La gouvernance néolibérale en marche

Rafik Lebjaoui, Algeria-Watch, 21 Avril 2024

La gestion ultra autoritaire de la pandémie du Covid a indiqué clairement l’orientation choisie par l’oligarchie occidentale pour assurer le contrôle des populations et encadrer les sociétés lors de circonstances exceptionnelles. Les dispositifs coercitifs mis en œuvre à cette occasion ont été testés et évalués dans la perspective de crises majeures. La pandémie virale a été présentée comme l’effet d’une agression d’un type alternatif dans un contexte de remise en cause des rapports internationaux. L’Occident, historiquement construit sur la guerre, ne peut envisager effectivement les transformations des équilibres globaux en sa défaveur sans tenter d’y apporter une réponse militaire. Le maintien de l’Otan, et l’élargissement de sa composante comme celle de ses zones d’intervention, en dépit de la disparition de son ennemi fondamental, l’URSS est une indication sans ambiguïté des dispositions bellicistes de ses dirigeants. A la lumière des conflits déjà en cours, notamment en Ukraine, et d’escalades ouvertement souhaitées par des dirigeants occidentaux, le constat que la crise du Covid a constitué une sorte de répétition générale de gestion d’une situation d’exception s’impose comme une évidence.
 
Ostensiblement, dès les premiers jours de la pandémie, les mesures dérogatoires se sont succédées hors de tout référent institutionnel, sans consultations démocratiques et sans la moindre reddition de comptes. Ainsi un dispositif rigoureux a été rapidement imposé sans réelle discussion : le confinement strict et le couvre-feu, sous surveillance policière assortie de la menace de lourdes amendes, ont été promulgué sans débat. De même que l’opacité totale a régné lors de la passation de contrats signés avec les grandes sociétés pharmaceutiques.

L’administration suprême d’États autrefois soucieux de leurs façades civiles a été officiellement déléguée à des structures militarisées, à l’image d’un Conseil de Défense présidé par le chef de l’État en France. Les dispositions décrétées par ces autorités de fait, incluaient notamment la surveillance par drone et l’obligation du port du masque dans l’espace public ainsi que sur les lieux de travail. Il reste dans la mémoire collective que cet arsenal de contraintes inédites a installé une atmosphère oppressante comparable à celle d’un avant-guerre.
 
La référence à un conflit armé n’est pas fortuite, le président français, Emmanuel Macron, n’avait-il pas évoqué un état de guerre lors de ses premières interventions au début de la pandémie? Le message était-il seulement destiné à frapper les esprits? Ou cet élément de langage était-il destiné à conditionner l’opinion en déployant des préalables psychologiques à l’instauration durable d’un état d’exception inavoué. Il reste que le message était par trop direct pour n’être qu’un artifice verbal? 
 
De l’autre côté de l’Atlantique, le premier ministre du Canada, Justin Trudeau, a pour sa part, dans le même mouvement, dégainé le bâton et offert la carotte. En effet, le gouvernement a pris la décision d’assurer un revenu à tous ceux qui avaient perdu leur emploi et, dans la même séquence, d’installer l’État d’urgence contre les camionneurs qui avaient bloqué pacifiquement la capitale pour protester contre les mesures visant à contenir la propagation du virus, notamment l’obligation du passeport sanitaire.

Engagées dans une dynamique répressive, les autorités ne se sont pas contentées d’appréhender les leaders du mouvement de contestation, ils ont bloqué leurs comptes bancaires en alléguant, par médias interposés, une hypothétique ingérence étrangère (Russe ou Chinoise), qui n’a, bien entendu, jamais été démontrée.
 
C’était la deuxième fois dans l’histoire du pays que l’État d’urgence a été instauré. Le premier État d’urgence avait été décrété en octobre 1970 par Pierre-Elliott-Trudeau, père de l’actuel premier ministre, après l’enlèvement de deux personnalités par un mouvement indépendantiste québécois.
 
