El Hadi Chalabi à Libre Algérie: Information, mystification et diwan des généraux

El Hadi Chalabi à Libre Algérie

Information, mystifications et diwan des généraux

Propos recueillis par Mabrouk Hamena, Libre Algérie, 10-23 avril 2000

Dans la plupart des cercles médiatiques locaux «politiquement corrects», mais aussi chez quelques décideurs-commanditaires, la Presse algérienne au-dessus de tout soupçon (*) , étude critique d’El Hadi Chalabi a créé un malaise sourd. Il s’est manifesté par un embargo quasi total de sa sortie en librairie. Bien que limitée à quelques quotidiens, mais non des moindres, cette étude a mis a nu, à travers l’examen du traitement de quelques événements nationaux retentissants, des motivations éditoriales généralement aux antipodes des principes du journalisme et des préoccupations de la société. Mais de quoi se mêle El Hadi Chalabi, a-t-on entendu dire. Universitaire (docteur d’Etat en droit public à Lyon II, 1978…), chercheur (URASC et au CRASC à Oran, au Centre d’études sur l’Orient contemporain, Lyon…), El Hadi Chalabi rejette le statut de «juriste de cabinet». Pas question de n’être qu’un simple technicien du droit. Pour lui, le droit est «une articulation avec le bouillonnement de la société» et donc en rapport étroit avec la sociologie, l’histoire et l’anthropologie. Il s’est naturellement penché sur la presse, segment des libertés publiques. Cet intellectuel quinquagénaire est arrivé à la conclusion que cette presse est «un outil dont les ravages ne sont que trop visibles». Il s’en explique. Exemple : «[…] Elle réactive une hiérarchisation sociale et culturelle qui rappelle étrangement celle de l’Algérie coloniale […]». Choquant ? Peut-être. Mais en y regardant de plus près, on découvre effectivement des similitudes frappantes. Il livre aussi à Libre Algérie sa perception du cours de la vie politique et institutionnelle, notamment sur la concorde civile, les velléités de révision constitutionnelle, le récent mouvement au sein de l’ANP et sur le rôle supraconstitutionnel du «diwan des généraux».

M. H.

Libre Algérie : La Presse algérienne au-dessus de tout soupçon est paru depuis peu à Alger. Qu’est-ce qui a fait que vous portiez votre intérêt sur la presse privée algérienne, alors qu’habituellement vous traitez plutôt les questions de droit ?

El Hadi Chalabi : Tout d’abord, quand vous dites que je traite plutôt les questions de droit, cela m’étonne un peu de voir les problèmes liés à la presse dissociés du questionnement d’ordre juridique. S’il existe un domaine qui renvoie en permanence au droit c’est bien celui de la presse.

En premier lieu, et d’une façon générale, la presse, son régime, le statut du journaliste font partie intégrante de l’étude des libertés publiques. Derrière la liberté d’expression se profile le sort réservé à toutes les libertés. D’où l’importance de la presse et des règles codées ou pas de son comportement au quotidien. On ne peut pas traiter de la liberté d’opinion, d’association – dont celle qui consiste dans la création des partis politiques -, de conscience, sans passer par la liberté de la presse. L’étude de la presse répond nécessairement à l’examen du sort qui est fait à l’ensemble des libertés publiques. C’est par l’entremise des journaux que l’on peut mesurer le respect ou la violation des libertés. La multiplicité des idées, des idéaux, des opinions, enracinées dans des partis politiques se traduit nécessairement par une perception de l’idée de liberté comme celle de la pratique des libertés publiques. Si les règles font défaut en la matière, pour faire la part de ce qui est la défense des libertés, selon sa propre ligne éditoriale et le respect des règles minimales admettant une autre conception, c’est la porte ouverte à toutes les dérives. C’est là que commence la violence.

En second lieu, je ne suis pas un juriste de cabinet. Je travaille à ciel ouvert. Autrement dit, le droit n’est pas pour moi une simple question de technique ou de savoir-faire/dire technologique, mais une articulation avec le bouillonnement de la société. Le droit est associé étroitement à l’histoire, la sociologie, l’anthropologie. La presse me met quotidiennement en rapport avec une présentation des institutions, qu’elles soient politiques, administratives, judiciaires ou autres. Elle me renseigne sur l’idée qu’elle distille de la famille, de la sécurité. Elle me fournit sa perception du respect de la dignité humaine et renseigne sur le degré dans lequel elle la tient. Les journaux me renvoient leur conception des droits de l’homme, du pluralisme politique, l’idée qu’ils fournissent aux lecteurs du crime, de la défense, de la justice, des dommages, de l’égalité de traitement. Depuis le temps que je lis la presse algérienne, j’ai pris soin de collectionner suffisamment d’éléments qui m’autorisent, comme juriste, à en traiter, et à ma façon. J’ai acquis la conviction que la presse est devenue un outil de façonnement de la société. Lorsque les procédés qui président au façonnement de la société renvoient à des valeurs pour les corrompre et les pervertir, le juriste doit-il attendre le feu vert du spécialiste des médias pour porter son propre regard sur un outil dont les ravages ne sont que trop visibles ?

