Les Quatre s’inscrivent dans la durée

Annonçant d’autres actions après le 30 mai

Les Quatre s’inscrivent dans la durée

Par Mohamed Zaâf, Le Jeune Indépendant, 29 mai 2002

Le groupe des Quatre – Ali-Yahia Abdennour, Rachid Benyellès, Hocine Aït-Ahmed (représenté par Ahmed Djeddaï) et Ahmed-Taleb Ibrahimi – a réitéré, hier, son rejet des législatives du 30 mai, considérées comme une «mascarade électorale qui sème les germes de la discorde» et appelé à une sortie de crise «à même de permettre au pays de retrouver la paix et la stabilité, deux préalables indispensables à toute normalisation véritable de la vie politique».

Dans une conférence de presse, M. Ahmed Djeddaï a déclaré s’attendre à ce que le taux de participation soit «peut-être le plus faible du pays, sachant que les scrutins qui se sont déroulés dans le passé étaient entachés de fraude massive». «J’ai été étonné par la défiance des jeunes envers le scrutin», a-t-il dit lorsqu’il parlait de ses multiples déplacements à travers le territoire ces derniers jours. M. Djeddaï devait avertir sur les préparatifs du pouvoir qui prévoit de ramener en Kabylie un électorat de rechange pour parer au rejet du vote par les populations locales. Selon les Quatre, les tenants du pouvoir redoutent que le niveau de participation réelle «ne révèle au monde toute l’ampleur de leur isolement intérieur et ne détériore encore plus l’image extérieure de l’Algérie qu’ils prétendent avoir réhabilitée». Donc, la réussite de l’opération électorale est une question «de vie ou de mort» pour le pouvoir, soulignent-ils. Interrogé sur la défaillance des personnalités qui devaient se joindre initialement à l’action des Quatre, M. Benyellès a regretté leur désengagement : «Ils ne veulent pas prendre position ; là, est la réalité», a-t-il dit. Sur insistance du journaliste, M. Benyellès devait citer le nom de Mouloud Hamrouche (ex-chef de gouvernement sous Bendjedid) parmi les défaillants. De son côté, Me Ali-Yahia Abdennour évoquait (faisant vraisemblablement allusion au RCD de Saïd Sadi) les divergences fondamentales sur les objectifs entre lesQuatre qui pensent que le peuple a le droit de choisir souverainement ses représentants à tous les niveaux et ceux qui pensent que le peuple n’est pas encore mûr et qu’il lui faut un tuteur et une éternelle transition.

«En cette heure grave pour le destin de la nation, personne n’a le droit de se confiner dans le mutisme dès lors que l’unité et la dignité de l’Algérie sont en jeu», estimaient les Quatre dans leur déclaration introductive. Dans l’une de ses réponses, le Dr Taleb Ibrahimi refusait de voir la crise algérienne confinée à un problème de sensibilité. «Il est étrange d’expliquer les événements par une question de sensibilité entre ceux qui gouvernent l’Algérie aujourd’hui et ceux qui se trouvent dans l’opposition», alors que «les relations, a-t-il relevé, étaient très étroites» auparavant du temps du parti unique.

«Si la question des générations se pose, je veux affirmer ici que nous sommes prêts, nous la génération de Novembre, à nous retirer définitivement de la vie politique dans la mesure où ce retrait concerne l’ensemble des éléments (novembristes) qu’ils soient civils ou militaires.»

«En ce qui nous concerne, nous les quatre, il se trouve autour de nous un groupe de jeunes, d’universitaires de la deuxième génération qui œuvrent actuellement à élargir le cercle favorable à la déclaration du 16 avril», a-t-il ajouté. Pour lui, la configuration de la prochaine assemblée est d’ores et déjà connue dans les hautes sphères. Alors qu’une participation de 60% sera annoncée, le FLN et le RND se partageront 70% des sièges à l’APN avec un avantage cette fois au Front, qui se verrait pourvu à lui seul de 40% des sièges, dévoilait-il. Le tir présidentiel, qui reprochait aux opposants leur action à l’étranger, a connu un retour de flammes avec l’intervention incendiaire du général à la retraite Benyellès. «Qui a fait une navette de vingt ans entre les rives du lac Leman et le Golfe. De quoi vivait-il ? avait -il hérité d’un oncle d’Amérique ? Est-ce moi qui était rétribué à l’étranger, alors que je n’y ai pas mis les pieds y compris durant les moments les plus forts de l’insécurité ?», lançait-il en substance dans sa réponse au Président. L’appui français apporté publiquement par le Quai d’Orsay à l’opération électorale et son prolongement avec «les directives» de l’ambassade française à Alger ont également été évoqués. Le groupe des Quatre a enfin souligné que son action pacifique s’inscrit dans la durée et qu’il prévoit d’annoncer les actions qu’il projette après le 30 mai.

voir aussi
 Déclaration de personnalités à propos des élections (16.04.02)