Durant la période, le premier ministre canadien s’est astreint à une conférence de presse quotidienne sur les développements de la situation sanitaire. Ici également, tant dans la forme que dans le ton, le parallèle avec un mode de communication de guerre s’est imposé à tous les spectateurs de l’exercice. Afin de confirmer sans doute cette option militariste, un haut gradé des Forces armées canadiennes était chargé de la gestion logistique de la vaccination.
 
Ces mesures exceptionnellement rigoureuses ont constitué de fait les prémisses de l’orientation autoritaire d’une gouvernance néo libérale revisitée. Tout le spectre politique des États occidentaux se réclamant de la démocratie, de la gauche à la droite en passant par le centre ont convergé dans un étonnant unanimisme derrière le chef d’État / chef de guerre. Les parlementaires adoptaient l’une après l’autre les lois décidées au sommet sans sourciller. Très peu de voix discordantes étaient audibles, et quand elles parvenaient à franchir le mur de silence, elles étaient aussitôt clouées au pilori par la quasi-totalité des médias. Dans des pays où la liberté d’expression; le droit au débat contradictoire et aux divergences d’opinions sont portées aux nues, ce soudain monolithisme ne cesse pas de surprendre.

Cette remarquable évolution vers un exécutif centralisé et hiérarchique sans opposition s’est opérée sans contestation notable grâce à la docilité des médias mainstream et à leur extraordinaire capacité à modeler l’opinion publique. De fait, l’offensive autoritaire a été orchestrée par un appareil médiatique univoque et discipliné, relais acritique des directives des chefs de guerre chargé de conformer l’opinion à la doxa officielle.
 
Les grands moyens ont été mobilisés pour présenter comme indiscutables les décisions gouvernementales. Les plateaux de télévision ont été monopolisés par des foules d’experts chargés d’animer des émissions ou la science dans ses dimensions les plus complexes est en permanence invoquée pour discréditer tout discours alternatif. Ainsi la virologie, habituellement compétence de scientifiques spécialisés, est apparue comme un domaine accessible à tous, notamment aux animateurs de télévision et aux commentateurs chargés d’incarner la vox populi. L’agitation médiatique multiforme en interdisant tout débat serein, informé et responsable, a largement participé à la constitution d’un épais écran de fumée sur les enjeux multiples d’une crise inédite…

Le vaccin de la terreur

L’obligation vaccinale ayant été décrétée, une atmosphère contrainte et pesante s’est rapidement installée. Les voix qui se sont élevées contre cette procédure ou qui ont refusé le vaccin ont été accusées de « complotisme » et d’être complices d’assassinats. Les réfractaires risquaient notamment de perdre leur emploi, d’être interdits de voyager et même d’être proscrits des espaces publics. Ceux qui rejetaient la doxa officielle étaient présentés comme des parias ou des marginaux en rupture avec la science et la société.

Dans une atmosphère lourde d’angoisse, des stocks gigantesques de vaccins ont été constitués à coups de dizaines de milliards de dollars auprès des géants pharmaceutiques dans une opacité totale. Dans l’expression d’un égoïsme affiché et d’une absence complète de solidarité, les riches sociétés occidentales ont bénéficié d’une priorité d’accès aux vaccins, les populations des pays moins riches étant abandonnées à leur sort.

En effet, l’ambiance de panique, frisant parfois la psychose collective, a encouragé et justifié une course folle au vaccin, théâtre d’une bataille politico-commerciale globale au cours de laquelle il s’agissait aussi d’éliminer toute concurrence réelle de producteurs non-occidentaux. Ainsi, sans autre argumentaire que le mépris, les vaccins chinois, russes, iraniens ou cubains ont été exclus de l’offre globale dans les pays du G7. La main « invisible » du marché a donné un coup de poing fatal non seulement au libre-échange et à la concurrence, mais aussi à la solidarité internationale.