Dans la remarquable préface de Hocine Zahouane, on est toutefois interpellé par son jugement radical sur la presse, surtout lorsqu’il reconnaît qu’«il y a longtemps qu’il ne la lit plus ». Ça ne vous a pas interpellé ?

A propos du jugement radical que porte Hocine Zahouane dans sa préface et le fait qu’il déclare «ne plus lire (la presse) depuis longtemps», sans vouloir me substituer à Hocine Zahouane, je peux dire que la presse fournit mille et une raisons pouvant conduire à son boycott. Quand on est en permanence sur la brèche dans le combat pour les droits de l’homme et du citoyen, que l’on mesure à quel point la presse s’en empare pour en faire un instrument d’affrontement des uns contre les autres, il y a de quoi s’abstenir de masquer son dégoût. Mais dire que l’on ne lit pas la presse, cela ne veut pas dire que l’on devient ignorant de son contenu et de sa nature. Il est des lectures militantes, à froid et à distance, comme on le fait de pièces à conviction figurant dans un dossier de plaidoirie.

Vous soutenez, arguments et raisonnement à l’appui, dans cette étude critique sur la presse privée algérienne qu’elle est globalement dépendante du pouvoir, autrement dit que son indépendance est un mythe. Fait-elle malgré cela l’opinion ?

Si l’indépendance de la presse que j’étudie est un mythe, je peux dire que l’opinion qu’elle se construit est à son image. Je ne compte plus les éditoriaux de Liberté, El Watan, Le Matin, La Tribune où il est question de l’opinion publique. Le fait de parler de presse et d’opinion, cela laisserait supposer qu’il existerait un degré d’autonomisation à partir duquel une opinion se fait, se construit. L’opinion publique suppose la diversité d’opinions dans la liberté et donc la possibilité et des potentialités équivalentes, sinon égales, au moins sur le plan du droit, de se manifester sur la place publique, de se confronter dans des organes de presse différents, avec, éventuellement, des idéaux différents, des lignes éditoriales différentes. L’opinion publique serait la résultante de ces rencontres, débats, échanges, divergences, contestations et qui ont vocation à porter, y compris sur la presse. Or, que constate-t-on depuis la naissance et le développement de cette presse dite libre et indépendante ? Elle vise soigneusement des catégories sociales, professionnelles : professions libérales, cadres supérieurs, universitaires, officiers de l’armée et des services de sécurité… auxquels elle sert une bouillie archicuite sur l’islam, la modernité, les femmes, les intellectuels, l’armée, avec une pointe de culture sur la musique, la littérature, la peinture. Dans chaque rubrique, elle célèbre ses héros, leur grandeur, en soulignant au passage la petitesse des autres, les sans voix, sans culture, sans conviction. On mobilise le raï, l’amazighité, Issiakhem et Kateb Yacine. En oubliant qu’un auteur comme Kateb Yacine ne se serait peut-être pas laissé embrigader comme on le fait pour lui. On mesure le côté attrayant que cette presse a pu capitaliser dès le départ, et qui opérait en théorie comme une rupture par rapport aux pratiques antérieures. En réalité, elle s’est constituée un fonds électoral sur la base d’un anti-islamisme militant. Cette opinion s’est fait manipuler dès le départ sur la base d’une démocratie censitaire sur laquelle on cultive l’équation anti-islamiste égale démocrate, avec une inconnue rapidement solutionnée sur le mode terrorisme égale terrorisme A cet égard, je considère Abdelkader Hachani, dont je tiens à saluer la mémoire, comme un militant de la démocratie ayant payé de sa vie cette recherche de synthèse entre islam et démocratie. En réalité, la rencontre entre éradicateurs d’en haut et ceux d’en bas et son véhicule médiatique répond exactement à la défense et à la sauvegarde de privilèges acquis à l’ombre de la distribution rentière dont tout ce monde a été le vivier et dans lequel ont puisé et puisent encore les maîtres de l’Etat.

La presse dont je parle a rendu explicite ce paramètre selon lequel il suffit de terroriser son prochain pour se rassurer. Le résultat c’est que personne n’est rassuré du tout. Mais cela n’empêche pas la presse dite libre de continuer à faire fructifier un fonds de commerce où la démocratie et les droits de l’homme font bon ménage avec les chars et la torture. En résumé, on peut toujours faire, construire, ou bricoler une opinion, mais parler d’opinion publique c’est autrement plus problématique. En Algérie, sur ce plan, il y a loin de la coupe aux lèvres.

Vous dites que cette presse est un des instruments de l’affrontement des clans. Est-elle toujours consentante et qu’obtient-elle en contrepartie ?

