Crise mondiale: Quelles solutions pour l’Algérie
Crise mondiale
Quelles solutions pour l’Algérie
El Khabar, 23 août 2009
En été 2007, au lendemain de l’éclatement de la crise, plusieurs ministres algériens affirmaient, « nous n’avons rien à craindre. Grâce à nos réserves de change, la non connection de nos banques vis-à-vis du système monétaire international et la non convertibilité du dinar, comme s’il fallait s’en réjouir, en fait cela voulant dire grâce à notre sous-développement, nous sommes immunisés ».Aujourd’hui le Ministre des Finances qui nous avait habitué à des déclarations d’autosatisfactions reconnaît, je le cite « l’Algérie a les deux pieds dans la crise ». Face à cette situation, je propose les dix recommandations suivantes :
1.- Créer un comité de crise avec une structure de coordination sous la haute autorité du président de la république, composé d’experts indépendants, loin de toute injonctions politiques, pour analyser l’évolution de la crise mondiale afin d’être prêt à agir promptement si nécessaire avec une communication d’information de la population algérienne une fois par mois utilisant les médias lourds. La crise actuelle peut être une occasion d’encourager un consensus national en faveur de réformes dont l’Algérie a cruellement besoin ( conférence nationale à laquelle seraient conviés tous les partis politiques y compris l’opposition , syndicats,le patronat ,des organisations économico- sociales,les chercheurs universitaires).
2- Etablir des conditions favorables au développement en assurant la paix et la sécurité, la démocratie, l’Etat de droit, par une lutte efficace contre la corruption, la promotion des droits de l’homme, de la condition féminine, la protection de l’enfance, la liberté de la presse, en fait la bonne gouvernance politique, économique et d’entreprise qui sont la clef de tout développement fiable durable s’agissant de s‘attaquer à l’essentiel et non au secondaire (les militaires différencient justement , la stratégie des tactiques) afin de ne pas se tromper d’objectifs avec des dépenses monétaires non proportionnelles aux impacts économiques et sociaux.
3- Favoriser l’intégration économique du Maghreb arabe étant suicidaire pour chaque pays de faire cavalier seul, l’espace euro méditerranéen et arabo-africain étant notre espace naturel, en évitant cette vision ultra nationaliste égoïste largement dépassée au moment de la consolidation des grands ensembles. Pour cela participer à une action collective en vue de repenser tout le système économique mondial en intégrant le défi écologique, ce système actuel favorisant la bipolarisation Nord/Sud, la pauvreté préjudiciable à l’avenir de l’humanité, accéléré d’ailleurs par les gouvernances les plus discutables de certais dirigeants du Sud qui incombent la responsabilité à l’extérieur, l’impérialisme, ce chat noir dans un tunnel sombre que l’on ne voit jamais.
4-Lier la dynamique économique et la dynamique sociale par une lutte efficace concrète ( loin des textes juridiques et des discours démobilisateurs) contre une concentration excessive du revenu national au profit de rentiers destructeurs de richesses, dont la bureaucratie qui est le pouvoir numéro en Algérie. Pour cela un débat national sur la gestion de la rente des hydrocarbures est impératif.
5- Les subventions et filets de protection sociale devant viser en priorité les catégories de population vulnérables qui en ont le plus besoin. Donc d’organiser collectivement en synchronisant les tactiques au sein d ‘une stratégie globale datée permettant la cohérence et la visibilité, les processus permettant d’aboutir à une croissance économique partagée avec un rôle accru à l’Etat régulateur stratégique en économie de marché qui doit assurer la cohésion sociale .qui ne saurait se confondre avec l’étatisme des années 1970.
6- Tout en respectant la rigueur budgétaire afin d’éviter un taux inflation à deux chiffres qui pénaliserait les plus pauvres, continuer les réformes institutionnelles et micro économiques, tout en tenant compte de notre anthropologie (concilier modernité et son authenticité) car la stabilisation macro-économique est éphémère sans des réformes en profondeur institutionnelles et micro-économiques, difficiles car déplaçant des segments de pouvoir. De ce fait continuer une politique monétaire active corrélativement avec une politique budgétaire ciblée en misant sur l’efficacité de la dépense publique renvoyant d’ailleurs à la réforme de l’Etat.
7-Une politique active du taux de change de la monnaie, en cohérence avec le rééquilibrage du niveau de la croissance (par palier progressif) afin d’éviter une spirale dévaluation- inflation, mobiliser les ressources en renforçant l’épargne (locale et celle de l’émigration) et les investissements nationaux par l’intégration, loin de mesures autoritaires, de la sphère informelle dominante.
8- Accorder une priorité au développement humain,( la priorité des priorité étant la ressource humaine) particulièrement la santé, l’éducation, les sciences et technologies et le développement des compétences en favorisant la création, de trois grandes universités reliées aux réseaux mondiaux impulsant des pôles d’excellence pour les managers de demain.
9-Renforcer l’amélioration des infrastructures, y compris l’eau, le gaz, l’électricité, la technologie d’information et de communication (TIC).
10-Promotion des exportations hors hydrocarbures représentant actuellement que 2/3% du total , et une politique de substitution à l’importation , notamment l’agro-industrie, des mines, du tourisme et des services qui ont un caractère de plus en plus marchand. Renforcer les investissement notamment dans l’agriculture qui est la priorité des priorités pour les cultures vivrières souvent délaissées et en fixant un prix rémunérateur aux paysans. Toutes ces actions synchronisées doivent tenir compte des avantages comparatifs de l’Algérie au sein d’une économie ouverte, étant utopique une intégration à 100% et le véritable patriotisme économique à l’avenir se mesurera par la contribution de chaque algérien à la valeur ajoutée mondiale supposant la levée des contraintes à l’épanouissement de l’entreprise créatrice de valeur ajoutée , qu’elle soit nationale ou internationale évitant ces lourdeurs bureaucratiques et cette instabilité juridique . En conclusion, l’Algérie reste un pays prometteur et les circonstances sont en effet propices en faveur du développement durable dans l’activité économique. Faute d’une adaptation, la maîtrise du temps étant le principal défi pour l’Algérie, la crise mondiale constituera une menace et ce malgré les ressources financières provenant des hydrocarbures qui iront à l’épuisement (entre 16 et 25 ans maximum car on peut découvrir des centaines de gisements mais non rentables financièrement) sans préparer l’Algérie de demain devant penser comme tous les autres dirigeants aux énergies alternatives dont le solaire. Tout cela renvoie à des enjeux de politiques intérieures et géostratégiques de première importance.
23-08-2009
Dr Abderrahmane MEBTOUL