Dans une surenchère démagogique, les médias occidentaux et leurs bataillons d’experts de circonstance n’ont pas cessé de décrier les vaccins chinois et russes, présentés comme inefficaces ou même dangereux. Ceci, même si l’organisation mondiale de la santé (OMS) avait bel et bien homologué ces produits. Cette campagne n’a pas seulement constitué une expression de la confrontation géopolitique, il s’agissait surtout de discréditer radicalement une concurrence préjudiciable aux intérêts des méga-sociétés pharmaceutiques occidentales. Une avalanche d’études, d’articles et de documents statistiques censés démontrer l’inefficacité de ces vaccins « exotiques » a ainsi occupé la une des journaux « sérieux ». Il fallait en convaincre des populations déboussolées : les vaccins « civilisés » autrement ceux fabriqués dans les pays du G7, étaient les seuls capables d’endiguer la pandémie.

Dans le cours rapide des événements, la solidarité internationale a été très peu évoquée, le chacun pour soi a été la règle même à l’intérieur de l’Union Européenne. La pandémie n’a en rien influé sur les règlements de compte avec des adversaires politiques. Il n’est que d’évoquer à cet égard le refus du FMI de consentir un prêt de cinq milliards de dollars à l’Iran, pour permettre à ce pays lourdement frappé par des sanctions occidentales, d’acquérir des équipements médicaux d’urgence, notamment des respirateurs.

Dans la même séquence d’indignité, comment ne pas évoquer le comportement méprisable d’Israël vis à vis des Palestiniens? Alors que les autorités de Tel-Aviv se targuaient d’avoir réussi à vacciner la moitié de leur population en un temps record grâce à un accord avec les géants pharmaceutiques Pfizer et Moderna, les populations palestiniennes, sujets coloniaux, ont été ignorés. Face à la réprobation internationale, l’état colonial a été jusqu’à tenter de se défausser en transférant un million de doses vaccinales proche de la péremption à l’Autorité palestinienne.

L’ubérisation néolibérale, face sombre de la révolution numérique

La crise du Covid a très visiblement stimulé le développement et la généralisation de l’usage des technologies numériques. Que ce soit en matière de recours aux réseaux sociaux, aux plateformes de prestations de services ou aux fournisseurs d’accès aux plateformes d’échanges vidéo. Cette séquence historique est sans doute l’équivalent de la révolution industrielle avec des conséquences très importantes sur les conditions d’existence des êtres humains. Ces conséquences ne sont pas seulement positives en ce qu’elles facilitent le partage et la diffusion des connaissances. La récupération capitaliste du numérique en tant qu’instrument de maximisation du profit et de l’exploitation des travailleurs produit de réels traumas sociaux. Ainsi le télétravail, dont les effets d’invasion de la sphère privée par les entreprises ont été massifs et délétères, s’est institutionnalisé et perdure bien au-delà des périodes critiques ou les activités en « distanciel » s’imposaient comme nécessité indiscutable.
 
A la faveur des confinements, des plateformes virtuelles, Airbnb, Uber, TikTok, YouTube et bien d’autres ont connu une expansion accélérée se transformant en puissances financières globales, conduisant à la mutation des formes des échanges de services et des relations sociales, notamment des rapports entre employeurs et employés. De fait, ces plateformes virtuelles répondent à une demande de services, emploient des individus dans un environnement complètement dématérialisé. La relation classique entre une entreprise et un travailleur disparaît au profit d’un rapport contractuel très lâche, déshumanisé, hors du salariat et n’offrant pas de garantie aux travailleurs. Ces centres virtuels sans existence physique réelle exploitent aujourd’hui, dans un anonymat presque complet, des millions de personnes à travers la planète.

La situation des livreurs attachés à la plateforme Uber est révélatrice des nouveaux rapports sociaux imposés par le néolibéralisme. Pour être intégré à ce dispositif de services, Il suffit de télécharger l’application sur un smartphone, d’envoyer une photographie, quelques informations personnelles et sur le véhicule que l’on compte utiliser. Après quelques clics et en quelques heures l’on devient ainsi chauffeur ou livreur chez Uber. La « recrue » n’a jamais rencontré un représentant de l’entreprise dont elle n’est pas un membre du personnel mais un simple utilisateur d’une plateforme technologique. La plateforme alloue des missions et rémunère cette « recrue » d’une portion de la transaction convenue avec le client directement versée sur son compte bancaire. Lorsque ce nouvel utilisateur commence à travailler, c’est l’application qui règle sa part de la transaction dans son compte bancaire. Et c’est avec son propre outil de travail, sa propre voiture ou sa propre bicyclette, qu’il assure sa mission.