Un instrument ne peut, par définition, être consentant. Il est réduit à un outil de transmission. Le consentement suppose volonté et choix. Ici, le consentement se situe chez le titulaire du pouvoir de commander, d’ordonner. Quant aux contreparties, elles sont facilement décelables déjà extérieurement. Il suffit de feuilleter ces journaux phares pour comptabiliser les millions de dinars qui sont distribués grâce à la manne publicitaire. En second lieu, l’enjeu concerne le standing que se voient offrir ces quotidiens qui ont pris place dans une espèce de Bourse aux valeurs de l’information sur le plan international. Qui ignore la cote atteinte par un Omar Belhouchet que France Inter, via Bernard Guetta ou Stéphane Paoli, fait intervenir à une heure de grande écoute sur France Inter comme le porte-parole du quotidien indépendant El Watan ? Dans son positionnement à l’égard des clans qu’ils servent, les journaux doivent être saisis aussi, tout au moins dans le personnel qui les dirige, comme un moyen privilégié par lequel passent des échanges et la mise en place d’intérêts économiques et financiers à cheval sur le Maghreb et l’Europe. Les patrons de cette presse en phase avec des patrons de l’armée servent d’intermédiaires à ces derniers dans des transactions avec les milieux d’affaires européens. Grâce au retour du capitalisme sauvage triomphant baptisé mondialisation, il n’est pas de sots intermédiaires ou convoyeurs en affaires en tous genres. Les positions défendues sur la place et la conception de l’Etat, depuis quelques années, en symbiose avec des ajustements et restructurations à l’ombre du FMI, illustrent la mise en place de réseaux régentant la mise en coupe réglée de la société à travers un remodelage de l’économie. C’est l’autre dimension de la violence qu’il ne faut pas sous-estimer. A une société armée dans ses composantes sur le plan idéologique puis militaire, il faut ajouter l’insécurité, l’angoisse et la misère matérielles.

Comment cette presse pourrait-elle avoir une autonomie d’action vis-à-vis du pouvoir, sachant que le contexte dans lequel elle évolue est un contexte de crise multidimensionnelle ?

Il est exact que nous sommes en présence d’une crise multidimensionnelle, et la question de l’autonomie comme je tente d’en faire la démonstration dans la Presse algérienne au-dessus de tout soupçon se pose pour toute l’armature politique et institutionnelle : à l’image des partis politiques, la presse doit son existence au pouvoir restructuré après 1988 de façon à ce qu’il porte le double vêtement du pouvoir et de l’opposition. Dans la foulée, ce pouvoir qui a prétendu se donner à bon compte des allures démocratisées a accaparé un apport considérable qu’il a entendu manipuler en profondeur : l’islam, assorti de son expression politique, l’islamisme, enrobé de sa couverture terroriste aux ramifications plurielles et à l’interlocuteur unique : le diwan des généraux, en totalité ou en partie, selon les cas. Dans cette entreprise diabolique qui fait peser une chape de violence continue sur une société militarisée à outrance et livrée au pouvoir des armes, la presse fait illusion en critiquant le pouvoir. Elle le fait du reste chaque jour, et ses lecteurs se laissent prendre au ronron du matou dont les griffes ont été soigneusement limées par un maître qui, parfois, lui arrache même les moustaches. Vous savez que lorsqu’on coupe les moustaches du chat, il perd complètement le sens de l’orientation. C’est ce qui arrive parfois à cette presse qui se met à fonctionner à tâtons. Le maître pouvoir détient sur la presse des privilèges régaliens en sachant qu’il n’est pas décelable puisqu’il refuse d’apparaître comme tel au grand jour pour des lecteurs réduits continuellement à un jeu de construction pour citoyens accomplis. Quand on croit que le pouvoir est sous l’habit de X, il apparaît plus loin sous la casquette de Y. Au reste, ce jeu se pratique dans une connivence parfaite avec les centres de commandement qui ont leur prolongement dans les rédactions. Quand la presse vise telle ou telle tête de pont de l’institution parlementaire, gouvernementale ou présidentielle, elle le fait selon un rituel qui, maintenant, est parfaitement huilé et maîtrisé. La mise en scène peut se faire comme pour l’agencement et la restitution des spots publicitaires pour les besoins d’une communication dont le seul objectif se calcule en bénéfices nets. L’objectif visé extérieurement au yeux des lecteurs ne correspond pas, ou si rarement, avec l’objectif réellement poursuivi. Le poids de la violence et de l’oppression pesant sur les composantes de cette opinion savamment construite est tel que l’illusion d’une presse interpellatrice fait son effet. En réalité, pour aller vers les voies possibles de l’autonomie, il faut savoir où l’on est et qui on est. Comment trouver les chemins de l’autonomie quand on se prétend libre et indépendant alors qu’on est l’instrument des composantes claniques articulées arbitrairement derrière des institutions d’Etat ? De ce point de vue, Libre Algérie peut aisément mesurer son autonomie, dans la mesure où, se définissant comme journal du FFS, il proclame clairement, sans tromper le lecteur, quels sont ses choix. Il est, de ce fait, plus à même de se saisir de l’information en faisant la part de ce qui est la ligne de défense et d’explication de ses choix politiques. Il ne saurait y avoir d’autonomie de la presse sans sanction lectorale et sans confrontation qui puisse mesurer au grand jour si on est dans l’information ou dans la mystification.

