Alors que 93 pays et 620 avocats chiliens dénoncent les menaces contre la CPI : Une dizaine d’États appuient la plainte de Pretoria contre Israël

Salima Tlemçani, El Watan, 23 juin 2024

Après l’Espagne, c’est au tour de Cuba d’annoncer son intention de
soutenir la procédure sud-africaine contre Israël, devant la Cour
internationale de justice (CIJ), pour des crimes de génocide à Ghaza.

Au Chili, alors que La Havane a introduit, devant cette haute
juridiction de l’Onu, une requête d’intervention dans la procédure de
Pretoria, 620 avocats chiliens ont dénoncé «les pressions et menaces
exercées par Washington» contre les magistrats et le personnel de la
Cour pénale internationale (CPI), tout en saluant le soutien exprimé par
93 Etats, à cette cour, dont le Chili.

Accusé par les ONG des droits de l’homme, des experts et organisme
onusiens, «de crimes de guerre, de massacres collectifs, de déportation
forcée et d’épuration ethnique», Israël se retrouve au ban de la
communauté internationale, malgré le soutien indéfectible de ses alliés
– les Etats-Unis, l’Allemagne, la France et le Royaume-Uni – qui lui
permet de poursuivre sa guerre génocidaire à Ghaza.

L’Etat hébreu est de plus en plus isolé et toutes les enquêtes des
experts onusiens des droits de l’homme l’accusent de «graves violations
du droit humanitaire».

Le haut commissaire onusien des droits de l’homme et la présidente de la
Commission d’enquête par le Conseil des droits de l’homme de l’ONU ont
dénoncé «le mépris flagrant du droit international dans l’ensemble du
territoire palestinien occupé», qui a eu «un impact disproportionné sur
les enfants» palestiniens. «A Ghaza, les forces de sécurité israéliennes
ont tué et mutilé des dizaines de milliers d’enfants, et des milliers
d’autres restent probablement sous les décombres.

Les attaques israéliennes ont également gravement affecté les
infrastructures essentielles au bien-être des enfants, notamment les
hôpitaux, les écoles et les services de base.» Des violations qualifiées
de crimes de guerre et de crime contre l’humanité, alors que de nombreux
pays continuent à soutenir la procédure sud-africaine, devant la Cour
internationale de justice (CIJ), la plus haute juridiction de l’Onu,
engagée contre Israël, pour des actes de génocide à Ghaza.

Ainsi, après l’Espagne et le Chili, c’est au tour de Cuba d’annoncer son
intention d’appuyer la plainte de Pretoria, rejoignant ainsi, entre
autres, le Nicaragua, le Mexique, la Libye, l’Egypte, la Palestine, la
Turquie et la Colombie.

Son chef de la diplomatie, Bruno Rodriguez, a déclaré hier, que «Cuba
usera de son droit de présenter, en tant que pays tiers, son
interprétation des règles de l’accord, qu’Israël a violé de manière
flagrante par ses actions dans les territoires palestiniens illégalement
occupés», ajoutant, dans un communiqué diffusé hier, que cette
initiative illustre «son engagement ferme et durable à soutenir et à
contribuer autant que possible aux efforts internationaux légitimes
visant à mettre fin au génocide commis contre le peuple palestinien».

La décision est intervenue vingt-quatre heures après la déclaration de
620 avocats chiliens, auteurs de la plainte contre Israël, devant la
CPI, plainte pour des «crimes de guerre, contre l’humanité et de
génocide», à Ghaza, demandant l’arrestation du Premier ministre
israélien, Benyamin Netanyahu, de son ministre de la Défense, Yoav
Gallant, et du chef de son armée, Herzi Halevi, avant d’évoquer une
lettre de soutien aux magistrats et personnel de la CPI, signée par 93
Etats, qui font l’objet de pressions et de menaces exercées par Israël
et Washington.

Dans cette déclaration diffusée sur la toile, les signataires ont
commencé par condamner «les pressions illégales qui violent les
principes universels d’indépendance et l’impartialité des tribunaux
internationaux au point de constituer le crime d’entrave à la justice».

