermeture, les tarifs ont grimpé en flèche. Une parente d’élève, ex-enseignante, qui a beaucoup hésité avant de décider si son fils doit aller dans un établissement public ou privé, raconte: «c’est incroyable ! pour inscrire nos enfants, une école privée a fait dans les deux poids, deux mesures. Les personnes qui se sont présentées à 7 heures du matin ont payé 10.000 DA. Celles qui se sont pointées à 9 heures ont dû payer 12.500 DA. C’est sans commentaire». La mère d’une autre élève n’a pas hésité à montrer son désarroi vis-à-vis de cette situation dont seuls les enfants sont «victimes». Elle déclare que «la veille de la fermeture de l’école, j’ai été contactée par une autre école privée, dont je ne dirai pas le nom, pour m’annoncer la décision de fermeture et me dire que, parce que je suis une amie, j’ai droit à une faveur. Une place a été réservée pour ma fille». Cependant, le plus étonnant dans cette affaire est aussi l’attitude des parents suite à cette décision gouvernementale. Lors de leur réunion tenue mardi dernier, ils étaient dans tous leurs états. Pour certains, la fermeture de l’école risque d’engendrer «humiliation et mépris à l’égard de leurs enfants». Le fait que cette école ait fermé ses portes et que les élèves soient contraints d’être transférés ailleurs, pourrait être mal perçu par la «société». D’ailleurs, un père de famille, très en colère, l’a clairement exprimé en lançant devant l’assistance, «si demain mon fils va rejoindre une école publique, les élèves vont sûrement se moquer de lui et dire, regardez, c’est lui qui vient de cette école privée qui a fermé». Revenir au public était ressenti, pour certains, comme un os dur à avaler.

Pour d’autres, le souci majeur résidait dans les difficultés de réintégration pour leurs enfants, que ce soit dans le public ou le privé. Mais pour le représentant des parents d’élèves, polémiquer autour de l’école privée et de l’école publique n’était guère le centre d’intérêt des personnes présentes. Il fera, de ce fait, un point d’ordre en déclarant: «il ne faut pas détourner le débat. Nous sommes regroupés ici pour trouver une solution pour nos enfants». Le mercredi, les parents sont en détresse. Il est temps d’inscrire leurs enfants dans d’autres écoles avant qu’il ne soit trop tard. La mère d’un élève nous confie: «j’ai temporisé jusqu’à aujourd’hui, avant de décider quel établissement choisir. Je ne suis pas très emballée pour une autre école privée, car je ne suis pas sûre de la qualité de l’enseignement. Je suis très réticente pour les établissements publics à cause des surcharges des classes. Mon fils s’est habitué à une classe de 20 élèves seulement. Se retrouver avec 38 et 48 camarades, c’est difficile pour lui».

Décision de fermeture pour un problème d’agrément

Même si les parents ont qualifié cette décision d’arbitraire, considérant qu’«il s’agit d’une école qui a son agrément et qui activait en toute légalité», le gouvernement a été catégorique: le propriétaire de l’école n’avait pas d’agrément, soit le visa pour ouvrir un établissement scolaire.

Le premier responsable de la direction de l’éducation d’Oran affirme que «cette décision est gouvernementale. Pour son exécution, elle a été transmise directement au service de sécurité. L’école activait sans agrément. Son propriétaire est étranger, de nationalité turque et, conformément à la réglementation, les étrangers ne sont pas régis par la même réglementation que les nationaux». Sans trop s’étaler sur cette réglementation spécifique appliquée aux étrangers, le même responsable précise que «cela fait trois ans que l’établissement en question a ouvert ses portes sans avoir d’agrément et activait dans la clandestinité. Ce n’est qu’au mois d’août dernier qu’il a eu son agrément qui a été annulé au mois de septembre. L’arrêté de fermeture a été notifié par la direction de l’éducation au mois d’octobre dernier et le propriétaire de l’école a été avisé de cette mesure». L’affaire est, donc, classée pour l’administration.