« L’industrie » numérique produit ainsi massivement une catégorie nouvelle de travailleurs isolés. Dans une situation plus précaire encore que les personnels en télétravail, ces travailleurs effectuent leurs tâches individuellement, ne connaissent pas des collègues qu’ils ne rencontrent pas. Mais pour le néolibéralisme friand de néologismes mystificateurs, il ne s’agit pas de travailleurs précaires et solitaires, mais bien « d’autoentrepreneurs » …

L’ubérisation du monde concerne toute la gamme des services et influe directement sur la vie quotidienne des citoyens. Ainsi, l’intermédiation offerte par Airbnb est à l’origine de l’approfondissement de la pénurie mondiale de logement. De nombreux articles et reportages de la presse internationale confirme une situation inédite aux effets sociaux significatifs. Ainsi, à Florence, très importante destination du tourisme culturel en Italie, il n’est pas rare que des immeubles entiers du centre-ville soient presqu’exclusivement occupés par des non-résidents. La location Airbnb, beaucoup plus rémunératrices pour les propriétaires, a chassé les habitants de centre urbain. Le même phénomène est observé dans d’autres villes à travers le monde. Ainsi en Espagne, à Barcelone et à Malaga notamment, des citoyens s’organisent pour dénoncer la mainmise du système Airbnb sur le logement, rendant l’immobilier inaccessible aux habitants de la ville contraints de migrer vers des périphéries de plus en plus lointaines.

La civilisation du numérique néolibérale est bien celle des fractures sociales. La gouvernance au service des intérêts des catégories les plus riches est confortée par l’atomisation du monde du travail, les employés à domicile attachés à leurs smartphones et face à un écran d’ordinateur ne se syndicalisent pas tout comme les chauffeurs et les livreurs « ubérisés ».

Les tendances autoritaristes du néolibéralisme sont, de fait, encouragées par le recul très net de l’influence des corps intermédiaires, en particulier des syndicats dont le poids politique et les capacités de négociations sont en érosion continue.

Fin de cycle d’un système sans repères

Les différents épisodes politiques et sociaux de ces dernières années dans les démocraties libérales, notamment les contestations populaires alimentées par le creusement vertigineux des inégalités et l’extension de la précarité, montrent clairement que l’oligarchie occidentale, plus que jamais arcboutée sur ses logiques de captation prédatrice des richesses, n’est plus en capacité d’offrir des perspectives à ses populations, notamment à une jeunesse condamnée à vivre des conditions nettement moins favorables que ses aînés.
 
The American way of life (et accessoirement le fameux « jardin entouré d’une jungle », dépeint par Josep Borrel, le chef de la diplomatie européenne) s’étant fracassé sur le mur des réalités brutales du néo libéralisme, les dominants n’ont pas manqué d’expédients pour neutraliser les soubresauts socio-politiques et la contestation d’un ordre établi autour du maintien, quoi qu’il en coûte, de leur emprise sur les États. Grèves asphyxiées, mobilisations empêchées, manifestations réprimées et déploiement d’un arsenal juridique liberticide rythment la vie politique occidentale. Tous les moyens sont employés pour neutraliser les contestations. En France, la répression extraordinairement brutale du mouvement des Gilets Jaunes a été l’illustration sans équivoque du tournant policier de la gestion sociale par le néolibéralisme.

L’orientation répressive de l’exécutif français a été accompagnée par le recours systématique au fameux article 49.3 de la Constitution qui met fin à tout débat parlementaire sur un projet de loi gouvernemental. En 2023, le gouvernement français a utilisé 23 fois l’arme du 49.3

Ce déploiement autoritariste est assis sur une stratégie de diversion politique destinée à détourner les frustrations sociales et le mécontentement vers des cibles beaucoup plus accessibles que les responsables réels des reculs démocratiques, de l’impasse économiques et de la fin de l’État providence. La parade politique traditionnelle des oligarchies face à la montée des contestations est la diversion raciste. Les populations d’origine non européenne, en particulier musulmanes sont la cible inlassablement désignée par les médias dominants. L’orientation de la colère populaire vers un ennemi intérieur facilement identifiable, souvent au bas de l’échelle sociale est l’axe de propagande mis en œuvre depuis plusieurs décennies. Ces catégories sont accusées de miner les fondements des sociétés d’accueils en étant responsable de l’insécurité et du chômage tout en bénéficiant de manière illégitime des prestations sociales de l’État-providence.