Les avocats ont par ailleurs réitéré leur «engagement envers toutes les
parties de la déclaration publiée par 93 pays, dont le Chili, en soutien
à la Cour pénale internationale, qui rejette toute forme de menace et
d’intimidation contre ses employés et contre le tribunal lui-même, au
nom de la justice, pour soutenir sa mission principale consistant à
éviter les failles de l’impunité mondiale».
620 avocats chiliens dénoncent les menaces contre la CPI

Pour Nelson Haddad, et au nom de l’équipe juridique chilienne, «les
pressions exercées sur la Cour sont inacceptables, et ils manquent de
toute conscience morale et de toute modestie et constituent une
violation grave du Statut de Rome» a-t-elle fait savoir aux médias.

L’avocate faisait référence au vote de la Chambre des représentants des
Etats-Unis, d’une loi visant à sanctionner les responsables de la CPI,
dont le procureur en chef, Karim Khan, le président et les magistrats
pour avoir incriminé ou demandé et validé les mandats d’arrêt contre
les dirigeants israéliens, pour les crimes commis à Ghaza. A ce titre,
elle n’a pas mis de gants pour affirmer que Washington «punit la Cour
qui ne fait que son devoir pour lequel elle était censée être établie,
puisque 124 pays ont signé le Traité de Rome».

Et d’ajouter : «On ne peut pas non plus accepter que 12 membres
républicains du Sénat américain aient publié une déclaration appelant à
l’imposition de sanctions à la Cour pour qu’elle puisse mener à bien sa
mission, et on ne peut pas non plus accepter qu’Israël, par
l’intermédiaire du Mossad, mène des activités d’espionnage, activités et
tentatives de traquer les membres de la Cour international.»

Cette ancienne diplomate chilienne considère que «ces pressions
d’intimidation contre ceux qui travaillent à la Cour pénale
internationale violent un principe fondamental du droit international
relatif à l’indépendance et à l’autorité du pouvoir judiciaire, à
l’administration de la justice et à la justice et aux décisions rendues
librement dans l’exercice de ses fonctions par la Cour pénale
internationale (…)

L’intimidation constitue un crime d’entrave à la justice, et le tribunal
peut se référer à l’article 70 du Statut de Rome pour prendre des
mesures pénales contre des groupes, des pays ou des secteurs aux
Etats-Unis et en Israël qui ont osé de manière inacceptable exercer ces
droits illégaux et pressions».

«Il n’y a pas de place pour l’impunité et les responsables doivent être
traduits en justice et punis en fonction de la nature des crimes commis,
et conformément aux peines stipulées dans le statut du tribunal qui l’a
créé.» Haddad a conclu en disant : «Les Palestiniens ont le droit
légitime, conformément au droit international, de résister, de repousser
l’agresseur et de résister à l’occupation militaire étrangère à laquelle
ils sont soumis depuis des décennies par l’armée d’occupation
israélienne, comme le prouve la résolution 3070 de l’Assemblée générale
de l’Onu.»

Le Chili, faut-il le rappeler, avait, il y a un mois, annoncé son
intention d’appuyer la procédure sud-africaine, contre Israël, devant la
CIJ. Son président Gabriel Boric avait déclaré devant le Parlement,
qu’«il est nécessaire d’obtenir une réponse ferme de la part de la
communauté internationale face aux crimes perpétrés dans la bande de
Ghaza», avant de préciser que dans ce cadre, «le Chili deviendrait
partie prenante et soutiendrait le procès intenté par l’Afrique du Sud
contre Israël devant la CIJ, dans le cadre de la Convention des Nations
unies sur le génocide».

Tout comme le Mexique, le Chili avait engagé, dès le mois de janvier
dernier, une procédure contre l’Etat hébreu, devant la CPI, pour des
crimes de guerre, contre l’humanité et de génocide à Ghaza. Il était le
7e Etat à rejoindre l’Afrique du Sud, alors que Cuba est le 8e Etat sur
la liste des pays qui poursuivent Israël, d’avoir violé ses engagements
prévus par la Convention internationale de lutte et de prévention du
crime de génocide, ainsi que le droit humanitaire international et le
droit international.

Ces actions devant la justice internationale n’ont pour l’instant pas
freiné la machine de guerre génocidaire d’Israël. Elle fonctionne sans
répit, faisant plus de 37 700 tués.