Pour le propriétaire, les documents en sa possession l’autorisaient, en toute légalité, d’ouvrir l’école. Un agrément livré le 17 juillet 2005, un P.-V. de contrôle de l’établissement daté du même jour, un registre de commerce livré le 12 décembre 2005 représentent des pièces justificatives de l’ouverture de cet établissement. Créés par décret ministériel n° 04/90 du 24 mars 2004, fixant les conditions de création, d’ouverture et de contrôle des écoles privées d’éducation et d’enseignement, ces établissements doivent obligatoirement dispenser les programmes officiels en vigueur établis par le ministère de l’Education nationale et appliquer les horaires officiels pour chaque activité pédagogique. Sur le plan de l’encadrement, il est exigé que le directeur de l’école soit de nationalité algérienne, être titulaire d’un diplôme d’enseignement supérieur et avoir 5 ans d’expérience dans les activités d’enseignement et de formation. Quant aux enseignants, ils doivent être titulaires d’un diplôme de graduation ou un grade de l’éducation nationale. Voilà de quoi rassurer les parents sur la qualité de l’enseignement. Concernant l’ouverture d’une école privée, il est stipulé dans ce décret que les agréments sont attribués après dépôt du dossier auprès du ministère de l’Education et son étude par la commission ad hoc de la tutelle.

L’attribution de l’agrément sera suivie par la délivrance d’un arrêté de création d’un établissement. L’école ne sera fonctionnelle qu’une fois l’arrêté d’ouverture attribué après un contrôle effectué au niveau de l’établissement par la commission de wilaya.

Cet événement a ouvert le débat sur l’école privée. Syndicats de l’éducation, partis politiques et enseignants donnent leur avis sur ce phénomène nouveau qui vient concurrencer l’école publique. Si certains pensent que l’école privée est un complément nécessaire à l’école publique, d’autres, par contre, s’affichent en farouches défenseurs de l’enseignement public. C’est le cas du représentant de l’UNPEF qui déclare: «en tant que citoyen, je reste un défenseur de l’école publique qui est accessible à tous les citoyens. La création de l’école privée ne doit être que dans le seul but d’apporter un enseignement complémentaire à celui de l’école publique». Commentant la décision du gouvernement, le même interlocuteur estime que «si la réglementation n’a pas été respectée, il faut appliquer la loi. Puisque cette décision a été prise en milieu de l’année scolaire, il serait sage de trouver une solution qui ne soit pas au détriment des élèves».

Le Débat reste ouvert

Le représentant de la Fédération nationale des travailleurs de l’éducation FNTE (UGTA) souligne, pour sa part, que «nous ne sommes pas contre l’école privée. Nous demandons juste que toutes les conditions exigées soient respectées. Le programme, la structure, les horaires. Nous demandons également que les enseignants du privé aient les même droits que ceux du public. Même si l’école privée est avant tout un institut à caractère commercial, elle doit préserver les droits des travailleurs». Pour le représentant du CNES, enseignant à l’université, «l’école privée est une indication de la faillite de la gestion de l’éducation nationale. Ces établissements sont devenus une simple marchandise. Qui dit marchandise, dit profit. Ils veulent dépenser le moins possible pour gagner plus. En autorisant l’ouverture de ces institutions, le ministère ne fait que gérer la misère à l’intérieur du secteur de l’éducation. Ces écoles sont l’indice de la différenciation sociale et l’apparition des couches sociales. On ne peut plus parler de classes sociales homogènes. De plus, je conçois mal qu’une école qui a son agrément et un cahier des charges exerce dans une maison transformée pour la circonstance en école. Dire que l’école privée est une solution pour nos enfants, c’est une erreur». Pour revenir sur l’affaire de l’établissement qui a fermé, notre interlocuteur commente, «si le cahier des charges n’a pas été respecté, il fallait prendre cette mesure au début de l’année. Si le propriétaire a travaillé dans la clandestinité, cela veut dire que l’Etat a laissé faire. Comment des parents d’élèves ont-ils inscrit leurs enfants dans cette école sans s’assurer qu’elle était agréée ?» Du côté des partis politiques, l’enseignement privé est le bienvenu, mais… Le porte-parole du RND ne se montre pas opposé à l’idée tant qu’il y a respect des lois de la République. «L’enseignement privé est une expérience nouvelle qui n’a pas encore donné ses fruits. Nous ne sommes pas contre l’école privée si c’est le même système pédagogique qui est appliqué. Notre seul souhait est de voir l’école algérienne, qu’elle soit privée ou publique, faire un pas qualitatif dans les prochaines années». Le représentant du MSP, membre du conseil consultatif, insiste pour que ces écoles soient soumises à un contrôle rigoureux qui peut assurer le respect du programme national et de la langue enseignée qui est l’arabe. Il met en garde, cependant, contre certaines dérives qui peuvent causer une fracture au sein de la société. «Si l’enseignement de la langue arabe est négligé par ces écoles, nous allons être confrontés au même problème déjà vécu après l’indépendance. Nous aurons une génération divisée entre les francophones et les arabophones et cela va créer un déphasage au sein d’une même société». Pour un député FLN, «même si nous ne sommes pas contre l’école privée, notre parti demeure un défenseur de l’école publique qu’il faut soutenir. L’Etat doit investir dans ce secteur par la réforme et l’application de modèles d’enseignement plus développés car l’élite émerge de l’école publique. Toutefois, nous sommes convaincus que l’école privée est un complément, comme nous exigeons que les deux soient mises sur le même pied d’égalité». Quant au représentant du MDS, il souligne, pour sa part, que «l’école privée est une réalité, aujourd’hui. Cette école, avant d’être réglementée, s’est développée au sein de l’école publique par l’apparition des cours supplémentaires. Si elle existe, elle doit être régie par une réglementation et un cahier des charges. Mais, cela n’exclut pas que l’Etat doit investir dans l’école publique par la formation et l’amélioration des conditions de travail, car cette institution demeure l’épine dorsale de l’éducation. Par l’ouverture des écoles privées, il y a aussi le risque d’abandon de l’école publique.