A propos de l’affaire Benloucif, vous parlez de «lynchage médiatique». Toutes proportions gardées, n’est-ce pas le même scénario qui a été exécuté pour la rencontre de Sant’Egidio et le contrat politique qui y a été conclu ?

J’ai procédé par sélection, en retenant l’affaire Benloucif parce qu’elle permet de mettre en évidence au moins en partie les éléments du code de fonctionnement interne au diwan des généraux. Elle révèle en même temps le rôle accessoire mais combien utile de projectiles dans lequel sont tenus les journaux et la justice. Il faut souligner au passage que le livre devait, dès le départ, avoir un volume limité, en accord avec l’éditeur. J’aurais pu, en effet, traiter aussi de façon plus exhaustive de la machine judiciaire et de sa confrontation avec les règles en matière de procès pénal. Comment la presse réputée libre et indépendante a couvert le procès pénal islamiste-terroriste ? La matière est inépuisable. Mais je vous remercie de me poser la question sur la rencontre de Sant’Egidio. En elle-même la question du «contrat national» comme démarche ouvrant sur une solution pacifique est à étudier dans un ensemble pouvant illustrer le régime et la nature réels des partis politiques qui n’ont de place que pour soutenir et répercuter les choix décidés et ayant l’aval du pouvoir tutélaire du diwan. Dès lors qu’un parti politique entend exercer son rôle propre d’affirmer ses propres choix, de définir des rapports avec d’autres partis, et notamment le FIS et ses dirigeants politiques de l’époque, bref, de mettre en branle une stratégie susceptible d’échapper au contrôle du diwan, ce dernier s’emploie à y mettre fin par tous les moyens. C’est bien ce qui s’est passé avec le «contrat national» dont les principes directeurs sont d’ailleurs toujours d’actualité, dans la mesure où ils conduisent à étayer le principe d’une solution politique à la violence, sur la base d’une reconnaissance de règles s’imposant à tous, par des acteurs politiques mandatés. Le déchaînement de violence dans la presse qui a suivi la conclusion du «contrat national» est à lui seul révélateur de la conception que le diwan a des partis politiques. Ceux-ci ne sont acceptables que s’ils sont conformes au rôle qui est dessiné pour eux ailleurs. Les partis politiques relèvent ainsi d’une conception administrative, dirigiste, du parti politique dont l’initiative se situe à une autre source que la sienne propre et celle de ses militants. Les pratiques en ce sens ont présidé à la naissance du multipartisme et son couronnées par l’ordonnance de 1997 sur les partis politiques. Voilà qui expliquerait comment la presse a relayé cette conception du parti politique au lendemain du «contrat national». Je me contenterai de renvoyer le lecteur aux qualificatifs dont ont été affublés Louisa Hanoune, Aït Ahmed, Ali Yahia…, le «Taisez-vous Monsieur Mehri» de Hachemi Cherif dans El Watan, ou l’inénarrable «Sant’Egidio m’a tuée». Je n’oublierai pas non plus ce déferlement de haine chez les rédacteurs et les caricaturistes à partir de ce geste de complicité fraternelle et de symbole d’enracinement dans sa société quand Aït Ahmed s’est coiffé de la chéchia de Djaballah. La levée de boucliers contre le «contrat national» en Algérie, et en France notamment, a mobilisé toutes les ressources, des manifestations publiques aux colloques et campagnes de signatures.

En abordant la campagne de presse anti-Betchine de l’été 1998, on a l’impression que vous avez une certaine sympathie pour l’ex-conseiller du président Zeroual…

Il faut soumettre à l’épreuve des principes brandis par la presse tous les protagonistes du diwan. Lorsqu’on en dissocie un pour le jeter en pâture aux lecteurs sur la place publique, il y va de la teneur des principes et des valeurs proclamés et de la dévastation qu’on leur fait subir. C’est dans cet esprit que j’ai entrepris de démonter le rapport entre justice et règlement de compte judiciaire par voie médiatique, à l’intérieur d’un milieu au sein duquel aucun n’a le moindre souci de ce que peuvent représenter la justice, la liberté, la dignité humaine, le droit à la protection de sa personne et de ses biens, la confidentialité de sa vie privée. Comme simples projectiles de destruction, ce monde qui n’est pas le mien a fourni depuis longtemps les démonstrations de son savoir-faire, souvent par voie de presse. Mais comme principes susceptibles de nourrir encore des générations meurtries par la violence, ces principes ne sauraient être accaparés par personne. C’est là que va mon engagement militant. Quant à l’impression de sympathie pour Betchine, elle ne peut être que le résultat d’une lecture. En réalité, lorsque pendant des semaines, voire des mois, la presse libre et indépendante a persuadé les lecteurs de la légitimité du «lynchage», le fait de mettre en place, d’un côté les valeurs, les principes, de l’autre les acteurs et leur système de recrutement, de promotion et de déchéance, assorti de ses instruments médiatiques, sécuritaire ou judiciaire, suffit à faire du regard critique un regard sympathique. Aucun des membres du pouvoir tutélaire ne peut être dissocié des pratiques dans lesquelles tout ce monde s’est construit en façonnant les moyens de sa puissance. Ils l’ont fait et continuent à le faire par le détournement de la force d’Etat avec une brutalité visible pour tous. Ce travail à contre-courant m’intéresse et c’est dans ce type d’épreuves que se construit tout simplement une conception de l’homme inséparable du respect de soi-même.

