Les audiences auront lieu les 8 et 9 avril prochain : Le Nicaragua traîne Berlin devant la CIJ pour complicité de génocide
Salima Tlemçani, El Watan, 17 mars 2024
Alors que l’Afrique du Sud est revenue à la charge le 6 mars, en demandant, pour la seconde fois, à la Cour internationale de justice des mesures conservatoires urgentes contre Israël, la haute juridiction onusienne annonce la programmation, pour les 8 et 9 avril prochain, des audiences relatives aux mêmes demandes présentées le 1er du mois en cours par le Nicaragua contre l’Allemagne, pour sa «participation plausible» au génocide à Ghaza.
Les audiences relatives aux «mesures conservatoires urgentes» demandées par le Nicaragua contre l’Allemagne, pour «sa participation plausible au génocide et aux violations graves du droit international à Ghaza», auront lieu les 8 et 9 avril prochain, au Palais de la Paix, siège de la Cour internationale de justice (CIJ), à La Haye, aux Pays-Bas.
Ces audiences ont été programmées à la suite du dépôt, le 1er du mois en cours, par le Nicaragua, d’une requête introductive d’instance contre l’Allemagne l’accusant «d’avoir manqué à ses obligations découlant de la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide et celles liées à la Convention de Genève de 1949, des protocoles additionnels de celle-ci et de celle du génocide, des principes intangibles du droit international humanitaire et d’autres normes du droit international général relativement au territoire palestinien occupé, en particulier à Ghaza».
La décision de programmation de ces audiences publiques intervient alors que l’Afrique du Sud est revenue à la charge, le 6 du mois en cours, pour exhorter, une seconde fois, cette haute juridiction onusienne d’ordonner des mesures conservatoires urgentes contre Israël, afin d’arrêter les actes de génocide.
Les audiences pourraient avoir lieu durant la deuxième quinzaine du mois d’avril prochain. Dans son communiqué du 1er mars dernier, faut-il le rappeler, la CIJ a précisé que le Nicaragua estime dans sa requête que «chacune des parties contractantes à la Convention sur le génocide est tenue par cet instrument de faire tout son possible pour prévenir la commission d’un génocide et qu’il existe, depuis octobre 2023, un risque reconnu de génocide du peuple palestinien et avant tout la population de Ghaza».
En attendant l’examen au fond de cette requête, le Nicaragua a demandé à la CIJ «de prendre en toute urgence des mesures conservatoires déposées conformément à l’article 41 du statut de la Cour et aux articles 73, 74, 75 de son règlement, en ce qui concerne la participation de l’Allemagne au génocide plausible en cours et aux violations graves du droit international humanitaire et d’autres normes impératives du droit international général commises à Ghaza aux termes de l’article 74 du règlement de la Cour (…) en priorité sur toute autre affaire».
Berlin est le premier allié d’Israël (qui s’est constitué pour soutenir Israël dans l’affaire qui l’oppose à l’Afrique du Sud), qui se retrouve traîné en justice pour son soutien à la guerre génocidaire contre la population de Ghaza.
Le Nicaragua avait menacé l’Allemagne, le Royaume-Uni, les Pays-Bas et le Canada de les «poursuivre», dans le but de mettre fin à leur «complicité dans l’attaque» contre Ghaza. Il avait même annoncé avoir informé les gouvernements des quatre pays de mettre à exécution son intention.
«Israël a manqué et continue de manquer à ses obligations»
Le 23 janvier dernier, faut-il le souligner, le Nicaragua a introduit devant la haute juridiction onusienne une demande d’intervention en qualité de partie dans la procédure engagée par l’Afrique du Sud contre Israël, en attente d’examen dans le fond.
La requête repose sur l’article 62 du statut de la Cour qui stipule : «Lorsqu’un État qui n’est pas partie à une affaire estime qu’un intérêt d’ordre juridique est pour lui en cause, il peut adresser à la Cour une requête aux fins d’intervention».
Le Nicaragua a ajouté, par ailleurs, avoir appelé les gouvernements britannique, allemand, néerlandais et canadien à «arrêter immédiatement la fourniture d’armes, de munitions, de technologies et/ou de composants à Israël, car il est plausible qu’ils aient pu être utilisés pour faciliter ou commettre des violations», sous peine «d’être poursuivis pour complicité» de génocide.
Dans sa requête relative à sa constitution en tant que partie dans le procès intenté par l’Afrique du Sud à Israël, le Nicaragua a expliqué qu’il «a des intérêts d’ordre juridique qui découlent des droits et obligations communs à tous les Etats parties à la Convention sur le génocide», en raison du «caractère universel à la fois de la condamnation du génocide et de la coopération nécessaire pour libérer l’humanité d’un fléau aussi odieux».
Pour lui, le comportement d’Israël est «contraire aux obligations découlant de la convention sur le génocide», en conséquence il «prie la Cour de dire et juger que l’Afrique du Sud et Israël sont tous deux tenus d’agir conformément à l’obligation que leur fait la Convention pour la prévention et la répression du crime de génocide de prendre, en ce qui concerne les membres du groupe des Palestiniens, toutes les mesures raisonnables en leur pouvoir pour prévenir un génocide et qu’Israël a manqué et continue de manquer aux obligations que lui fait la Convention sur le génocide et doit immédiatement mettre fin à tout acte et toute mesure emportant manquement à ces obligations, notamment les actes ou mesures susceptibles de causer ou continuer de causer le meurtre de Palestiniens, de porter ou continuer de porter une grave atteinte à l’intégrité physique ou mentale de Palestiniens ou de constituer ou continuer de constituer une soumission intentionnelle du groupe à des conditions d’existence devant entraîner sa destruction physique totale ou partielle et doit respecter pleinement les obligations que lui fait la Convention sur le génocide».
Il est important de rappeler que la demande des mesures conservatoires contre l’Allemagne est intervenue quelques jours seulement après une première plainte pénale déposée par un groupe d’avocats, le 23 février dernier, devant la justice allemande, accusant le chancelier Olaf Scholz et plusieurs hauts responsables de son gouvernement de «complicité de génocide à travers la fourniture d’armes à Israël».