L’Algérie, les Etats-Unis et la France

L’Algérie, les Etats-Unis et la France

Belkhadem à l’épreuve du terrain

El-Houari Dilmi, Le Quotidien d’Oran, 16 septembre 2000

Décryptée comme un signal fort de «grosse déception» du président de la République, suite aux résultats peu encourageants des relations entre l’Algérie et le monde occidental, la nomination de Belkhadem était, aussi, perçue comme un recadrage de l’action diplomatique en direction des pays du Golfe où le nouveau ministre d’Etat disposerait de solides amitiés.

Mais est-ce que cela est toujours vrai face à l’offensive diplomatique des USA et de l’Europe ? Cette dernière, représentée surtout par la France, et les Etats-Unis d’Amérique sont au coude à coude, chacune des deux puissances souhaitant raffermir son influence en Algérie, aujourd’hui à la croisée des chemins. Mais le bilan jugé positif laissé par l’ambassadeur sortant, M. Cameron Hume, semble bien donner une longueur d’avance aux Américaines qui s’enthousiasment pour l’embellie politique entre les deux pays. Outre une coopération militaire porteuse de nouveaux défis, plus de trois (03) milliards de dollars ont été injectés par les Américains dans l’économie algérienne. Et la visite prochaine du commandant de l’US Air Force, le général Michael E. Ryan, à Alger augure un rôle tout nouveau qui sera confié à l’Algérie dans l’oeuvre de stabilisation du pourtour méditerranéen.

Mais si la relance des relations algéro-américaines est désormais une réalité perceptible, l’Europe – la France surtout – ne compte pas se laisser dépasser à droite et actionne la machine diplomatique pour réchauffer les contacts entre les deux régions. Cela a commencé mercredi à New York. En marge des travaux de la 55ème session de l’Assemblée générale de l’ONU, le chef de la diplomatie algérienne, M. Abdelaziz Belkhadem, s’est entretenu, pour la première fois depuis sa nomination, avec son homologue français, M. Hubert Védrine. Celui-ci a estimé que les «relations entre Alger et Paris ne doivent pas perdre leur élan» et que la coopération entre les deux pays «(…) doit se traduire par des mesures concrètes (…)». Les deux ministres «sont convenus de veiller à ce que la relance de la coopération bilatérale décidée au plus haut niveau se traduise rapidement par des avancées concrètes (…)», a déclaré le porte-parole du Quai d’Orsay, Mme Anne Gazeau-Secret. C’est surtout les dossiers qui nécessitent des arbitrages politiques comme les investissements étrangers en Algérie qui sont le plus ciblés dans la reprise du dialogue entre Alger et Paris. Pour la France, «beaucoup de choses sont en cours, mais il ne faut pas perdre l’élan (…)». Abdelaziz Belkhadem s’est entretenu le même jour avec le ministre des Affaires étrangères du Royaume de Belgique, M. Louis Michel. Les chefs de la diplomatie des deux pays ont notamment évoqué les relations entre l’Algérie et l’Union européenne. Ils ont, aussi, convenu de «(…) multiplier les contacts et les visites en particulier entre opérateurs économiques afin d’identifier les secteurs de coopération (…)».

Mais si l’Europe ne veut, à aucun prix, laisser passer la chance nouvelle de «reconquérir» le terrain perdu dans un pays encore vierge, l’offensive diplomatique du pays de l’Oncle Sam est annonciatrice d’une lutte âpre entre les deux puissances. Cela veut-il dire que l’avantage insigne reviendrait à celui qui séduirait le plus Alger en promouvant des relations saines et concrètes d’intérêts communs ?

Pour être lui-même diplomate de métier, M. Abdelaziz Bouteflika paraît faire son cheval de bataille la devise, désormais universelle, qui voudrait qu’un pays n’a pas d’amis éternels ni des ennemis éternels mais des intérêts éternels.