Les enseignants qui trouveront un cadre professionnel meilleur chez le privé vont fuir l’enseignement public». Commentant la décision de fermeture prise par le gouvernement, le même interlocuteur souligne que «c’est la preuve d’une mauvaise gestion. On a laissé faire les choses, puis on hésite, puis on donne la permission et on procède ensuite au retrait d’agrément. Il n’y a aucune perspective, aucune anticipation, c’est de la mauvaise gestion».

B. Mokhtaria


La chambre des référés près le tribunal d’Oran se déclare incompétente

La chambre des référés, près le tribunal d’Oran, s’est déclarée hier, incompétente dans l’affaire de la plainte déposée par le collectif des parents d’élèves contre la décision de fermeture de l’école privée «Oroudj Rais». Les parents se sont réunis de nouveau, hier, au niveau de l’école pour être informés de la décision de justice. Une autre réunion est prévue aujourd’hui, pour faire le point et s’entendre sur les actions à entreprendre pour qu’un «sursis» soit accordé jusqu’au mois de juin.

B. M.


TEMPETE SUR L’ECOLE PRIVEE

La règlementation et «l’accord de principe»

Les autorités de la wilaya de Constantine nous renvoient à l’article 30 du décret exécutif n° 05-432 daté du 8 novembre 2005 fixant les conditions de création, d’ouverture et de contrôle des établissements privés d’éducation et d’enseignement pour motiver la décision de fermeture administrative, le 8 février 2006, de l’école d’enseignement primaire privée de Boussouf, Piri Raïs en l’occurrence.

L’article en question stipule que l’établissement privé exerçant son activité ne s’étant pas mis en conformité avec les dispositions du présent décret, sera considéré en situation d’exercice d’une activité illégale. Sur ce point précis, Ahmed Guellil, directeur de l’éducation de la wilaya de Constantine, reste intransigeant: il n’est pas question que cette école privée active illégalement. Et d’affirmer qu’elle s’est empressée d’ouvrir ses portes alors qu’elle n’avait bénéficié que d’un accord de principe de la part de la commission ad hoc créée auprès de la direction de l’éducation de la wilaya. Les responsables de cette dernière tenaient toutefois à préciser que cette commission est chargée, selon les dispositions du même décret, d’étudier les demandes d’autorisation de création d’établissements privés sur la base du dossier technique et de donner son avis au ministre chargé de l’Education nationale. «Et il fallait pour ces responsables obtenir les autorisations nécessaires du ministère de l’Education, autrement dit l’agrément», nous assure-t-on.