Un leader politique a estimé que la presse privée algérienne a joué, ces dernières années, un rôle similaire à celui de la radio rwandaise Mille Collines (incitation à la haine…) . Pensez-vous qu’elle ait une aussi grande responsabilité dans la tragédie algérienne ?

La presse privée, qui se baptise libre et indépendante, ne mesure peut-être même pas l’énorme responsabilité dans la propagation de la haine qu’elle a distillée durant toutes ces années. Elle a entrepris de couper la population en deux, avec des procédés à la limite de la débilité. La presse a joué le rôle qui lui a été attribué par les services de sécurité et l’armée, dans une entreprise de répression sur tout ce qui constitue le support islamiste du FIS. C’est-à-dire là où s’est bâtie une force de rejet radical de la tyrannie. Après tout, le taghout n’est pas sorti comme cela des entrailles de la société. Le taghout s’est construit, a modelé son image et a poussé le raffinement jusqu’à renverser le fardeau de la barbarie sur ses adversaires. C’est là que la réflexion politique devrait commencer pour montrer l’état de délabrement dans lequel a été plongée la société. La presse privée doit avoir sa part dans une critique propre à mesurer le chemin à parcourir pour accéder aux civilités politiques. Pour cette presse, les islamistes ne sont pas des hommes : ce sont des hordes auxquelles on accole parfois, pour faire bonne mesure, djahiliya, ce sont des barbares, des monstres, des sanguinaires. Les crimes qui leur sont attribués font l’objet, à l’occasion, d’une illustration en une, avec des corps de femmes, d’hommes ou d’enfants mutilés, parfois recouverts de simples journaux. Sans respect pour les victimes. Juste pour atteindre l’objectif poursuivi. On a, du coup, reproduit l’ouvre des services d’action psychologique déployée pendant la guerre d’Algérie. Tout ce qui compte c’est produire le rejet de l’islamiste, de l’islamisme. Peut importent les moyens et le prix à payer. Compartimentés, les Algériens, selon un découpage en ethnies de l’idéologie, sont traités différemment selon leur appartenance. Les journaux, en fait, réservent un traitement tantôt haineux, tantôt marqué par l’indifférence ou le mépris pour les islamistes chez qui il ne viendrait pas à l’idée d’y voir une victime. Pour cela, il faudrait que l’islamiste soit considéré comme un être humain. Depuis janvier 1992, on est frappé par une véritable restructuration de la société algérienne à travers ses composantes humaines, construite par cette presse de l’indépendance et de la liberté. Elle réactive une hiérarchisation sociale et culturelle qui rappelle étrangement celle de l’Algérie coloniale des indigènes et des pieds-noirs. Elle gomme la dimension historique qui restitue aux catégories sociologiques et politiques leur sens en les coupant de leur contexte et en brouillant la dimension, la nature et les objectifs des conflits. Ainsi le pied-noir, isolé de son contexte historique, n’est plus ce soutien et ce bénéficiaire du régime colonial et de son système discriminatoire. Il devient l’autre soi-même, dans lequel une identification se fait au prix d’une réécriture ahurissante de l’histoire même de la libération nationale. Des retrouvailles de classe se font à distance géographique et historique dans une mystification révélatrice où s’exacerbe un racisme qui réactive le code de l’indigénat dans lequel on tente de parquer les islamistes-indigènes des années 90. Le film d’Alexandre Arcady, dont la sortie simultanée à Alger et à Paris est pompeusement annoncée par El Watan, met en scène cette lecture de l’histoire sociale, politique et culturelle de l’Algérie contemporaine. Le rituel mis en place dans la communication sur les massacres, la manière de célébrer les victimes de la «République» comme des héros, «les meilleurs fils de l’Algérie», avec une cérémonie particulière, youyous et drapeau, par comparaison à ces morts anonymes, sans valeur, sans tendresse déchirée d’une mère, quelque part, sans sensibilité, sans parents qui les pleurent. Sauf lorsque la pièce est jouée comme un retournement et que l’on tente de récupérer les images d’un massacre dont on n’a même pas identifié les auteurs. La presse indépendante a très largement investi dans l’engrenage, sans pause, sans question ; la ligne était tracée, il fallait creuser dans le même sens. Que B. H. Lévy et A. Glucksmann soient conviés par le diwan aux fins de reconstitution et le jugement définitif est prononcé, la procédure close et l’entreprise authentifiée aux fins de ratification historique. Essayons de faire un retour sur l’image, relisons la presse, tout y est consigné.

