Crise financière: Premiers effets sur l’Algérie

Crise financière

Premiers effets sur l’Algérie

Par :Mustapha Mekideche, Liberté, 2 novembre 2008

Les premiers effets de la crise financière sur l’Algérie sont à présent bien là. Il reste à les analyser pour opérer les ajustements requis. Aussi des voix s’élèvent dans les institutions de la République, dans les sociétés civile et politique pour demander un débat national sur ce sujet.
Marque de cette prise de conscience : le gouvernement met en place une “commission de suivi” pour analyser et suivre la crise internationale. Parlons des premiers effets. En termes de recettes, il faudra d’abord confirmer les prévisions de clôture de 80 milliards $ pour 2008 compte tenu des prix de ce dernier trimestre.
Pour 2009, l’incertitude est plus grande mais pour fixer les idées, trois scénarii peuvent être avancés : un baril à 90$ (scénario optimiste), un baril au niveau actuel de 60$ (scénario moyen) et un baril à 37$ (scénario pessimiste).
Ce dernier scénario est basé sur le prix “retenu”, par principe de précaution, dans la loi de finances 2009 faite avec un déficit budgétaire de 20,5%. Quant aux effets “positifs” : réévaluation du dollar par rapport à l’euro, baisse des prix des matières premières et des actifs industriels, ils ne compenseront pas l’ampleur de la baisse des recettes.
Retenons le scénario moyen avec lequel l’Algérie n’engrangera au mieux que les deux tiers de ses recettes de 2008 soit 53 milliards $.
En partant de ce scénario, trois types d’ajustement devront être mis en œuvre. Le premier est de nature monétaire et financier car dès 2010, des tensions peuvent apparaître sur la balance des paiements du fait des importations de biens et de services estimées à 40 milliards $, des transferts des IDE, des paiements d’équipements lourds déjà engagés (pétrochimie, engrais, ciment, déssalement, centrales électriques, infrastructures, etc.). On ne sera probablement pas loin au total des 50 milliards $ à rapprocher des 53 : l’équilibre à peine en flux annuel. Des correctifs doivent être initiés pour sauvegarder ces équilibres sur le long terme. Il faudra par exemple encourager plus les pays du Golfe à investir davantage en Algérie, c’est plus sûr pour eux lorsque l’on observe qu’ils ont été atteints de plein fouet par l’éclatement de leur bulle financière mais aussi immobilière (perte dans les placements en bourse à l’étranger et chez eux, retour sur leurs grandioses investissements immobiliers compromis).
Avec en prime la pression faite sur leurs fonds souverains pour contribuer au plan de relance américain. Le sous-secrétaire américain au Trésor était sur place la semaine dernière pour capter leurs ressources. La deuxième piste est budgétaire. La contrainte budgétaire devra se durcir. Des économies sont à rechercher partout, des projets devront être retardés à défaut d’être reportés.
Au risque de ne pas se faire que des amis, la fermeté des pouvoirs publics sur le maintien de la taxe sur les véhicules neufs me paraît être payante car la crise dans cette branche rendra la compétition féroce et les concessionnaires européens présents en Algérie tardent à répercuter sur leurs prix la baisse de l’euro alors que dans un passé récent, ils avaient été très prompts à faire l’inverse.La fenêtre d’opportunité pour ce faire : la loi de finances complémentaire pour 2009 car la visibilité sera meilleure.
La troisième piste porte sur les échanges commerciaux et la relance de l’économie réelle. L’explosion des importations pourrait être contenue par des mesures du type de celle prise pour les médicaments mais pas seulement. Les autres branches devront être accompagnées pour couvrir la demande nationale en ciment, acier et autres inputs.
Substitution aux importations diriez-vous, pourquoi pas en ces temps menaçants ? Les grandes économies donnent l’exemple.

Mustapha MEKIDECHE