Les réserves de la commission ad hoc

Pour plus de clarté, il faudra savoir que cette commission ad hoc, présidée par le directeur de l’éducation, est composée de différents chefs de services de cette structure; et au titre des autres ministères, elle est constituée également du président de l’APC ou son représentant, des représentants de la santé, de la protection civile, de l’urbanisme et de la construction, des impôts et d’un représentant des services de la wilaya chargés de l’administration locale.

Selon nos interlocuteurs, cette commission a effectué une visite à l’école Piri Raïs en date du 13 juillet 2005. Selon le directeur de l’éducation, cette commission a donné son accord de principe. Mais des réserves ont quand même été formulées. Il s’agit, entre autres, de plus d’aération dans la salle de sport, de la mise des tableaux à droite dans toutes les salles de cours, du transfert du bureau de la directrice au deuxième étage, de la suppression des vides constatés sur les balcons, de l’installation du chauffage central sur la terrasse, ou encore la construction de 10 vestiaires (5 pour les garçons et cinq pour les filles). Des réserves qui ont été levées, selon M. Arif Dogmus, cogérant de la société mère El-Hadatha, dont le siège est à Alger, que nous avons contacté.

Nous apprendrons de notre interlocuteur que c’est une société de droit algérien créée par trois personnes de nationalité turque (dont lui) en partenariat avec un Algérien qui a ouvert trois écoles d’enseignement à Alger, Oran et Constantine, une école de langue et un centre d’enseignement d’informatique. Arif Dogmus nous confirme qu’effectivement l’école Piri Raïs n’a pas encore obtenu d’agrément.

Mais alors pourquoi avoir ouvert cette école, sachant que sans ce fameux quitus du ministère, l’activité reste illégale au vu des dispositions du décret exécutif n° 05-432 daté du 8 novembre 2005 ? Le co-gérant nous explique alors qu’ayant satisfait au cahier des charges, le fondateur de l’école, M. Baïder Hussein, a déposé un dossier complet auprès de la direction de l’éducation de la wilaya de Constantine le 26 juin 2006. M. Dogmus précisera encore que la commission ad hoc a effectué une visite à l’établissement et le directeur de l’éducation qui préside cette commission a donné son accord de principe le jour même. «Ayant levé toutes les réserves émises par cette commission, il ne nous restait donc que l’obtention de l’agrément qui était à notre sens une formalité. Ceci d’autant plus qu’au niveau d’Oran et d’Alger, nous n’avons eu aucun problème pour l’obtention de cette autorisation du ministère. Etant dit, précise-t- il, que pour les trois écoles, nous avons suivi la même démarche et déposé le même dossier et reçu le même accord de principe.

L’article 18 et le respect du cahier des charges

Et de nous citer l’article 18 de ce même décret exécutif qui précise qu’en cas de non-respect des clauses du cahier des charges, une note motivée est adressée au fondateur par le directeur de l’éducation de la wilaya au plus tard 8 jours après la date du contrôle préalable pour respecter les clauses du cahier des charges dans un délai fixé d’un commun accord, mais qui ne saurait excéder deux mois. Au terme de ce délai, si le fondateur ne se conforme pas aux clauses du cahier des charges, le ministre chargé de l’Education nationale, sur la base d’un rapport présenté par la commission ad hoc, annule l’autorisation de création de l’établissement privé. «Nous n’étions alors que dans l’attente de l’agrément» dira-t-il. Et de poursuivre: «Nous nous somme inquiétés de ce retard, et nous nous sommes adressés au ministère de l’Education. A ce niveau, on nous délivra une attestation administrative datée du 20 décembre 2005 et signée par le président de la commission technique chargée de l’étude des dossiers d’agrément relative aux établissements privés. Nous pouvions lire sur la copie (remise au Quotidien d’Oran) que «le secrétariat de la commission technique a reçu le dossier de demande d’agrément de l’école privée Piri Raïs et qu’il est actuellement à l’étude».