Personne ne sait au juste quels sont les résultats de l’application de la loi sur la concorde civile. Pensez-vous que ce silence masque un échec ?

Il faudrait d’abord s’interroger sur les supports de la concorde civile et sur les moyens qui lui donnent les chances de conduire à une paix réelle, acceptée, vécue. Poser la question des supports de la concorde civile, c’est évaluer les chances de maîtrise d’une politique. Or, les sources de cette concorde civile, les leviers déterminants ne semblent pas être entre les mains du président de la République. Ce sont les appareils militaires et les services de coercition divers qui ont la mainmise sur le terrain de la concorde civile et sa modulation. Ce qui laisse entendre une modulation de la violence en même temps. Une telle politique ne dépasse pas le stade de l’enjeu d’affrontements entre clans où se positionne, bien sûr, A. Bouteflika. Ce dernier doit faire face à un double passif : avant d’être le président élu, il est le président désigné. Il n’échappe pas aux contraintes exercées sur lui par le diwan. Ce dernier, par le canal de l’état-major de l’armée et des services secrets, a été l’artisan, le maître d’ouvre et le bénéficiaire des accords de trêve avec l’AIS. Dans l’opacité totale qui a caractérisé l’action des services de sécurité d’une manière générale, depuis 1992 pour ne retenir que cette date, s’inscrit aussi cette action de récupération des maquis islamistes. Les conditions de la reddition sont marquées du sceau de ceux qui les ont conçues et qui ont certainement un plan pour leur mise en ouvre. Ce sont par conséquent les gens d’armes qui détiennent les clés de cette entreprise. D’autant plus que Bouteflika n’a pas – pas plus que ses prédécesseurs – la maîtrise des forces armées. La maîtrise ou non de ces moyens de coercition dans l’Etat réagit sur tout le reste, en particulier sur les appareils judiciaires, administratifs, économiques. De ce point de vue, et quand bien même il y aurait un bilan, il faudrait le ramener soigneusement à cette lecture des rapports à l’intérieur d’appareils qui activent selon leur propre logique et les jeux d’intérêts. Pour tout dire, Bouteflika est diminué dans son pouvoir présidentiel d’abord, il met en ouvre une politique de concorde civile dont le soubassement lui échappe ensuite. Il mesure d’ailleurs ses difficultés et le harcèlement dont il fait l’objet dans deux directions : l’une c’est la permanence, voire l’entretien de la violence et d’un climat d’insécurité, la seconde c’est la levée de boucliers contre les résultats d’une politique qui, en réalité, n’avait comme couverture que la tutelle du diwan. Les quotidiens phares de la presse indépendante se chargent d’affranchir leur opinion en battant le rappel des mêmes organisations derrière une version actualisée du Comité de sauvegarde de la République, le Comité des citoyens pour la défense de la République, derrière des ténors inattendus d’une société à la civilité aussi rassurante que celle de Boubnider et du commandant Azzedine. En même temps, les journaux se voient confier la mission de signifier publiquement au chef de l’Etat que la couverture accordée en 1999 ne correspond nullement à la durée théoriquement constitutionnalisée du mandat présidentiel.

Des informations récurrentes font état d’une prochaine révision constitutionnelle. Bouteflika voudrait renforcer les pouvoirs présidentiels. Mais ne sommes-nous pas déjà dans un régime présidentiel ?