Depuis plus de trente années, l’épouvantail d’une immigration coupable de tous les crimes, présentées de manière mensongère comme un afflux incontrôlable menaçant de submerger les pays envahis, est brandi par des milieux politiques ouvertement soutenus par les oligarchies occidentales. Ce qui est illustré sans contestation possible par la mainmise sur les médias, oligopoles contrôlés par des groupes privés soutenus par les États, et dont l’orientation populiste et raciste s’affiche sans retenue.

Du néolibéralisme au néofascisme

Depuis la fin de l’URSS et la disparition du spectre communiste, l’Occident est à la recherche d’un ennemi de substitution. La fabrication d’un ennemi composite décrit par la propagande occidentale apparaît comme la synthèse de cinquièmes colonnes de migrants « islamiques » réputés non intégrables associées à des puissances étrangères hostiles et agressives, Russie, Chine, Iran et Corée du Nord, désireuses de dépouiller l’Occident, respectueux des libertés et pacifiste, de son rôle mondial. Ce narratif sous-jacent est porté avec détermination par des courants divers, nationalistes, républicains ou néofascistes, héritiers des pires modèles politiques européens, qui reconstruisent leur prévalence électorale avec, comme hier, l’appui décisif des oligarchies.

Mais, tout autant qu’un éloquent track-record politique, la dérive autoritaire manifeste des occidentaux, très perceptible par l’opinion internationale, décrédibilise leur posture de défenseurs de la démocratie et des droits de l’homme. Les critiques contre les « dictatures orientales » n’ont de ce fait que peu d’impact sur des sociétés qui ont une connaissance historique, trop souvent douloureuse, de l’oppression d’un groupe de pays dont la prospérité résulte largement du pillage impérial.

Les glissements progressifs du néolibéralisme vers une forme d’autoritarisme univoque s’accélèrent au rythme de l’élargissement des fractures sociales à l’intérieur de son territoire natif et des crises internationales dont il assume la paternité. La guerre coloniale menée contre le peuple palestinien constitue de ce point de vue une étape cruciale dans la mise sous contrôle du débat public. Le génocide perpétré par un État-voyou à Gaza constitue un jalon très important dans l’imposition d’une ligne politique pro-israélienne et le bâillonnement des expressions contradictoires ou alternatives. Les régimes occidentaux tentent d’imposer une représentation mensongère de la situation en Palestine occupée en alignant ouvertement leurs appareils médiatiques sur les thèses coloniales.

En Palestine comme ailleurs, les narratifs officiels sont loin de correspondre aux réalités de déni de droit et de violence coloniale, aux aventures militaires impérialistes, aux invasions sous des prétextes totalement infondés et aux bombardements « démocratiques » qui se succèdent dans une séquence ininterrompue depuis la fin de la deuxième guerre mondiale. Les castes politiques d’États anciennement colonisateurs sont loin d’avoir purgé leur histoire et révoqué une culture de domination et d’oppression.

Il apparaît ainsi au fil des convulsions d’un monde en mouvement que l’occident, cœur du modèle néo-libéral, se replie dans l’émergence et la normalisation des partis d’extrême-droite. Il s’agit bien d’une maturation idéologique sur le temps long décidée et mise en œuvre dès le début des années 1990. Ce sont ces courants ouvertement fascistes ou néo-nazis, qui sont déjà au pouvoir en Europe, ou sur le point de l’être, qui ont pour vocation de mâter les contestations internes du capitalisme blanc et à assurer, face aux nouveaux pôles politico-économiques, la continuité de son hégémonie globale.