M. Arif nous informe ensuite que «la direction du commerce nous a saisis en date du 7 janvier 2006 pour nous signifier la fermeture de l’établissement pour défaut de registre de commerce». Et de conclure: «Nous comptons dès demain engager une action en justice pour qu’on nous notifie officiellement les motifs du refus de l’agrément».

Les élèves transférés vers les écoles publiques

Des parents d’élèves que nous avons contactés ont une toute autre idée de la chose, même s’ils nous affirment que dans leur majorité ils ont réussi à inscrire leurs enfants dans des écoles publiques. Ils s’étonnent d’abord que l’acheminement du dossier de Constantine à Alger ait pris plus de six mois entre la date de dépôt et la date de réception. Sur ce point précis, la direction de l’éducation est formelle: le dossier a été envoyé dans des délais raisonnables. Mais ce n’est pas le seul point noir qu’ils relèvent et c’est une foule d’interrogations qui est mise sur le tapis. Ils commencent par s’interroger sur la légalité de la fermeture de l’école Piri Raïs. Leur argument, c’est essentiellement l’article 25 de la section 2 intitulé «Des élèves et de leurs droits» du décret exécutif du 8 novembre 2005. Celui-ci stipule que toute fermeture d’établissement privé décidée par le fondateur doit être portée à la connaissance des élèves et de leurs parents trois mois au moins avant la fin de l’année scolaire. Toutefois, en cas de force majeure et si l’activité de l’établissement privé doit être interrompue en cours d’année scolaire, le fondateur doit aviser immédiatement la direction de l’éducation de la wilaya qui assure le fonctionnement jusqu’à la fin de l’année scolaire.

«Manifestement, soulignent-ils, «ce décret montre le souci des pouvoirs publics de ne pas perturber la scolarité des élèves. Et dans ce cas, la direction de l’éducation aurait pu prendre en charge l’école en attendant que ses propriétaires régularisent leur situation. D’autant plus que rien n’empêche le ministère d’accorder l’agrément puisque toutes les conditions de son ouverture sont réunies».

Pour les responsables de l’ éducation de la wilaya, cette école n’a jamais été autorisée à exercer. Et aux yeux de la loi, elle active illégalement. Donc, il n’y a pas lieu pour la direction de l’éducation d’assurer le fonctionnement d’un établissement qui n’existe pas légalement. Ces mêmes responsables nous renvoient à l’article 28 du même décret exécutif qui stipule que lorsque la fermeture de l’établissement privé est immédiate, les élèves peuvent être transférés, en fonction des places pédagogiques disponibles, vers les établissements publics d’enseignement s’ils remplissent les conditions d’âge et de niveau. Et de nous dire que tous les parents d’élèves de cette école privée qui active illégalement, qui ont demandé à ce que leurs enfants soient inscrits dans les écoles publiques, ont été satisfaits.

Interpellés par nos soins à propos de la scolarisation de leurs enfants dans une école qui n’avait pas encore obtenu son agrément, les parents d’élèves soulignent que leur responsabilité est entière. Cependant, ils affirment les avoir inscrits sur la base des nombreuses déclarations encourageantes du directeur de l’éducation. Et de nous montrer des coupures de presse datant du 14 et du 16 août où ce dernier affirmait avoir donné son accord de principe à cet établissement. «L’existence de l’école Piri Raïs était connue. Et les autorités ne peuvent nier l’existence administrative réelle et physique de l’école», s’exclame l’un d’eux. Et un autre de renchérir: «C’est peut-être une école illégale mais elle n’est pas clandestine !» Ils auraient dû fermer cette école au mois de septembre ! Où étaient-ils ? Que faisaient-ils de septembre 2005 à février 2006 ? De plus, affirment-ils, «si les parents d’élèves avaient été avertis, avisés, informés, mis au courant de manière officielle et par notification écrite, ils auraient assumé pleinement leurs responsabilités et subi sans réserve aucune les conséquences et les répercussions de cet état de fait sur leurs enfants».