Dans la bataille engagée pour récupérer les pouvoirs d’un président à part entière, il est normal que Bouteflika ouvre le front de la Constitution. Cela devient un rituel. Chaque nouvel arrivant à la présidence essaye de se tailler l’habit qu’il croit lui aller. Les modélistes et les tailleurs ne manquent pas. La légitimation d’un pouvoir présidentiel par le recours à la Constitution est soumise à l’usure par son caractère répétitif. En réalité, la question de la révision constitutionnelle est le lieu d’une illusion. D’abord, elle fait partie d’un ensemble programmatique où il est question de redorer l’autorité de l’Etat. De ce point de vue, la Constitution pourrait rendre ce service dans la mesure où elle fournit les règles de base de l’organisation de l’Etat et d’une rationalisation possible des pouvoirs qui le dirigent. La Constitution renvoie également au droit, par conséquent elle introduit la symbolique d’un pouvoir régulateur, pacifique et par là même susceptible d’entraîner l’adhésion à la fois des acteurs politiques et des citoyens. De ce point de vue, Bouteflika tente de se placer sur un terrain à partir duquel il espère gêner ses tuteurs et peut-être arriver à se soustraire à leur contrôle. Pour cela, il faudrait qu’il puisse aborder cette question réellement et directement. Dans une telle hypothèse, ce n’est pas le renforcement théorique des pouvoirs du président qu’il faut poser, parce que ces pouvoirs sont immenses. Il n’est pas un secteur dans lequel il ne puisse théoriquement intervenir. Mais à l’étendue de ce pouvoir présidentiel musclé correspond une impuissance à l’exercer. Tout simplement parce que la Constitution est coiffée par un pouvoir supraconstitutionnel qui n’est inscrit nulle part dans les textes, mais dont l’efficacité tutélaire est évidente, le diwan des généraux qui garde la maîtrise sur le monopole de la force armée sans relever ni de la légitimité ni de la légalité. On comprendra pourquoi le renforcement d’un pouvoir sous tutelle ne peut être autre chose qu’un pouvoir encore plus affaibli. Cependant, cela fait partie du jeu et des illusions qui vont, sous couvert de débats dans la presse, entre spécialistes, journalistes, hommes politiques, nous installer pendant quelques mois dans un manège de nature à faire croire que nous sommes en prise sur des questions où le dernier mot serait celui du droit. La mystification aura une fois encore rempli le rôle pour lequel elle aura été montée avec la mise en scène correspondante. Des rumeurs véhiculées par la presse font état d’une suppression du Conseil de la nation pour le remplacer par une assemblée ou un conseil des sages, entièrement désigné, après avoir justifié la suppression de l’actuelle seconde chambre par le fait qu’elle était composée d’un tiers de membres nommés. Si la prochaine Constitution est conçue à partir d’une telle démarche, le président de la République espère résoudre le conflit de pouvoir en s’attribuant des signes napoléoniens.

A propos de respect de la Constitution, le Conseil constitutionnel a annulé, plus de deux ans après sa promulgation, le texte législatif qui faisait du Grand-Alger un gouvernorat. Est-ce normal ?

Je n’ai pas pris connaissance de la décision proprement dite du Conseil constitutionnel. J’ai seulement appris que ce dernier a annulé pour inconstitutionnalité l’ordonnance instituant le gouvernorat du Grand-Alger. Je ne sais pas sur quels arguments le Conseil a fondé sa décision. Celle-ci révèle toutefois que l’article 165, en n’enfermant pas la saisine du Conseil dans des délais stricts, peut ouvrir la voie à des ajustements politiques, administratifs ou économiques en liaison avec les affrontements du moment. On ne comprend pas pourquoi le chef de l’Etat n’a pas tout simplement procédé par abrogation pure et simple d’un texte qui ne convenait pas à sa stratégie de l’organisation et de l’action administratives. Pourquoi utiliser la procédure législative en passant par l’ordonnance, après avoir mouillé le Conseil constitutionnel ? Etait-ce dans l’objectif de jauger l’épaisseur et la docilité de ses membres en vue de projets à venir ? Etait-ce pour se donner un surcroît de protection à dimension légaliste pour l’opposer aux soutiens politiques du ministre-gouverneur ? Dans tous les cas, la décision du Conseil qui conduit à priver de tout effet juridique l’ordonnance créant le gouvernorat entraîne nullité juridique de tous ses actes passés. Ce qui ne va pas sans problèmes. On sait que le gouvernorat a redessiné l’aménagement territorial dans le Grand-Alger avec des retombées sur le plan foncier et immobilier dans les villes, particulièrement Alger. Les bénéficiaires de ces opérations sont liés entre eux dans un enchevêtrement d’intérêts qui met aux prises et en action des dignitaires de différentes obédiences et des acteurs de la scène politique appartenant à différents corps de l’armée, de l’administration ou de l’économie. A cela, il faut ajouter les accords de partenariat et les marchés qui les accompagnent dans lesquels s’est lancé l’ex-ministre-gouverneur, en particulier avec la ville de Lyon. D’où le rétablissement de l’ancien statut de la wilaya d’Alger par abrogation de l’ordonnance de 1997 installant le territoire de la wilaya sous l’empire d’autres règles pour l’avenir. Mais la décision d’inconstitutionnalité, elle, donne l’occasion de manier la carotte et le bâton en cherchant à obtenir la docilité de potentats désormais sans couverture juridique pour des acquis douteux et néanmoins juteux. On voit que l’usage du droit est purement instrumental. Les buts poursuivis ne sont ni la moralisation ni la rationalisation, mais le renforcement de positions en vue de ménager l’avenir.

Le diwan des généraux, comme vous l’appelez, serait maintenant totalement dominé par le courant éradicateur. Est-ce une rupture de l’équilibre au sein de cette institution ? Est-ce favorable à Bouteflika et surtout est-ce favorable à une éventuelle sortie de crise ?

Le récent mouvement au sein de l’ANP donne effectivement l’impression d’un diwan soudé autour de l’équipe du général Mohamed Lamari. Les départs à la retraite de généraux comme Derradji confirment la victoire des éradicateurs dans l’affrontement qui les a engagés contre le clan Zeroual-Betchine. Cela montre a posteriori que les affrontements de l’année 1998 annonçaient des reclassements en profondeur et explique la violence du clan déterminé à remporter la bataille. L’homogénéité apparente du clan qui domine le diwan aujourd’hui souligne un clivage qui remonte à une quarantaine d’années entre les deux composantes premières qui ont pris en main les structures d’encadrement de l’armée. Ce clivage met en opposition officiers résistants dont certains ont été aussi des militants du mouvement nationaliste (PPA-MTLD) ou oulémistes et les officiers ou sous-officiers en provenance des régiments de l’armée française, fils de militaires ou d’anciens de l’armée française. Si le courage et l’engagement aussi bien politique (lire L’affaire des officiers algériens du lieutenant A. Rahmani) que militaire n’ont pas manqué aux volontaires issus de l’armée française, le fait est qu’un grand nombre ont été éloignés des zones de combat pour être affectés à des tâches de formation d’une armée qui se préparait à la conquête du pouvoir. C’est dans ce sens et à la constitution de ce vivier que le MALG et les services de Boussouf ont travaillé pour laisser affiner le procédé par H. Boumediene et la sécurité militaire. Les arguments de ce dernier sur la haute compétence technique des officiers issus de l’armée française sur lesquels il entendait s’appuyer dissimulaient en fait la volonté de se fidéliser une clientèle que la confrontation à la légitimité historique risquait de fragiliser par comparaison aux officiers partisans de l’intérieur. La méthode est inspirée des pratiques du KGB qui consistaient à fournir des postes de responsabilité à des personnes qui, par souci de protection assurée par une hiérarchie, devenaient d’une docilité à toute épreuve. C’est à l’ombre de H. Boumediene d’abord que les officiers issus de l’armée française ont renforcé leurs positions face à d’anciens résistants dont la flamme patriotique a vite cédé devant la convoitise du butin de guerre. Les uns et les autres ont, depuis, poussé leurs poulains ou leurs pions ; il y a eu des croisements sur la base de stratégies matrimoniales, mais aussi des associations d’affaires si bien que ces milieux sont frappés de métissages multiples. Cependant, le clivage persiste parce qu’il se source à des pesanteurs historiques. Frère d’armes des sous-officiers et officiers de l’armée française, Chadli a favorisé, sur les conseils de celui qui allait bénéficier d’un avancement au grade de général-major alors qu’il était sans commandement, Larbi Belkheir, la promotion des anciens de l’armée française contre ceux qui devenaient un peu le second collège, les indigènes de l’ANP. C’est dans cet ensemble assorti du souci de protéger des intérêts menacés que se sont développées les batailles durant la présidence Zeroual qui, associé à Betchine, entendait refaire le terrain perdu et reprendre l’initiative. D’où l’opposition de plus en plus marquée entre les composantes du diwan sur la voie à suivre pour mettre fin aux affrontements avec les groupes armés. D’où le rebondissement du contentieux à la suite du dernier nettoyage de l’état-major et des régions militaires entre Ali Kafi et Khaled Nezzar. Au-delà des déballages assortis de qualificatifs où la nuance n’était pas de mise, ce qui frappe c’est la révélation explicite de ne pas avoir assumé clairement des choix maintenus enfouis dans des luttes d’appareils, laissant ainsi à de telles batailles le soin de décider du sort pour l’avenir. Dans des questions où Etat, nation, armée sont en cause. Et où des dizaines de milliers d’Algériens sont tombés. Devant cet éclatement des déchirements sur les initiatives prises depuis 1992 par les uns et les autres, Bouteflika peut espérer gagner une position d’arbitre entre les uns et les autres, en s’appuyant tantôt sur le glaive des uns, tantôt sur la légitimité des autres, et finir par empocher le tout. Dans ce tourbillon, le panneau indicateur «sortie de crise» ne trouve pas sa place. Tant que les forces de coercition ayant le pouvoir de développer ou de faire cesser les violences ne sont pas contrôlées politiquement dans un ensemble institutionnel qu’elles tiennent sous tutelle, la fin de la crise n’est pas pour demain hélas.

Dans quelques jours, Abdelaziz Bouteflika boucle la première année de son «élection». Quel bilan pouvez-vous en tirer ?

Quel autre bilan pourrait-on esquisser d’une politique qui reste engluée dans des foyers de violence soigneusement entretenus et suscités par référence à des engagements non écrits et néanmoins souscrits à l’issue de tous ceux qui se sont déterminés sur la base de la réconciliation nationale ? Le bilan devrait porter essentiellement sur la nature des pouvoirs d’un président et du sort qui leur est fait. Les privatisations offrent l’illusion d’une ouverture sur l’affairisme mondial ambiant et d’une légitimation de rechange par le recours aux relations extérieures. Mais, là aussi, le diwan n’est pas démuni dans la mesure où il est déjà en position concurrentielle. L’ouverture du marché à la sauvagerie du capital fait l’unanimité sauf sur le partage des dividendes. A l’exclusion de tous ceux qui payent quotidiennement la note dans tous les compartiments de l’existence, c’est-à-dire l’immense majorité des Algériens.

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