Cependant, ils renversent la vapeur pour déclarer: «Si les autorités avaient notifié la non-recevabilité de la demande d’agrément de l’école de manière officielle, nous aurions alors traîné devant les tribunaux pour abus de confiance et escroquerie les responsables de Piri Raïs». Enfin, les parents d’élèves ne manqueront pas de relever: «Comment se fait-il que le ministère de l’Education délivre aux Turcs deux agréments pour deux écoles, l’une à Alger l’autre à Oran, au mois de juillet 2005, au moment même où son dossier pour l’école de Constantine était à l’étude ?

Mohamed Salah Boureni


75 écoles privées agréées et 40 fermées

Les responsables des écoles privées fermées faute d’agrément ou d’autorisation d’ouverture, se mobilisent afin de trouver une «solution» pour une éventuelle réouverture de leurs établissements. Certains ont saisi un comité d’avocats, d’autres sont allés porter leurs revendications aux représentants du Parlement alors que le reste a préféré se réunir avec des parents d’élèves à la recherche de soutien. «On court dans tous les sens», dira la directrice de l’école «Tafat» à Alger, signalant que les responsables, enseignants et parents d’élèves se mobilisent pour leurs droits. De leur côté les parents d’élèves de certaines écoles à Alger se sont rapprochés des organes de presse afin de sensibiliser les pouvoirs publics et annuler cette décision qu’ils qualifient «de crime». Les parents d’élèves demandent aux responsables de l’Etat de laisser leurs enfants continuer cette année scolaire et se disent disposés à négocier et à débattre le problème des écoles privées et publiques et des problèmes pédagogiques et techniques juste après. Mais, il semble que les choses sont plus complexes si on se réfère aux déclarations du ministère de l’Education qui affirment et confirment que ces écoles exercent dans l’illégalité. «Il y a 40 écoles au niveau national qui travaillent au noir dont 22 à Alger», dira M. Zeghache, responsable du dossier des écoles privées au niveau du ministère de l’Education. Notre interlocuteur insiste, sur le fait que parmi ces écoles, certaines n’ont pas déposé leurs dossiers alors que les autres ont obtenu des agréments mais n’ont pas eu l’autorisation. Un document émanant de la commission chargée des dossiers des écoles privées au sein des wilayas, qui doit donner le feu vert aux responsables des écoles après un constat et un contrôle techniques sur place.

Pour le cadre du ministère, les responsables de ces écoles ont eu suffisamment de temps pour se conformer aux cahiers des charges et pour déposer leurs dossiers. «Benbouzid leur a donné un ultimatum jusqu’au 31 décembre 2005 et on est déjà en 2006». M. Zeghache a ajouté que les directeurs d’écoles qui ont déposé leurs dossiers et ont respecté la réglementation en la matière ont obtenu leur agrément, sans aucune contrainte. «Nous avons octroyé 75 agréments pour des écoles privées qui exercent aujourd’hui de façon légale». Notre interlocuteur a fait rappeler qu’une circulaire du ministère a été adressée, à l’ensemble des établissements scolaires invitant ces derniers à prendre en charge les élèves scolarisés dans des écoles privées. Une solution catégoriquement rejetée par la grande majorité des parents.

M. Aziza


Le programme enseigné dans les écoles privées

Les écoles privées de l’Education nationale sont tenues de respecter le programme national établi par le ministère de l’Education nationale, conformément au décret ministériel n°04/90 du 24 mars 2004 fixant les conditions de création, d’ouverture et de contrôle des écoles privées d’éducation et d’enseignement.

Le programme comprend donc toutes les matières enseignées dans les établissements publics des premier, second et troisième paliers, à savoir la langue arabe, la langue française, la langue anglaise, l’éducation islamique, l’éducation civile, l’éducation technologique, l’éducation environnementale, les mathématiques, plus le sport pour le primaire. Dans le moyen et le secondaire, ce sont les mêmes programmes qui sont enseignés.

Selon la responsable d’une école privée, «la seule différence est l’enseignement de la langue française, de la langue anglaise et de l’informatique à partir du préscolaire jusqu’à la fin du cursus scolaire. L’école privée assure également le demi-pensionnat, organise des sorties pour les enfants et programme des activités à l’occasion de chaque fête nationale ou religieuse». Le nombre d’élèves par classe est aussi réduit, ne dépassant pas les 20 élèves.

B. M.